Texte de la QUESTION :
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M. Simon Renucci souhaite appeler l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les comparutions immédiates. En 2005 avec 29 466 condamnations, les comparutions immédiates, justice ultrarapide sont devenues les principales sources d'incarcération. Selon la commission de suivi de la détention provisoire, 44 600 demandes ont été prononcées, soit une augmentation de 45 % par rapport à l'année 2000 (31 991). Les effets néfastes sur le fonctionnement même de la justice sont multiples. Audiences qui se prolongent tard dans la nuit, procès où en quelques minutes sont prononcées des mois ou des années de prison, averties au dernier moment les victimes sont souvent absentes. Les comparutions immédiates se caractérisent très souvent par une justice expéditive. Les éléments de preuve sont souvent manquants. Le risque majeur, résultat de l'inflation des comparutions immédiates, réside dans l'erreur judiciaire pour les justiciables qui comparaissent malheureusement dans des conditions que ne leur garantissent pas un procès équitable. Aussi il lui demande de bien vouloir lui indiquer lesmesures que le Gouvernement prendra pour rétablir la confiance en la justice.
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Texte de la REPONSE :
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Le garde des sceaux, ministre de la justice, entend apporter à l'honorable parlementaire des précisions sur le cadre procédural de la comparution immédiate, qui concilie rapidité dans la réponse pénale et exercice effectif des droits de la défense. S'il est vrai que le recours à cette procédure est de plus en plus fréquent - 46 601 procédures de ce type ont été initiées en 2005 contre 38 115 en 1996 -, son importance relative diminue puisqu'elle représentait 9 % des poursuites diligentées devant le tribunal correctionnel en 2005 contre 10 % et 10,2 % en 2002 et 2003. La procédure de comparution immédiate est plus particulièrement utilisée à l'encontre des récidivistes et/ou pour apporter une réponse judiciaire à des actes de délinquance ne nécessitant pas de nouvelles investigations, mais qui sont empreints d'une certaine gravité. Il est donc logique que ces procédures aient représenté 32,8 % des incarcérations ordonnées au cours de l'année 2004, que ce soit au titre d'une détention provisoire ou au titre d'une peine. Néanmoins, la mise en oeuvre de la procédure de comparution immédiate s'apparente d'autant moins à une « justice expéditive », que les dispositions des articles 395 à 397 du code de procédure pénale qui régissent cette matière respectent bien évidemment les droits de la défense et les principes fondamentaux de la procédure pénale. En application de ces textes en effet, le prévenu doit être obligatoirement assisté par un avocat qui doit pouvoir prendre connaissance de la procédure préalablement à l'audience. De plus, la procédure ne peut suivre son cours qu'avec l'accord des parties puisqu'il est prévu que le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure est de droit s'il est demandé par le prévenu. Lorsqu'un tel renvoi intervient, s'il est exact que le tribunal correctionnel peut ordonner le placement du prévenu en détention provisoire, l'article 397-3 du code de procédure pénale limite à deux mois - ou quatre mois lorsque la peine encourue est supérieure à sept ans - la durée de cette mesure. Le prévenu ou son avocat a aussi le droit de demander au tribunal d'ordonner tout acte d'information qu'il estime nécessaire à la manifestation de la vérité ou de procéder à un supplément d'information. En outre, le tribunal n'a pas l'obligation de juger le prévenu dans le cadre de cette procédure et peut décider, en cas de complexité de l'affaire, de renvoyer le dossier au procureur de la République. Lorsque le prévenu détenu interjette appel de la décision de condamnation, la cour d'appel est tenue de statuer dans les quatre mois, sous peine de remise en liberté d'office de l'intéressé. En ce qui concerne les victimes, outre le fait que la procédure de comparution immédiate leur offre souvent la possibilité d'obtenir une décision de condamnation, y compris sur l'action civile, rapidement exécutable, il doit être rappelé que la juridiction de jugement dispose toujours de la possibilité d'ordonner un renvoi sur intérêts civils afin de préserver leurs droits. Il convient enfin de souligner que les condamnations prononcées dans le cadre des procédures de comparution immédiate, outre qu'elles sont susceptibles d'appel, le sont par des magistrats du siège qui demeurent, avec d'autres, conformément aux dispositions de l'article 66 de la Constitution, « les gardiens de la liberté individuelle » et qui sont amenés à forger leur intime conviction sur des preuves qui leur sont soumises dans les mêmes conditions que pour tous les autres dossiers faisant l'objet d'autres voies de poursuite.
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