FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 96609  de  M.   Raoult Éric ( Union pour un Mouvement Populaire - Seine-Saint-Denis ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  13/06/2006  page :  6123
Réponse publiée au JO le :  29/08/2006  page :  9196
Rubrique :  jeunes
Tête d'analyse :  délinquance
Analyse :  agressions filmées. lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Éric Raoult attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la pratique du « happy slapping ». En effet, cette pratique de la vidéotransmission, qui consiste à frapper quelqu'un dans la rue, tout en filmant la scène avec un portable pour la diffuser sur internet, est née à Londres à l'automne 2004. Pour certains jeunes, la violence devient un moyen de communication normal, un rapport social comme un autre. L'agression d'une enseignante au lycée de Porcheville dans les Yvelines l'a récemment prouvé une nouvelle fois. Le portable devient un instrument important pour évaluer la violence gratuite entre jeunes et pour contrôler son intensité. Dans son panorama 2005 de la cybercriminalité, le Club de la sécurité des systèmes d'information français dénonce pour la première fois la présence de vidéos de « happy slapping » sur le web. Il lui demande donc de lui préciser si les pouvoirs publics comptent se pencher sur ce phénomène inquiétant.
Texte de la REPONSE : Le garde des sceaux, ministre de la justice, souhaite appeler l'attention de l'honorable parlementaire sur le lait que le « happy slapping » ne constitue pas une notion juridique. A l'origine. l'expression définissait une pratique apparue outre-manche consistant en une attaque surprise d'un passant, choisi au hasard, filmée, puis diffusée sur internet. Le terme de « happy slapping » s'est ensuite banalisé pour décrire la mise en scène de formes de délinquance plus traditionnelles et d'une gravité accrue. Si le « happy slapping » n'est pas réprimé par la loi en tant que tel, de nombreuses qualifications juridiques sont susceptibles de s'appliquer à ce phénomène. S'agissant des faits principaux, la qualification juridique applicable sera évidemment fonction de la nature des faits commis. Il pourra notamment s'agir de violences volontaires ou d'infractions à connotation sexuelle. En ce qui concerne l'usage d'un téléphone pour enregistrer la commission des faits principaux il convient de distinguer selon la qualité de l'auteur de cet enregistrement. S'il s'agit d'un acteur à part entière des faits principaux - l'agression physique ou sexuelle par exemple - il pourra être poursuivi du chef de l'infraction principale avec la circonstance aggravante éventuelle de réunion. S'il ne participe pas en tant que tel aux faits mais qu'il a aidé à leur commission ou qu'il en a eu l'idée, il pourra être poursuivi du chef de complicité en application des dispositions de l'article 121-7 du code pénal. À ce titre, il encourra les mêmes peines que l'auteur principal. S'il n'est pas un participant actif, il pourra encore être poursuivi du chef de non-assistance à une personne en danger, conformément aux dispositions de l'article 223-6 du code pénal. Cette infraction est réprimée d'une peine de 5 ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. La diffusion de l'enregistrement des faits principaux est aussi susceptible de fonder des poursuites pénales sur le fondement des dispositions du code pénal ou de celles de la loi du 29 juillet 1881. Ainsi, les articles 226-1 et 226-2 du code pénal punissent d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait de capter, enregistrer ou transmettre l'image ou les paroles d'une personne, sans son consentement et de conserver ou diffuser les documents ou enregistrements ainsi obtenus. L'article 226-8 incrimine quant à lui le fait de publier, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec la parole ou l'image d'une personne, s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage, ou s'il n'en est pas expressément fait mention. De même, l'article 227-24 alinéa 1 du code pénal punit d'une peine de 3 ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende lorsque le message est susceptible d'être vu par des mineurs, le fait soit de fabriquer, de transporter ou de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d'un tel message. Par ailleurs, l'article 39 bis de la loi du 29 juillet 1881 réprime d'une peine de 15 000 euros d'amende le fait de diffuser, de quelque manière que ce soit, des informations relatives à l'identité ou permettant l'identification d'un mineur victime. De même, l'article 39 quinquies de cette même loi punit de la peine de 15 000 euros d'amende le fait de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support des renseignements concernant l'identité d'une victime d'une agression ou d'une atteinte sexuelle ou l'image de cette victime lorsqu'elle est identifiable. En outre, l'article 35 quater de la loi du 29 juillet 1881 réprime de la même peine d'amende la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de la reproduction des circonstances d'un crime ou d'un délit, lorsque cette reproduction porte gravement atteinte à la dignité d'une victime et qu'elle est réalisée sans son consentement. Aux termes de l'article 47 de la loi du 29 juillet 1881, les poursuites peuvent être engagées d'office à la requête du ministère public, sauf, en application de l'article 48-8° , dans le cas d'atteinte à la victime prévue par l'article 35 quater, où la poursuite n'a lieu que sur la plainte de la victime. Ainsi, si le « happy slapping » ne constitue pas une notion de droit juridique, elle correspond à une réalité qui est susceptible d'être appréhendée pénalement.
UMP 12 REP_PUB Ile-de-France O