FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 929  de  M.   Mothron Georges ( Union pour un Mouvement Populaire - Val-d'Oise ) QG
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  20/11/2003  page : 
Réponse publiée au JO le :  20/11/2003  page :  10815
Rubrique :  famille
Tête d'analyse :  mariage
Analyse :  mariages blancs. étrangers. pouvoirs des maires
DEBAT :

MARIAGE D'ÉTRANGERS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

    M. le président. La parole est à M. Georges Mothron, pour le groupe UMP.
    M. Georges Mothron. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, mais elle pourrait tout aussi bien s'adresser à M. le ministre de l'intérieur.
    Monsieur le garde des sceaux, l'obligation qui est faite aux maires de célébrer les mariages des personnes étrangères en situation irrégulière provoque un véritable malaise chez les élus, dont bon nombre de mes collègues de cette assemblée.
    M. Christian Bataille. Pourquoi ? Parlez pour vous !
    M. Georges Mothron. Le vide juridique actuel profite malheureusement aux filières d'immigration clandestine. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
    M. François Goulard. C'est vrai !
    M. Georges Mothron. Le maire que je suis veille à appliquer les principes de la République : respect de la liberté du mariage, sans regard particulier sur la nationalité. Pour autant, je transmets systématiquement au procureur de la République les dossiers qui me semblent relever de trafics dont l'objectif caché est l'obtention, à terme, d'un titre de séjour ou l'acquisition de la nationalité française.
    Entre février et octobre 2003, j'ai transmis cinquante-sept dossiers au procureur...
    M. François Goulard. Très bien !
    M. Georges Mothron. ... et j'ai été obligé de célébrer cinquante mariages. Sur ces cinquante-sept dossiers, le procureur m'a informé en avoir transmis vingt-cinq aux services de la préfecture et à la police des étrangers.
    Un jour d'octobre, il m'a adressé quatre lettres ronéotypées m'obligeant à célébrer quatre mariages de personnes en situation irrégulière. Il laissait au préfet le soin de contrôler celles-ci.
    Monsieur le garde des sceaux, cette situation est choquante, et je n'ai pas été élu à Argenteuil pour cela. C'est contraire à mes convictions républicaines ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur divers bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    Dans l'attente d'un éclaircissement, j'ai décidé de ne pas publier les bans et de ne pas procéder à ce type de mariage. (« Bravo ! » et applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Monsieur le garde des sceaux, nos concitoyens ont du mal à suivre. Ils comprennent mal cette situation paradoxale où, d'un côté, se manifeste la volonté gouvernementale de contrôler les clandestins et où, de l'autre, on leur offre une facilité par la loi.
    Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour lutter contre ces dérives ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
    M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
    M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Mesdames, messieurs, M. le ministre de l'intérieur et moi-même sommes confrontés à un double problème : d'une part, celui que vous vivez en tant que maires et sur lequel nombre d'entre vous nous ont interrogés depuis un certain nombre de mois et, d'autre part, le développement de réseaux de mariages arrangés. Nous luttons bien sûr contre ces réseaux, mais il nous faut aussi améliorer les conditions d'application de la loi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    M. François Hollande. Et le mariage arrangé entre Raffarin et Sarkozy ? (Sourires.)
    M. le garde des sceaux. Laissez-moi m'exprimer ! Le problème est suffisamment grave pour que l'on en parle sérieusement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
    Quel est le rôle du maire ? Il lui appartient de vérifier la réalité du consentement des époux. Vous avez déploré, monsieur Mothron, la difficulté, pour le procureur de la République, de vous donner une réponse claire. Permettez-moi de vous rappeler une évidence : le procureur de la République applique la loi telle qu'elle est - il ne peut l'inventer.
    Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Certains font de l'excès de zèle !
    M. le garde des sceaux. C'est la raison pour laquelle il est très important de renforcer les moyens d'action et de laisser suffisamment de temps pour mener les investigations nécessaires à la vérification de la réalité du consentement. La loi sur l'immigration approuvée le 28 octobre comprend un dispositif permettant de reporter l'échéance d'un mois, de façon à permettre aux services de police ou de gendarmerie de faire, à la demande du procureur de la République, les enquêtes nécessaires à la vérification de la réalité du consentement.
    Un deuxième élément de cette loi me paraît extrêmement intéressant et positif : le maire a la possibilité d'entendre les futurs époux pour vérifier la réalité de leurs intentions et, en cas de doute, séparément.
    Le dispositif législatif que vous avez adopté me paraît apporter des réponses à une situation inadmissible. Il nous faut attendre la promulgation de ce texte pour pouvoir en tester l'application. Quoi qu'il en soit, il me semble constituer une vraie réponse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

UMP 12 REP_PUB Ile-de-France O