Texte de la QUESTION :
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M. Kléber Mesquida souhaite attirer l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, à propos des fichiers de police et de gendarmerie qui recensent aujourd'hui 24,4 millions de personnes. Les demandes d'accès indirect aux fichiers de la police explosent. De plus en plus de particuliers demandent à la CNIL de contrôler leur présence dans les fichiers de police judiciaire, principalement le STIC (système de traitement des infractions constatées) et le fichier de la gendarmerie (Judex). Depuis 2004 on constate une « explosion » des demandes selon la CNIL. Lorsque leur activité peut mettre en cause la sécurité publique, certaines entreprises ou administrations publiques sont habilitées à contrôler si leurs employés ou les éventuels demandeurs d'emploi sont présents dans les fichiers de police judiciaire. Or ces fichiers sont régulièrement mis en cause par les associations et la CNIL. Il a été constaté, en effet, un grand nombre d'erreurs. Ainsi, des cas de licenciements indus ou des demandes d'emploi rejetées sans aucun motif sont relevés et les vérifications opérées par l'autorité administrative dans le STIC ont abouti, dans 26 % des cas, par la rectification d'une erreur. En 2004, il avait été procédé à un grand nettoyage de ces fichiers qui concernait 1,2 million de personnes mises en cause. Cependant, en 2005, les investigations dans le STIC et le Judex ont donné lieu à la mise à jour ou à la suppression par l'autorité administrative de signalements inexacts ou de cas dont le délai de conservation était expiré. Cependant la loi relative à la lutte contre le terrorisme a renforcé le rôle et l'ampleur des fichiers. Le décret du 6 septembre 2005 permet en effet aux services de police de consulter une grande quantité de fichiers sans être contrôlés par un juge. Le décret attendu va étendre les motifs d'enregistrement au STIC à « l'ensemble des contraventions de cinquième classe contre les biens, les personnes, la nation, l'État ou la paix publique ». Ainsi, le CNIL a mis en garde sur l'utilisation de ces fichiers qui jouent le rôle de « casier judiciaire parallèle ». Devant l'état des lieux et les risques accrus vers des dérives graves qui peuvent émaner de ces dispositions, il lui demande s'il compte retirer ces mesures afin de respecter l'équilibre entre fichage et droits de citoyens et veiller à la protection des données personnelles.
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Texte de la REPONSE :
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Le système de traitement des infractions constatées (STIC) et JUDEX,respectivement mis en oeuvre par les services de police et par les unités de gendarmerie, sont des fichiers d'antécédents judiciaires dont la finalité est l'exploitation des informations contenues dans les procédures judiciaires établies par les forces de l'ordre aux fins de recherches criminelles. Les conditions de mise en oeuvre et d'exploitation du STIC sont strictement prévues par le décret en Conseil d'État n° 2001-583 du 5 juillet 2001 et le traitement des données à caractère personnel est opéré sous le contrôle du procureur de la République. Afin d'intégrer les dispositions de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, ce décret fait l'objet de modifications qui devraient être publiées prochainement. Les garanties dont le système est entouré portent entre autres sur l'alimentation du fichier et, l'effacement, l'ajout ou la rectification des données à caractère personnel à la demande du procureur de la République ou du mis en cause notamment. Des protections supplémentaires spécifiques existent lors de la consultation de ce fichier au titre de la police administrative (enquêtes administratives avant assermentation ou accès à certaines professions ou encore préalablement à la délivrance d'un port d'arme). En effet, dans ce cas, un module occulte automatiquement la visibilité des informations. Ainsi, n'apparaissent pas les données relatives aux victimes ainsi que celles qui concernent les mis en cause qui ont bénéficié d'une suite favorable (par exemple : non lieu ou classement sans suite pour insuffisance de charges). De plus, le décret n° 2005-1124 du 6 septembre 2005 qui fixe la liste des enquêtes administratives donnant droit à la consultation des fichiers STIC et JUDEX impose d'informer les intéressés du recours possible à cette procédure. Le module fait également obligation, par un message d'avertissement, de vérifier l'exactitude des informations enregistrées. La mise à jour des données est tributaire de la transmission des suites judiciaires par les parquets au gestionnaire du traitement. Aussi, le ministère de la justice entend développer une application informatique appelée « Cassiopée » qui regroupera l'ensemble des informations relatives au déroulement de la procédure pénale et permettra la bonne information du STIC. En 2005, 5 300 fiches ont été effacées ou corrigées de manière manuelle afin d'accéder à la demande d'un magistrat ou de donner suite à l'exercice du droit d'accès adressé à la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Ces modifications et suppressions s'ajoutent aux 1,3 million de fiches apurées en 2004 lors de la mise en place d'un système automatique de suppression des mentions atteintes par la prescription et aux 166 000 fiches supprimées en 2005 à ce titre. Au total, les dysfonctionnements demeurent très rares au regard du nombre de procédures enregistrées dans la base nationale du STIC et du nombre de personnes mises en cause (près de 1 070 000 en 2005). De fait, seulement 207 fiches ont été supprimées en 2005 à la demande de la CNIL. Par ailleurs, l'autorité administrative fonde sa décision à partir de l'enquête administrative, qui ne saurait se résumer à la seule consultation des fichiers. Elle dispose d'une marge d'appréciation qui lui permet de prendre en compte la situation de chaque intéressé en fonction des faits révélés au regard des fonctions qui doivent lui être confiées. L'inscription dans un fichier de police n'emporte nullement et automatiquement à elle seule une décision administrative défavorable. Les informations enregistrées dans le STIC sont systématiquement vérifiées et une attention particulière est portée sur l'actualisation des données. Compte tenu du nécessaire équilibre qui doit être recherché entre les impérieuses nécessités de protection des personnes et des biens, de lutte contre le terrorisme et le crime organisé et l'indispensable protection des libertés individuelles et collectives, le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, a confié à l'observatoire national de la délinquance une mission de réflexion sur le contrôle et l'organisation des fichiers de police et de gendarmerie nationales au regard des évolutions prévues pour les années à venir. Un groupe de travail auquel participent notamment des représentants de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur, des autorités administratives indépendantes (CNIL, CADA) et des personnalités qualifiées a été constitué.
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