Texte de la QUESTION :
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Faire connaître le microcrédit aux chômeurs et aux Rmistes dans les quartiers en difficulté est l'objectif que s'est assigné en cette fin de mois de mars 2006 l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE). « L'idée est d'aller au devant des clients potentiels », des personnes à qui les banques traditionnelles refusent tout crédit, explique cette association. Pendant la semaine du 28 mars au 1er avril, des forums d'information se sont installés dans des quartiers défavorisés pour expliquer comment créer son propre emploi. Ces forums ont accueillis les visiteurs dans soixante-dix lieux publics. Outre des informations sur le microcrédit, l'ADIE a mis en avant le témoignage de micro-entrepreneurs déjà financés par ses soins. Créée il y a dix-sept ans par des bénévoles pour aider des personnes défavorisées à créer leur propre emploi, l'ADIE finance chaque année plus de 6 000 micro-entreprises. Le taux de pérennité de ces entreprises est du même ordre que la moyenne nationale, soit 64 % sur deux ans. Selon cette association, près de 20 % des micro-entrepreneurs financés par l'ADIE savent à peine lire et écrire et réussissent aussi bien que les 23 % qui ont fait des études universitaires, selon l'ADIE. Outre son activité de financement (les prêts peuvent atteindre 5 000 euros), l'ADIE accompagne également les personnes dans leurs démarches administratives. L'ADIE développe son action grâce au soutien des banques, des collectivités territoriales, de l'État, du Fonds social européen et du secteur privé. Toutefois, bien que cette expérience d'insertion par l'économie solidaire ait fait largement ses preuves et démontré tout son intérêt dans la lutte contre le chômage des jeunes et de longue durée, l'État s'obstine à ne pas vouloir la développer et la structurer. Or il y a urgence. En conséquence, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande donc à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement de lui indiquer ses intentions au sujet de ce dossier. - Question transmise à Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.
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Texte de la REPONSE :
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L'honorable parlementaire a interpellé la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité sur ce qu'elle considère comme l'absence de soutien de l'État à l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE). Le soutien au microcrédit fait l'objet d'une politique soutenue de la part de ce Gouvernement, politique basée sur l'innovation sociale. Le succès de la micro-finance dans les pays du Sud, la situation des finances publiques en Europe qui pose les limites de l'aide sociale, la recherche de l'autonomie ont conduit à la transposition adaptée de l'expérience de la Grameen Bank initiée par le professeur Yunus au Bangladesh. La féminisation de l'emploi et du salariat, le partage du temps de travail, le recours aux services d'assistance pour une population vieillissante ont créé les conditions favorables au développement de micro-entreprises. Le microcrédit apparaît dès lors comme le mode de financement idoine de ces publics et de ces activités et comme une politique active de lutte contre le chômage et de retour à l'autonomie. Les réseaux d'appui à la création démontrent qu'une majorité de créateurs d'entreprise dégagent de leurs activités, plus ou moins rapidement, un revenu supérieur au RMI (2/3) et supérieur au SMIC (43 %). D'ailleurs, afin de démontrer son soutien au microcrédit, la ministre déléguée était présente à l'assemblée générale de l'ADIE le 11 mai 2006. Les micro-entreprises et les TPE sont des vecteurs essentiels de la création d'emploi (83 % des entreprises ne créent qu'un emploi). Depuis 2002, on observe une hausse importante du nombre de chômeurs créateurs (60 000 en 2002 ; 90 000 en 2003 et en 2004). L'accompagnement du créateur, durant la phase précédant la création et les deux ou trois années qui suivent celle-ci, est donc déterminant. Cet accompagnement a deux composantes : un accompagnement humain et technique assuré par les réseaux dédiés ; un accompagnement financier bicéphale : recherche de fonds propres et solvabilisation des prêts bancaires, maintien des ressources et de la couverture sociale des créateurs. Le fonds de cohésion sociale (FCS) a été institué par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 (art. 80-III). Il a « pour objet de garantir à des fins sociales des prêts à des personnes physiques ou morales et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise ». Les collectivités locales qui le souhaitent peuvent y contribuer. La contribution de l'État est financée par des crédits ouverts par les lois