Rubrique :
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étrangers
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Tête d'analyse :
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conditions d'entrée et de séjour
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Analyse :
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femmes coépouses d'un polygame
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Texte de la QUESTION :
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M. Damien Alary attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur la situation des femmes coépouses d'un polygame qui, depuis la loi Pasqua de 1993 leur interdisant l'obtention d'un titre de séjour, se trouvent aujourd'hui dans une situation dramatique. En effet, la loi Pasqua subordonne la délivrance et le renouvellement des titres de séjour à la condition de non-polygamie. L'étranger polygame, pour obtenir un titre de séjour, doit faire le choix de vivre avec une seule des coépouses, les autres doivent à terme quitter le domicile conjugal ou, en terme administratif, « décohabiter ». La cohabitation pose pour ces femmes de nombreuses difficultés, dont celle de trouver un logement. Élevant souvent plusieurs enfants avec de très faibles ressources, elles vivent en squatt. Cette situation a fait l'objet en juin 2001 d'une circulaire visant à aider ces femmes par divers dispositifs de droit commun relatifs au logement, à l'accompagnement social et à la formation. Pour les familles engagées dans un processus de cohabitation et qui se heurtent à la non-disponibilité de logement, cette circulaire prévoit de mobiliser le contingent HLM géré par le préfet. Mais, en dépit de cette mesure, ces familles sont confrontées à la pénurie de logement et leurs recherches sont infructueuses. De plus, outre le logement, ces ménages se heurtent à un autre problème : celui de l'accès au droit. Beaucoup d'étrangers polygames ne pouvant être expulsés car ils sont parents d'enfants français se sont vu retirer leur titre de séjour. Sans papiers, ils sont dans l'impossibilité de travailler. C'est pourquoi il lui demande quelles sont ses intentions pour améliorer la situation de ces familles, vivant la plupart du temps dans l'illégalité, et quels moyens peuvent être déployés afin que ces femmes « décohabitées » puissent accéder au droit et sortir de la précarité.
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Texte de la REPONSE :
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Le législateur a entendu, dès 1993, mettre un terme à toute situation de polygamie effective sur le territoire français, dans un souci notamment d'intégration et de préservation des droits des femmes et enfants issus de foyers polygames. Cette volonté s'est traduite par l'introduction dans l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée de nouvelles dispositions interdisant notamment la délivrance ou le renouvellement d'une carte de résident aux intéressés et préconisant le retrait d'une telle carte délivrée en méconnaissance de ces prescriptions. Ce principe de fermeté, sanctionné sur le plan du séjour par le retrait des titres délivrés en méconnaissance des dispositions précitées, ne connaît, aux termes de l'article 37 de ladite ordonnance, qu'un seul assouplissement en faveur des étrangers sollicitant le renouvellement d'une carte de résident obtenue avant l'entrée en vigueur de la loi du 24 août 1993. Ces derniers disposant désormais de fortes attaches familiales en France, les pouvoirs publics se sont attachés à mettre en oeuvre une politique de suivi et d'accompagnement des épouses désireuses de s'émanciper du foyer polygame. Pour cette catégorie d'étrangers, une circulaire du 25 avril 2000 a invité les préfets à leur délivrer, à l'expiration de leur titre de dix ans, une carte de séjour temporaire d'un an les autorisant à travailler, et dont le maintien se trouve subordonné à la preuve que les intéressés se sont inscrits dans un processus de décohabitation du foyer polygame. A cet égard, trois types de justificatifs peuvent être demandés par les préfectures : soit un acte juridique attestant la modification du régime matrimonial dans un sens comparable au régime monogamique en vigueur en droit français, soit un acte officiel établissant la cessation de la situation de polygamie par le retour dans leur pays des membres de famille concernés, soit un document justificatif établissant l'existence de domiciles distincts des personnes concernées sur le territoire français. Il convient de souligner que si le renouvellement des titres de séjour « salariés » n'est pas automatique, des instructions ont été néanmoins données aux préfets visant à ne conditionner le renouvellement de ces titres qu'à la seule justification que des démarches ont été engagées pour sortir du régime polygame. Il en résulte que les préfets ne sauraient refuser la poursuite du séjour au seul motif que les intéressés n'auraient pas changé de régime matrimonial ou n'auraient pas effectivement décohabité. Si les étrangers concernés se maintiennent en situation de polygamie sur le territoire français, leurs titres de séjour salariés seront renouvelés en carte de séjour temporaire portant la mention « visiteur ». Ce dispositif vise ainsi à concilier l'interdiction voulue par le législateur des situations de polygamie et la nécessité d'accompagner avec pragmatisme le processus d'autonomisation des épouses polygames.
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