FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 95425  de  M.   Bois Jean-Claude ( Socialiste - Pas-de-Calais ) QE
Ministère interrogé :  intérieur et aménagement du territoire
Ministère attributaire :  intérieur et aménagement du territoire
Question publiée au JO le :  23/05/2006  page :  5327
Réponse publiée au JO le :  19/12/2006  page :  13347
Rubrique :  étrangers
Tête d'analyse :  immigration clandestine
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Jean-Claude Bois appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration où sera inscrit le principe « d'une immigration de travail ». À ce sujet, le chantier de l'hôpital d'Arras fait beaucoup parler de lui. En effet, deux semaines après que deux personnes aient été condamnées pour aide au séjour irrégulier et organisation de travail dissimulé, une opération des forces publiques s'est conclue par plusieurs gardes à vue. Le but de cette intervention était de vérifier la situation des étrangers travaillant sur le chantier et mettre en évidence les cas de travail clandestin. Si cette opération a été menée à bien, c'est qu'il existait déjà une surveillance après avoir découvert l'existence d'une filière indienne. En effet, au cours du mois de mars, six hommes d'origine indienne avaient été contrôlés et, pour plusieurs d'entre eux, en possession de faux papiers. Tous travaillaient pour une filiale de Bouygues qui les rémunérait entre 20 et 30 euros la journée de travail. Aujourd'hui, plusieurs personnes ont été interpellées, certaines embauchées, pour un chantier public, par une filiale d'une entreprise reconnue au niveau national et au-delà de nos frontières. Si la maîtrise de l'immigration est une des priorités du Gouvernement, des idées de la politique d'immigration professionnelle instituée au Canada peuvent effectivement être reconsidérées chez nous, mais la France ne fait plus rêver puisque terre d'accueil et de travail, elle n'est plus. Cette énième nouvelle loi pour une immigration choisie s'assimile plus à une chimère qu'à une réalité de demain. L'exemple de la fermeture de Sangatte démontre que le volontarisme politique ne représente pas un obstacle à la force du choix des candidats à l'exil. Quelles véritables solutions peuvent émerger d'un débat plus passionnel que rationnel ? Pense-t-on répondre aux difficultés de recrutement rencontrées par les entreprises de certains secteurs tels que le bâtiment, l'agriculture, l'hôtellerie, la restauration... Si les conditions de travail pouvaient s'améliorer et les rémunérations des salariés en rapport avec les heures travaillées, mais surtout en adéquation avec leur compétence, peut-être devrions-nous moins faire appel à l'immigration puisque des compétences sur notre territoire, nous en disposons ; ce sont les mentalités patronales qu'il est indispensable de faire évoluer ; les salariés, eux, ont su progresser. Il lui demande quel est son point de vue à ce sujet.
Texte de la REPONSE : La nouvelle législation sur l'immigration et l'intégration, qui a été entièrement approuvée par le Conseil constitutionnel et promulguée le 24 juillet 2006, construit un dispositif équilibré et volontaire, porteur d'un projet ambitieux à la fois pour les migrants et pour la nation française. Elle est, en ce sens, en rupture avec la conception de la politique d'immigration incontrôlée précédemment suivie. Cette nouvelle politique est axée en particulier sur le principe de l'immigration choisie. Ce principe signifie que, comme toutes les grandes démocraties du monde, la France doit pouvoir choisir le nombre des migrants qu'elle accueille, avec quels objectifs et dans quelles conditions. L'immigration choisie est à la fois le contraire de l'absence d'immigration et le contraire de l'immigration subie, c'est-à-dire celle qui est subie tant par les Français que par les migrants qui ne parviennent pas à s'intégrer et à vivre décemment en France. L'État doit en effet pouvoir se fixer des objectifs quantifiés d'immigration, pour déterminer la composition des flux migratoires, dans l'intérêt de la France comme dans celui des pays d'origine. La politique d'immigration choisie permet ainsi de lier l'immigration aux capacités d'accueil de notre pays. Elle repose sur des règles claires et prévisibles, prévoyant que le candidat à l'immigration en France doit être autorisé à venir s'y installer, avant son entrée sur notre territoire. Il ne s'agit pas d'un système élitiste qui n'accepterait que des étrangers extrêmement qualifiés mais d'une politique de régulation de l'immigration apportant sa contribution positive à la vie de notre nation. La répartition des flux migratoires est d'autant plus illogique dans notre pays que l'immigration pour motif de travail est restée jusqu'à présent à un niveau marginal : 11 500 cartes de séjour ont été délivrées à ce titre en 2005. Cette faiblesse de l'immigration du travail signifie que nous ne sommes pas capables d'accueillir en France des migrants pourvus d'un emploi et contribuant à la croissance. Le système totalement paradoxal dans lequel se trouve la France depuis trente ans a conduit, au prétexte de protéger l'emploi national, à verrouiller, par un système de contrôles a priori effectués par l'administration du travail, l'introduction en France d'étrangers pourvus d'un emploi. Or, dans le même temps, contre toute logique, il a été décidé de laisser entrer dans notre pays un flux croissant d'immigration familiale, bénéficiant nécessairement du droit au travail, ce qui a abouti à déséquilibrer fortement le marché de l'emploi, dans la mesure où, la plupart du temps, les étrangers arrivant dans ce cadre sont très peu qualifiés et peu intégrés. La réforme adoptée rompt avec cette logique et fonde une nouvelle politique de l'immigration du travail. Celle-ci, s'inspirant d'idées ou de notions développées par certains pays étrangers, définit un nouveau modèle français de l'immigration, reposant sur les trois axes fondamentaux que sont l'immigration choisie, le lien nécessaire entre l'intégration et l'immigration et le codéveloppement. La loi nouvelle permet de faciliter la venue en France d'étudiants et d'actifs divers (intellectuels, créateurs d'emplois, techniciens...) qui pourront apporter à notre pays leurs talents et acquérir, en retour, une expérience utile à leur pays d'origine. La mobilité et la circulation des compétences seront encouragées, dans l'intérêt même des pays en développement. Pour ce faire les choix d'immigration pourront être adaptés en fonction des zones géographiques. Enfin, il est prévu un assouplissement des conditions de recrutement des étrangers, dans des secteurs et des bassins d'emploi qui souffrent de pénuries de main-d'oeuvre. La politique d'immigration de la France devra par ailleurs s'inscrire dans une vraie stratégie de codéveloppement. La réussite de la politique d'immigration passe en effet par la mise en oeuvre par la France de véritables partenariats avec les pays d'origine, prenant en considération la situation et les besoins des différents pays. La législation nouvelle donne ainsi à la France les outils permettant d'agir de manière réactive et adaptée aux réalités de la vie économique et sociale à la fois de notre pays et des différents pays d'origine.
SOC 12 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O