DEBAT :
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RÉFORME DES UNIVERSITÉS
M. le président.
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste.
M. Yves Durand. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, à écouter vos interventions sur les universités depuis une semaine, il y a de quoi se perdre ! Je ferai un bref rappel historique. Le 19 novembre, vous vous dites déterminé à présenter un projet de loi sur les universités. Le 20 novembre, une fuite de l'Elysée fait titrer à un grand quotidien : « A l'Elysée, la réforme de l'université n'est pas à l'ordre du jour. » Dans l'après-midi même, un communiqué de presse de votre ministère dément l'information. Le 21 novembre, un de vos conseillers confirme votre volonté de présenter le projet de loi devant l'Assemblée nationale en juin. Pourtant, le même jour, dans un communiqué, vous dites : « aucun projet de loi n'est inscrit au calendrier parlementaire » et votre directeur de cabinet prétend qu'il n'y a rien à ajourner car ce projet n'existe pas. Néanmoins, le 22 novembre, ce même directeur de cabinet déclare, pour clarifier (Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste), que l'échéance de 2004 n'est « ni exclue ni prévue ». Et le 23 novembre, le Premier ministre fait part de son souhait que la discussion continue sur l'autonomie des universités.
Monsieur le ministre, il faut avouer que vous progressez à grands pas dans l'art de la cacophonie ! Lorsque vous aviez annoncé votre refus de tout transfert des personnels ATOS, au moins aviez-vous laissé le Premier ministre vous contredire. Là, vous faites encore mieux, puisque vous parvenez à vous désavouer vous-même ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Alors que notre service public d'enseignement supérieur aurait besoin d'être renforcé, votre budget sacrifie l'enseignement supérieur et la recherche : pas un poste nouveau créé en 2004 dans l'enseignement supérieur ! Alors que le chômage des jeunes ne cesse d'augmenter du fait de votre politique, votre attitude désinvolte à leur égard ne peut que provoquer rejet et révolte. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je voudrais vous poser deux questions simples auxquelles nous attendons des réponses enfin claires !
Avez-vous, oui ou non, un projet de réforme des universités ? Si oui, lequel et selon quel calendrier ?
Pouvez-vous par ailleurs, monsieur le ministre, nous assurer que la réponse que vous allez nous donner ne sera pas immédiatement démentie par un communiqué de votre ministère, éventuellement contredit par le Premier ministre, contredit à son tour par une fuite organisée de l'Elysée ? (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
M. Michel Delebarre. Heureusement qu'il a un papier !
M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale
et de la recherche. Monsieur Durand, je reconnais bien là votre habileté légendaire et votre capacité à soulever des lièvres pour mieux noyer le poisson ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
La vérité, et vous la connaissez parfaitement, c'est que la réforme en cours comprend deux étages.
Il y a d'abord un processus qui a été lancé en 1997-1998 et qui aboutit aujourd'hui : l'harmonisation des diplômes européens, qu'on appelle le LMD - licence-master-doctorat. Ce système a été adopté à la rentrée universitaire par vingt universités. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous soutenons évidemment, et vous aussi, je l'espère,...
Plusieurs députés du groupe socialiste. Répondez à la question !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. ... ce processus puisqu'il a été voulu par Claude Allègre, poursuivi par Jack Lang et qu'il me revient aujourd'hui de le mettre en place. L'harmonisation des diplômes européens est une formidable chance pour les étudiants qui auront la possibilité, pour que l'on comprenne bien l'avantage de cette réforme, de commencer leurs études à Rennes ou à Toulouse, de les poursuivre à Berlin ou à Madrid, pour éventuellement les terminer à Paris, sans perdre de temps dans leur cursus.
Plusieurs députés du groupe socialiste. La question !
M. Gérard Charasse. N'importe quoi !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Il y a un deuxième volet dans la réforme des universités, qui consiste à procéder à certains réglages au sujet desquels les étudiants s'interrogent - le découpage de l'année en semestres, les compensations de notes, et d'autres sujets - et sur lesquels nous apportons des réponses. En outre, les présidents d'université profitent de l'occasion pour demander, afin de mieux s'adapter au LMD, des modifications techniques concernant notamment les conseils d'administration, la création d'un conseil d'orientation, l'attribution d'un budget global.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Répondez à la question !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Ces mesures, vous le savez très bien, ne peuvent être adoptées que par la voie législative.
Ma réponse est très claire. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous défendons le LMD. La réforme est intégralement maintenue : il n'y a aucun recul sur ce sujet.
A propos des réglages qui sont nécessaires, je vais réunir les présidents d'université qui ont mis en place le LMD. La discussion continue tant avec les étudiants qu'avec les présidents. Il faut également rappeler - mais vous le savez parfaitement - qu'aucun projet de loi n'était inscrit à l'agenda parlementaire.
M. Yves Durand. Mais si !
M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche. Il est tout de même étonnant, monsieur le député, que cela vous ait échappé. Mais nous l'avons rappelé aux étudiants, pour bien leur montrer que la discussion continuait. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démoratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
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