FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 9869  de  M.   Dray Julien ( Socialiste - Essonne ) QE
Ministère interrogé :  économie
Ministère attributaire :  économie
Question publiée au JO le :  30/12/2002  page :  5218
Réponse publiée au JO le :  17/03/2003  page :  2026
Rubrique :  banques et établissements financiers
Tête d'analyse :  Crédit lyonnais
Analyse :  privatisation. réglementation
Texte de la QUESTION : M. Julien Dray souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le décret du 30 avril 2002 pris pour application du Livre IV du code du commerce, tel qu'il est issu de la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001, instaurant un nouveau régime du contrôle des concentrations. L'article L. 410-1 du code du commerce indique par ailleurs que les dispositions du droit de la concurrence « s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services ». Le secteur bancaire en fait donc partie. L'argument selon lequel l'article L. 511-4 du code monétaire et financier exclurait le secteur bancaire du contrôle des concentrations semble contradictoire avec le principe d'interprétation des textes selon lequel les dispositions d'une loi spécifique qui dérogent à la loi générale s'interprètent strictement. Le code monétaire et financier se borne en effet à préciser que les opérations de banque sont soumises à un régime de poursuites propre au secteur bancaire. Autrement dit, la loi précise les conditions de mise en oeuvre du droit de la concurrence sur un point particulier, mais n'exclut en rien le principe général de l'application du droit de la concurrence « à toutes les activités de production, de distribution et de services ». De plus, l'article 2 du décret du 30 avril 2002 renvoie à l'article 5 du règlement européen n° 4064/89 du Conseil du 21 décembre 1989 (modifié par le règlement n° 1310/97 du Conseil du 30 juin 1997). Cet article 5 prévoit un mode spécifique de calcul du chiffre d'affaires des « établissements de crédit et autres établissements financiers » afin de déterminer les seuils de concentration. Il en résulte donc, en application du droit positif français, que la mise en oeuvre du contrôle des concentrations vise le secteur bancaire dont le calcul des seuils se fait selon des règles spécifiques telles qu'indiquées à l'article 5, point 3, du règlement européen. A cet effet, il lui demande de bien vouloir préciser si la cession des actions précédemment détenues par l'Etat dans le Crédit lyonnais s'est faite en respectant les éléments de droit ci-dessus en matière de contrôle des concentrations dans le secteur bancaire. Il lui demande également si la poursuite des opérations en cours pour la prise de contrôle du Crédit lyonnais par l'un des deux « prétendants » que sont le Crédit agricole et BNP-Paribas, n'aboutit pas à un résultat contraire aux dispositions légales en matière de concentrations, tant au regard des lois internes que communautaires.
Texte de la REPONSE : L'auteur de la question s'interroge sur le régime applicable au contrôle national des opérations de concentration dans le secteur bancaire et, plus précisément, sur l'existence dans le code monétaire et financier d'un régime dérogatoire au droit commun des concentrations issu du livre IV du code de commerce. En matière de concentrations, l'article L. 511-4 du code monétaire et financier est doté d'une vaste portée. En effet, il ne se borne pas « à préciser que les opérations de banque sont soumises à un régime de poursuites propre au secteur bancaire » ni ne constitue une simple « mise en oeuvre du droit de la concurrence sur un point particulier ». Par son intermédiaire, le législateur a exclu du champ d'application du livre IV du code de commerce les domaines définis aux articles L. 311-1, L. 311-2 et L. 511-2 du code monétaire et financier. Il en résulte que, de même que les organes de contrôle de droit commun ne sont pas compétents, le droit commun des concentrations ne s'applique pas aux activités bancaires et connexes des établissements de crédit. Par conséquent, dans ces domaines, la loi dote une autorité administrative indépendante, le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI), d'une compétence exclusive pour se prononcer, au titre du « bon fonctionnement du système bancaire », à la fois sur les aspects concurrentiels et sur les aspects prudentiels des opérations de concentration menées entre deux établissements de crédit. En revanche, en raison du principe d'interprétation stricte des exceptions rappelé dans la question, les autres activités des établissements de crédit sont soumises au droit commun de la concurrence et à ses autorités, et doivent donc, à ce titre, faire l'objet d'une notification au ministre chargé de l'économie. Cette répartition des compétences, issue de la loi, n'a été remise en cause ni par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques ni, a fortiori, par le décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du code de commerce. Le rachat par BNP-Paribas de la part détenue par l'Etat dans le Crédit lyonnais n'a pas donné lieu à un examen par le CECEI des aspects concurrentiels de l'opération dans la mesure où il ne s'agissait que d'une prise de participation ne mettant pas BNP-Paribas en mesure d'exercer une « influence déterminante » sur l'activité du Crédit lyonnais. En revanche, l'auteur de la question trouvera une illustration récente des conditions de mise en oeuvre du droit des concentrations bancaires français à l'occasion du projet de prise de contrôle du Crédit lyonnais par le Crédit agricole puisque les autorités de droit commun se sont prononcées sur les aspects non bancaires ou connexes de l'opération tandis que l'examen de ces aspects bancaires et connexes est actuellement pendant devant le CECEI. Enfin, s'agissant du contrôle communautaire des concentrations, les opérations de concentration qui répondent aux critères d'application du règlement n° 4064/89 du conseil sont de la compétence exclusive de la Commission européenne, sans que le règlement ne distingue selon les activités exercées par les entreprises concernées.
SOC 12 REP_PUB Ile-de-France O