de finances des années 2005 à 2009 : 4 MEUR en 2005 ; 12 MEUR en 2006 ; 19 MEUR de 2007 à 2009. Les crédits sont inscrits au budget du ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Les 12 millions au titre de 2006 sont délégués au gestionnaire du fonds : la Caisse des dépôts. Le FCS implique donc un soutien au microcrédit dans le domaine traditionnel de l'insertion professionnelle, mais aussi dans celui de l'inclusion financière des publics exclus du crédit. Il s'agit du microcrédit social, étant considéré que la finalité directe ou indirecte de ce dispositif doit concourir à l'insertion sociale et professionnelle de ses bénéficiaires. Le Gouvernement a donc souhaité sur ce point précis restaurer la dignité des personnes et leur citoyenneté économique. La gestion du FCS a été confiée à la Caisse des dépôts (CDC) par convention entre l'État en date du 5 avril 2005. Cette convention de gestion est accompagnée d'un règlement intérieur. Le FCS intervient : soit en garantie de portefeuilles auprès d'établissements bancaires, notamment dans la première phase expérimentale de garantie de prêts personnels pour les populations en difficultés ; soit en dotation de fonds de garantie existants ou à créer. Le FCS est un fonds sans personnalité morale. Les organes de décisions tels que définis par la convention de gestion et le règlement intérieur du fonds de cohésion sociale sont les suivants : le comité d'orientation et de suivi de l'emploi des fonds (COSEF) : sa composition est fixée par la convention de gestion. Son président est nommé par arrêté du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. M. Michel Camdessus est président du COSEF qui définit les orientations stratégiques : le cadre des emplois financiers (part consacrée à chaque cible,...) ; les règles générales de contractualisation avec les opérateurs concernés ; les dotations annuelles aux fonds de garantie. Il définit aussi la politique de placement de la trésorerie, examine la compensation des coûts de gestion engagés par la CDC, et veille au bon fonctionnement du FCS et à son évaluation. Le comité d'agrément décide des conventionnements avec les opérateurs, bénéficiaires des interventions du FCS et s'assure de leur mise en place. La Caisse des dépôts exerce des missions spécifiques nécessaires au déploiement du FCS, le secrétariat permanent du COSEF, la mise en oeuvre des orientations fixées par le COSEF, la gestion administrative et financière. Le paysage des institutions de micro-finance (IMF) oeuvrant, en France, en faveur du développement du microcrédit est caractérisé par une diversité d'acteurs aux logiques, et moyens d'intervention et de soutien aux créateurs, différents et complémentaires. Le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement soutient ces réseaux. Dans ce paysage des IMF, l'ADIE est un partenaire de premier plan de l'État, notamment parce qu'elle applique le principe du microcrédit tel qu'il est défini par la Banque mondiale. Destinés à des projets de petite taille, les prêts sont délivrés au taux du marché. Ses fonds proviennent essentiellement des pouvoirs publics. L'ADIE développe un partenariat avec des banques locales et commerciales. Certaines antennes ont mis en place des partenariats locaux avec des organismes spécialisés dans le conseil et le suivi des créateurs ainsi que des organismes de cautionnement de prêts bancaires. L'ADIE propose également des prêts solidaires, des prêts d'honneur et de l'accompagnement des créateurs. L'ADIE est soutenue par des aides publiques avoisinant 24 millions d'euros répartis comme suit : Union européenne : 5,4 MEUR ; État : 2,6 ME (dont emplois aidés) ; institutions publiques : 0,9 EUR ; collectivités locales : 11,3 MEUR ; partenariats privés : 3,6 MEUR. Le développement du microcrédit voulu par le Président de la République implique effectivement une coordination et sans doute une professionnalisation des intervenants. Toutefois la question centrale du développement du microcrédit en France est celle du financement de l'accompagnement. Si la loi « Retour à l'emploi » a ouvert la possibilité pour le FCS de cofinancer les dépenses d'accompagnement - autant des créateurs d'activités que des bénéficiaires des microcrédits sociaux -, ce financement ne peut et ne doit nullement reposer sur les seuls fonds d'État ou sur des seuls fonds publics, le mécénat doit être encouragé. Enfin, la ministre tient à rappeler à l'honorable parlementaire que le comité interministériel de lutte contre les exclusions du 12 mai 2006 a étendu le bénéfice de l'exonération des cotisations sociales pour les chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise (ACCRE) : le coût financier pour l'État s'élève à 86 millions d'euros.
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