FICHE QUESTION
12ème législature
Question N° : 98  de  M.   Reiss Frédéric ( Union pour un Mouvement Populaire - Bas-Rhin ) QOSD
Ministère interrogé :  affaires sociales, travail et solidarité
Ministère attributaire :  affaires sociales, travail et solidarité
Question publiée au JO le :  13/01/2003  page :  131
Réponse publiée au JO le :  15/01/2003  page :  25
Rubrique :  formation professionnelle
Tête d'analyse :  apprentis
Analyse :  boulangerie. conditions de travail
Texte de la QUESTION : M. Frédéric Reiss attire l'attention de M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur les conditions de travail des apprentis boulangers définies dans les articles R. 117 bis-1, R. 117 bis-2 et R. 117 bis-3 du code du travail. Ces conditions interdisent à un apprenti de moins de seize ans de commencer à travailler entre 4 heures et 6 heures du matin, c'est-à-dire au moment où s'élabore précisément la fabrication du pain. C'est ainsi qu'un garçon né le 24 décembre 1987 (donc âgé de quinze ans !) n'ayant pas le niveau pour entrer au lycée en cycle long, a choisi par goût et avec l'accord de ses parents, d'entrer en apprentissage dans la boulangerie à sa sortie de la classe de 3e. L'apprenti, ses parents et son maître d'apprentissage souhaitent qu'il puisse participer à la fabrication du pain ; lorsqu'il arrive à 6 heures du matin, le pain est cuit ! Ce n'est pas très motivant pour ce jeune. Dans l'immédiat (pour les apprentis boulangers mais aussi d'autres métiers de la bouche...) il lui semble urgent non pas de toucher au code du travail, mais de mettre en place un système dérogatoire qui serait un « droit à la formation » après la scolarité obligatoire après la classe de 3e. Les inspecteurs du travail pourraient donc autoriser la formation avant 6 heures du matin dans le cas de la boulangerie, par exemple : ce ne serait pas alors considéré comme un travail.
Texte de la REPONSE :

CONDITIONS DE TRAVAIL
DES APPRENTIS BOULANGERS

    M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour exposer sa question, n° 98, relative aux conditions de travail des apprentis boulangers.
    M. Frédéric Reiss. Madame la ministre déléguée à la parité, ma question porte sur les conditions de travail des apprentis boulangers définies dans les articles R. 117 bis-1, R. 117 bis-2 et R. 117 bis-3 du code du travail. Elle s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Avant de la formuler plus précisément, permettez-moi de faire quelques réflexions.
    L'apprentissage, bien compris et bien mené, est une voie d'excellence pour des élèves plus attirés par le travail manuel que par le travail intellectuel. Pour arriver à former des artisans de qualité dont notre société a besoin, il ne s'agit pas de revenir au système d'il y a vingt ou trente ans, où les jeunes entraient dans la vie active à quatorze ans, mais tout simplement d'être plus proche des réalités du terrain. Il est étonnant de constater que, dans nos sociétés dites modernes, nos jeunes sont confrontés de plus en plus tôt, souvent dès l'âge de onze ou douze ans, aux phénomènes de délinquance, de racket, de drogue, de pédophilie et autres violences ou traumatismes. C'est malheureusement la dure réalité dans nos villes, nos villages ou nos quartiers, dans des familles où, parfois, tous les repères ont disparu.
    Aujourd'hui, quand un jeune de quatorze ans s'intéresse au monde du travail, on le regarde souvent comme un extraterrestre, lui donnant l'impression que le travail est sur une autre planète, donc intouchable.
    Le Gouvernement veut redonner ses lettres de noblesse au travail pour libérer les énergies, selon l'expression utilisée par le Premier ministre. Une des solutions pour y parvenir passe par le développement de l'apprentissage et de la formation professionnelle après le collège, mais aussi par la mise en place d'un dispositif de formation par alternance dès l'âge de quatorze ans pour les élèves motivés. Ce sera peut-être l'une des clés pour combattre l'ennui à l'école, dont on parle tant en ce moment, et l'occasion d'ouvrir le débat qui s'impose avec le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.
    A l'heure actuelle, l'entrée en apprentissage se situe après la classe de troisième. Si un élève fait une scolarité normale, il n'a pas nécessairement seize ans à ce moment-là. C'est ainsi qu'à la rentrée 2002, un garçon de ma circonscription, né le 24 décembre 1987, donc âgé de quinze ans, qui n'avait pas le niveau pour entrer au lycée en cycle long, a choisi, par goût et avec l'accord de ses parents, d'entrer en apprentissage dans la boulangerie à sa sortie de troisième. L'apprenti, ses parents et son maître d'apprentissage souhaitent qu'il puisse participer à la fabrication du pain, mais lorsqu'il arrive à la boulangerie à six heures du matin, le pain est déjà cuit, ce qui n'est pas très motivant pour ce jeune.
    En effet, les conditions définies dans les articles R. 117 bis-1, R. 117 bis-2 et R. 117 bis-3 interdisent à un apprenti de moins de seize ans de commencer à travailler entre quatre heures et six heures du matin, c'est-à-dire au moment où s'élabore précisément la fabrication du pain.
    Dans l'immédiat, il me semble urgent, pour les apprentis boulangers mais aussi pour ceux qui ont choisi d'autres métiers de la bouche, non de toucher au code du travail, mais de mettre en place un système dérogatoire qui consisterait en un « droit à la formation » après la scolarité obligatoire après la troisième. Les inspecteurs du travail pourraient donc autoriser la formation avant six heures du matin, dans le cas de la boulangerie par exemple. Ce ne serait pas alors considéré comme un travail.
    Quelles modalités peuvent être mises en oeuvre, madame la ministre, pour permettre à ce jeune apprenti - mais aussi à beaucoup d'autres - de devenir boulanger, métier artisanal emblématique, synonyme de vie dans nos villes et nos villages ?
    M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle.
    Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le député, permettez-moi d'abord de saluer l'intérêt que vous portez au travail, à l'apprentissage et en particulier à l'insertion professionnelle des jeunes de notre pays.
    Il est vrai que l'âge d'entrée en apprentissage est, en principe, de seize ans, mais il peut être ramené à quinze ans lorsque le jeune a terminé sa scolarité de premier cycle du secondaire.
    Dans le cas très particulier des apprentis âgés de quinze ans, aucune dérogation permettant de travailler avant six heures n'est prévue tant par la législation nationale que par la directive européenne avec laquelle nous devons naturellement être en conformité. Cette obligation est en effet expressément prévue par l'article 9 de la directive du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail, qui indique que les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour interdire le travail des enfants entre vingt heures et six heures.
    J'ajoute que cette interdiction se justifie pour des raisons de santé et de sécurité au travail des jeunes de moins de seize ans. Sa remise en cause semble très difficile et n'apparaît pas nécessairement très justifiée en l'état actuel de notre droit ; en tout cas, elle n'est pas envisageable.
    Je confirme néanmoins toute l'attention que le Gouvernement porte à votre analyse et, en particulier, à la revalorisation du travail et des carrières professionnelles ainsi qu'à l'apprentissage. Enfin, je rends encore une fois hommage à l'action personnelle que vous menez dans ce domaine particulier.

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