FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 94574  de  M.   Gaubert Jean ( Socialiste - Côtes-d'Armor ) QE
Ministère interrogé :  affaires étrangères
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  16/05/2006  page :  5037
Réponse publiée au JO le :  08/08/2006  page :  8370
Date de changement d'attribution :  08/08/2006
Rubrique :  marchés financiers
Tête d'analyse :  banques et établissements financiers
Analyse :  paradis fiscaux. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jean Gaubert souhaite attirer l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la nécessaire lutte contre les paradis fiscaux. En effet, selon un collectif d'associations, depuis les années 1970, le nombre de paradis fiscaux et judiciaires a presque triplé. Au coeur même du système financier international, près de la moitié des transactions financières mondiales transiterait par ses territoires, avec pour conséquences des pertes de ressources fiscales et une protection pour la criminalité internationale. Malgré les déclarations, les moyens d'investigation et de contrainte pour faire appliquer les normes existantes paraissent largement insuffisants. La « liste noire » du groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux ne compte désormais plus que deux États. En Europe, les contrôles de l'application des lois contre le blanchiment par les sociétés de compensation ne sont pas forcément très efficaces. De façon plus générale, les frontières ne semblent plus exister pour les capitaux, mais constituent des obstacles souvent insurmontables aux poursuites fiscales et judiciaires, comme l'ont dénoncé les magistrats européens dans l'appel de Genève en 1996. Il lui demande donc d'indiquer à la représentation nationale quelles mesures le Gouvernement entend prendre pour en finir avec le scandale des paradis fiscaux et judiciaires.  - Question transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Texte de la REPONSE : Sous l'expression générique « paradis fiscaux et judiciaires » se trouvent plusieurs réalités : certains pays appliquent des dispositions fiscales « dommageables » selon l'expression de l'OCDE, qui a retenu quatre critères principaux pour déterminer si un pays est un paradis fiscal : absence d'impôt ou impôts minimes ; existence de dispositions législatives ou réglementaires ou de pratiques administratives qui empêchent un échange effectif de renseignements à des fins fiscales avec d'autres gouvernements ; manque de transparence ; absence d'obligation d'exercice d'activités substantielles, donnant à penser que le pays tente d'attirer des investissements ou des opérations à motivation purement fiscale. En 2000, l'OCDE a ainsi identifié trente-cinq juridictions répondant aux critères du paradis fiscal. La majorité d'entre elles ayant pris l'engagement d'améliorer la transparence de leur système fiscal et réglementaire et de mettre en place des échanges effectifs de renseignements en matière fiscale avec les pays de l'OCDE d'ici le 31 décembre 2005, ces juridictions ont été retirées de la liste des paradis fiscaux et réglementaires. En décembre 2003, cinq pays étaient toujours classés comme « paradis fiscaux non coopératifs » par l'OCDE : Andorre, la Principauté du Liechtenstein, le Libéria, la Principauté de Monaco et la République des îles Marshall. D'autres pays, et parfois les mêmes, offrent des services financiers sans contrôles ou sans réglementations appropriées, protégés par un secret bancaire strict. Ils ne participent pas, ou très peu, à la coopération internationale contre la criminalité financière. Le Groupe d'action financière (GAFI) a retenu vingt-cinq critères permettant d'identifier les pays ou territoires non coopératifs (PTNC) et il a dressé, en 2001, une liste de vingt-trois PTNC. Aujourd'hui, compte tenu des efforts réalisés par les pays concernés, il ne reste plus qu'un pays sur cette liste. Cela ne signifie pas qu'aucun autre pays ne présente de difficultés, ni que les pays qui sont sortis de la liste répondent à toutes les normes établies par le GAFI mais simplement que les pays concernés ont réalisé les efforts requis pour satisfaire des critères minima. De ce point de vue, l'initiative prise par le GAFI a été efficace. Par ailleurs, il n'existe pas à l'heure actuelle de consensus au niveau multilatéral pour stigmatiser les pays et territoires particulièrement défaillants.Enfin, certains pays - qualifiés de « centres offshore » - ont des dispositifs législatifs ou des pratiques qui attirent d'importantes activités non résidentielles, sans se doter des contrôles prudentiels appropriés et affaiblissent la stabilité du système financier international. En 2000, le Forum de stabilité financière (FSF) avait établi une liste de quarante et un centres offshore qu'il avait classés en fonction de la faiblesse de leur dispositif de surveillance. Cette liste a été supprimée en 2005, compte tenu de l'opposition de plusieurs pays qui la considèrent obsolète. Le principal enjeu pour lutter contre les paradis fiscaux est donc de parvenir à mobiliser nos partenaires au niveau international. La France s'y emploie avec constance. Dans le cadre du GAFI, lorsqu'elle a exercé la présidence en 2005, la France a lancé un nouveau dispositif, dit du « tour de table », permettant de faire pression sur les pays qui favorisent le blanchiment et le financement du terrorisme. Par ailleurs, au sein du FSF, la France a obtenu la création d'un groupe de travail qui a vocation à identifier les faiblesses des centres offshore et à émettre des recommandations pour y remédier. Enfin, au sein de l'OCDE, la France, en qualité de présidente du Forum sur les pratiques fiscales dommageables, a activement contribué aux travaux destinés à lutter contre la concurrence déloyale et notamment au rapport du forum mondial rendu public en juin 2006 (les dernières réunions de ce forum mondial ont été couronnées de succès puisqu'un certain nombre de paradis fiscaux et de centres financiers importants ont pour la première fois accepté d'y participer et d'y collaborer, en présentant leurs pratiques nationales en matière d'échange de renseignement et de transparence). Celui-ci fait état de réels progrès réalisés avec les paradis fiscaux et les centres financiers, en matière de transparence et d'échange de renseignements. Dans ce cadre défini à l'OCDE, la France et d'autres États membres de l'OCDE ont engagé des négociations d'accords d'échange de renseignements qui ont notamment pour but de lutter contre la fraude fiscale. Il est en effet illusoire de penser qu'une action isolée de la France permettra de réduire les paradis fiscaux et autres territoires non coopératifs. Le Gouvernement est déterminé à lutter notamment par la négociation internationale contre l'évasion fiscale et la criminalité financière. Son effort en ce sens ne se relâchera pas.
SOC 12 REP_PUB Bretagne O