Texte de la QUESTION :
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M. Yvan Lachaud attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés relatives à la résidence alternée. La loi du 4 mars 2002 a légalisé la résidence alternée mais, depuis, l'observation des pratiques judiciaires montre que cette possibilité est réservée aux parents qui en sont tous les deux d'accord et que, dans les autres cas, la liberté d'appréciation est laissée aux magistrats et se traduit encore, systématiquement, par l'affirmation de la famille monoparentale comme norme judiciaire et la soumission à une conception des rôles parentaux qui est généralement stéréotypée et peu adaptée à la société actuelle, en tout cas qui ne favorise pas l'égalité entre les femmes et les hommes. Il devrait être prévu que le tribunal examine prioritairement, à la demande d'un des parents au moins, la possibilité de fixer l'hébergement de l'enfant de manière égalitaire entre ses parents. En conséquence, il le prie de bien vouloir lui indiquer quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale, en introduisant la possibilité de fixer la résidence d'un mineur en alternance au domicile de chacun de ses parents, a élargi l'éventail des modalités d'organisation de la vie de l'enfant afin de permettre de mieux adapter les décisions à la diversité des réalités familiales. Le législateur n'a cependant pas entendu privilégier telle ou telle modalité de résidence. La résidence alternée, en particulier, ne saurait être la conséquence d'une revendication purement égalitaire des droits entre le père et la mère, au mépris de l'examen concret de chaque situation et de l'analyse au cas par cas des solutions les plus appropriées pour l'enfant. L'intérêt de l'enfant demeure en effet le critère unique qui doit guider aussi bien les parents dans le cadre de leurs conventions que le juge dans sa décision. C'est pourquoi il apparaît nécessaire de maintenir en ce domaine un large pouvoir d'appréciation des magistrats, étant précisé que ces derniers ont régulièrement recours, face à des situations complexes ou conflictuelles, à des mesures d'investigation confiées à des spécialistes de l'enfance. Par ailleurs, aux termes de l'enquête menée par la chancellerie sur les décisions rendues par les juges aux affaires familiales en matière de résidence alternée, il apparaît que la demande des couples séparés à l'égard de ce mode d'organisation de la vie de l'enfant reste modeste. En effet, seules 10 % des procédures mettant en cause la résidence des enfants mineurs donnent lieu à une demande d'alternance, qu'elle émane des deux parents ou d'un seul. En revanche, le caractère très consensuel d'une telle démarche doit être souligné, le juge étant saisi dans plus de 80 % des cas par une demande conjointe des parents. Le désaccord des père et mère ne fait pour autant pas obstacle à l'organisation de ce mode de résidence, lorsqu'il paraît adapté pour l'enfant et conforme à son intérêt. Toutefois, il convient d'observer que les juges n'imposent la résidence alternée qu'après avoir recueilli des informations sur la situation de la famille, notamment par le biais d'une enquête sociale, ou, dans un certain nombre d'hypothèses, après avoir fait application de l'article 373-2-9, alinéa 2, du code civil, qui permet la mise en oeuvre de l'alternance à titre provisoire. L'enquête montre également que, lorsqu'ils doivent trancher un litige sur la résidence alternée, les juges motivent leurs décisions sur la situation particulière de la famille et les aptitudes de chacun des parents, et non en fonction de considérations générales en faveur de tel ou tel mode d'organisation de la vie familiale. Au regard de l'ensemble de ces éléments, il n'apparaît pas opportun de modifier l'état du droit.
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