DEBAT :
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AFFAIRE EXECUTIVE LIFE
M. le président. La
parole est à M. Eric Besson, pour le groupe socialiste.
M. Eric Besson. Monsieur le Premier ministre, je souhaite vous interroger sur le dossier Executive Life et aimerais obtenir de vous des réponses claires à des questions simples. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mme Martine David. Ça changera !
M. Jacques Desallangre. C'est impossible !
M. Eric Besson.
Première question : qui a pris la décision de ne pas signer avec la justice américaine un accord dit partiel, c'est-à-dire n'intégrant pas le groupe Pinault ? De toute évidence, le Président de la République est intervenu en ce sens, comme il l'avait d'ailleurs exprimé à Bruxelles avant de le démentir partiellement à Tunis. Mais il semble que ce soit vous-même, monsieur le Premier ministre, qui ayez exigé de M. Mer de ne pas signer un accord qui aurait pourtant protégé le Crédit lyonnais, le CDR et donc le contribuable français. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Oui ou non, avez-vous donné un ordre écrit à votre ministre de l'économie lui interdisant de signer un accord partiel ? (Mêmes mouvements.)
M. Yves Nicolin. Rendez l'argent !
M. Eric Besson.
Deuxième question : quelle est votre stratégie de négociation ? Vous avez refusé successivement des propositions à 300, 400 puis 585 millions de dollars. Le procureur américain parlait, il y a quelques jours, de 700 millions de dollars. La façon dont vous négociez va coûter très cher aux contribuables français. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous en sommes déjà à plus de dix euros par Français.
Troisième et dernière question : avez-vous bien mesuré les risques que vous faites actuellement courir à nos intérêts en paraissant désormais privilégier la voie d'un procès au pénal, comme vient de le suggérer le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ?
M. Bernard Accoyer. Qui était au pouvoir ?
M. le président.
Monsieur Accoyer, je vous en prie !
M. Eric Besson. Risques financiers qui peuvent être colossaux puisque l'on parle désormais de milliards d'euros, risques de suppression de la licence du Crédit lyonnais, et donc du Crédit agricole, et risques pour l'image de la France !
M. Jean Marsaudon. Ça vous va bien !
M. Eric Besson. En résumé, monsieur le Premier ministre, avez-vous, oui ou non, et je souhaite que vous n'éludiez pas cette question, donné un ordre écrit et maîtrisez-vous le risque que vous faites courir à notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La
parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le député, c'est moi qui ai pris cette décision. Je l'ai prise par écrit et je l'assume. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je l'ai prise après avoir consulté toutes les parties.
M. Jean-Marc Ayrault. Heureusement que l'on est là pour poser des questions !
M. le Premier ministre. Ce qui est très important, mesdames, messieurs les députés, ce que vous devez savoir, vous qui défendez l'intérêt de la nation, c'est qu'une signature, c'est une reconnaissance de culpabilité. Ce que l'on demande au gouvernement français, c'est de payer 500 millions de dollars,...
M. Jacques Myard. Scandaleux !
M. le Premier ministre. ... de reconnaître des culpabilités sur un dossier sur lequel on ne lui donne pas les informations. Je sais simplement aujourd'hui qu'il y a cinquante chefs d'accusation, mais je ne les connais pas ! Et l'on voudrait que je signe, au nom de l'Etat français, pour une gestion dont mon gouvernement n'est pas responsable ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Bernard
Accoyer. Exactement !
M. le Premier ministre. Je vois bien qu'il y a des intérêts, mais je vois aussi que certains acteurs sont en dehors de l'accord, y compris des acteurs des banques que vous avez citées.
M. François Hollande. Et alors ?
M. le Premier ministre. J'avais signé un accord.
Mme Martine David. Et
M. Pinault ?
M. le Premier ministre. M. Pinault était en dehors de l'accord que j'avais accepté de signer, mais tous les dirigeants du Crédit lyonnais y étaient. Le parquet américain a sorti certains dirigeants qui ont refusé de reconnaître leur culpabilité et il aurait fallu que moi, je reconnaisse une culpabilité, alors que j'ai les mains blanches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. François
Hollande. Pourquoi avez-vous signé alors ?
M. le Premier ministre. Je prends mes responsabilités, mais je n'ai pas peur de la vérité et je n'ai pas peur de la justice.
Mme Martine David. On verra !
M. le Premier ministre. S'il doit y avoir procès, il y aura procès. Je reste favorable à un accord, mais je veux que toutes les parties prenantes y participent, parce que, si l'on doit revenir au civil sur le dossier pénal après, on trouvera à un moment des chefs d'inculpation et l'on dira que j'ai signé, au nom de l'Etat français, pour 500 millions de dollars sans avoir le contenu du dossier.
M. Arnaud Montebourg. Pinault vous tient !
M. le Premier ministre. Ce ne serait pas responsable. Je ne pratique pas cette méthode qui consiste à acheter une décision de justice. Je n'ai pas peur de la justice, même aux Etats-Unis. Je souhaite vraiment que le dossier soit clarifié. C'est une décision que j'assume, moi et personne d'autre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
Mme Martine David. Vous ne serez plus là quand il faudra payer !
M. Charles Cova. Les aboyeurs à la niche !
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