Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire a bien voulu interroger le secrétaire d'État aux affaires étrangères sur la situation au Kirghizstan. Le secrétaire d'État aux affaires étrangères s'est rendu au Kirghizstan le 5 novembre 2002 dans le cadre d'une tournée régionale incluant également le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Il a été reçu par le Président Akaev, le Premier ministre, M. Tanaev, et, en l'absence du ministre des affaires étrangères, par le premier vice-ministre des affaires étrangères, M. Kushtchubekov. M. Muselier était porteur d'un message du Président de la République à M. Akaev exprimant les remerciements de la France pour les facilités accordées à ses forces et la disponibilité de notre pays à oeuvrer au développement de la coopération bilatérale. Intervenant dix ans après la proclamation de l'indépendance kirghize et un an après le début de l'intervention de la coalition internationale en Afghanistan, cette visite avait pour objet de marquer l'intérêt de la France pour la stabilité et le développement de l'Asie centrale et sa détermination à renforcer son dialogue politique et sa coopération avec les pays qui la composent, et notamment avec le Kirghizstan. Plus d'un an après le 11 septembre 2001 cette visite a permis de mesurer les effets bénéfiques de l'élimination de la menace taleb et du fort engagement de la communauté internationale en faveur de la stabilisation et de la reconstruction de l'Afghanistan, principale menace contre la sécurité des pays d'Asie centrale. En effet, bien que n'étant pas frontalier de l'Afghanistan, le Kirghizstan avait été touché de plein fouet, en 1999 et 2000, par les incursions menées dans les régions méridionales du pays sur le pourtour de la vallée de Ferghana par les combattants du mouvement islamiste d'Ouzbékistan, allié des Taleban. Confronté à la contrainte de l'enclavement dans un environnement régional difficile, le Kirghizstan a su saisir l'opportunité offerte par le 11 septembre pour ouvrir son territoire à la coalition internationale. En application d'un accord conclu le 28 décembre 2001, la France a pu déployer de mars à octobre 2002 sur la base de Manas un important dispositif aérien (450 hommes, six avions de chasse, deux ravitailleurs), dont la mission s'est déroulée dans les meilleures conditions, grâce notamment à la qualité de l'accueil réservé par les autorités civiles et militaires et par la population du Kirghizstan. Le secrétaire d'Etat tenait à rendre hommage à cette coopération exemplaire. L'engagement international, à laquelle la France prend une part active, en faveur de la stabilisation et de la reconstruction de l'Afghanistan, principal foyer d'instabilité dans la région, représente pour tous les pays d'Asie une opportunité historique. Les retombées de la présence de forces occidentales et l'accroissement de l'assistance financière et technique des Etats-Unis et des pays de l'Union européenne jouent naturellement un rôle positif, mais les principaux acquis de la période écoulée depuis le 11 septembre 2001, découlent avant tout de l'intensification du dialogue politique avec les autorités kirghizes. Le Kirghizstan a connu une année difficile sur le plan intérieur en 2002. L'agitation des régions méridionales a débouché sur des troubles sérieux en mars 2002 dans le district de Jalal-Abad, entraînant la chute du Gouvernement. Dans ce contexte délicat, le président Akaev a opté pour le dialogue avec l'opposition. Cette stratégie, dont la mise en oeuvre réclame du doigté, a débouché sur la tenue, le 2 février 2003, d'un référendum constitutionnel qui a massivement approuvé les propositions de rééquilibrage des pouvoirs au profit du Parlement. Si les conditions d'application de cette réforme ne sont pas totalement clarifiées à ce stade, la volonté de dialogue et de concertation qui a présidé à sa préparation mérite cependant d'être saluée. En dépit de certaines tensions, le Kirghizstan a maintenu le cap des réformes : l'opposition s'exprime, la société civile est active, la situation des droits de l'homme s'est améliorée. Les difficultés endémiques que connaît le Kirghizstan résultent de l'histoire et d'une conjoncture économique défavorable. Elles affectent traditionnellement les régions méridionales du pays, dans lesquelles réside une importante minorité ouzbek. A cette particularité ethnique s'ajoute, dans cette zone, une tradition religieuse plus vivace, qui offre un terrain favorable au prosélytisme islamiste. La faiblesse relative de l'outil de défense et de sécurité et les lacunes de la coopération régionale, jointes à des conditions géographiques difficiles (haute montagne sur 80 % du territoire) ne permettent pas au Kirghizstan de faire face efficacement à la menace du terrorisme islamiste et à celle, aussi redoutable, que fait peser l'accroissement du trafic de drogue en provenance d'Afghanistan. Il y a là un défi pour l'ensemble de la communauté internationale. C'est dans cet esprit, et en vue de favoriser une mobilisation accrue de la communauté internationale, que la France a décidé d'organiser au mois de mai 2003 à Paris, dans le cadre de sa présidence du G8, une conférence sur les routes de la drogue en provenance d'Afghanistan, à laquelle le Kirghizstan, comme ses voisins, a apporté un soutien immédiat. Consciente des risques de déstabilisation liés à l'attrait de la propagande islamiste radicale et à l'ampleur du trafic de stupéfiants en provenance de l'Afghanistan, qui constituent une menace potentielle contre sa sécurité, la France comme ses partenaires de l'Union européenne a un devoir de solidarité active. La visite du secrétaire d'Etat a permis de confirmer la disponibilité de la France à approfondir la coopération bilatérale dans tous les domaines, y compris en matière de défense et de sécurité, au service de la démocratisation et des réformes, ainsi que sa détermination à oeuvrer au renforcement de la présence de l'Union européenne au Kirghizstan et dans les pays voisins en application des décisions adoptées depuis le conseil affaires générales du 10 décembre 2001.
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