Texte de la QUESTION :
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M. Claude Bartolone attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur l'évolution inquiétante de la démographie médicale dans le département de la Seine-Saint-Denis, alors qu'elle a annoncé le 8 avril 2010 l'installation d'une mission de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la réduction des inégalités sociales de santé en France. La densité en médecins s'avère un cinquième plus faible en Seine-Saint-Denis que sur le territoire national. La densité en généralistes libéraux « de premier recours » est notamment la plus faible de France avec 63,2 médecins pour 100 000 habitants. Avec une densité de moins de 6,8 pour 10 000 habitants, les communes de Clichy-sous-Bois, Neuilly-Plaisance, Neuilly-sur-Marne, Le Pré-Saint-Gervais et Tremblay ont une densité particulièrement faible de médecins généralistes « en ville ». Pour ce qui concerne les médecins spécialistes, la densité s'avère 2 à 4 fois plus faible suivant les spécialités par rapport aux moyennes franciliennes. La Seine-Saint-Denis, avec 40 infirmiers libéraux de proximité pour 100 000 habitants, a également la plus faible densité nationale. Les centres de santé, malgré les efforts consentis et les incertitudes budgétaires qui les touchent, ne peuvent compenser ces déficits d'effectifs : des patients sont régulièrement diagnostiqués tardivement pour des pathologies sévères. La mortalité masculine consécutive à un cancer est ainsi 30 % supérieure à celle de Paris et 9 % à celle de la France entière. Par ailleurs, l'offre de soins destinée aux femmes enceintes et aux enfants de moins de 6 ans connaît de fortes carences. Coubron, Dugny, La Courneuve, Île-Saint-Denis, Vaujours, Villemomble et Villetaneuse n'ont même pas de pédiatre « en ville ». La situation est identique pour les gynécologues-obstétriciens : 8 communes - Le Bourget, Coubron, Dugny, Gournay-sur-Marne, Le Pré Saint-Gervais, L'Île Saint-Denis, Vaujours et Villetaneuse - n'ont pas de gynécologue. Les services départementaux de protection maternelle et infantile (PMI), dont le réseau est particulièrement développé avec 118 centres, subissent de ce fait une pression d'autant plus grande que les dispositifs de santé scolaire s'affaiblissent d'année en année. La pyramide des âges laisse entrevoir des difficultés à court terme sur l'ensemble du département. Le système en place de limitation d'accès aux études médicales et le grand nombre de départs à la retraite dans les prochaines années rendent l'avenir incertain. Le Président de la République s'est récemment engagé à Livry-Gargan à valoriser les soins de proximité, notamment dans les zones urbaines et périurbaines. D'une part, alors que le financement de la PMI pourrait être remis en cause, il lui demande quels moyens le Gouvernement compte mobiliser pour l'agence régionale de santé et la caisse primaire d'assurance maladie afin que le conseil général de la Seine-Saint-Denis puisse continuer à assurer son action. D'autre part, il souhaite savoir quelles mesures il entend prendre pour mettre fin à la situation de grave inégalité sociale et territoriale que connaît le département en matière de santé.
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Texte de la REPONSE :
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ÉVOLUTION DE LA DÉMOGRAPHIE MÉDICALE DANS LE DÉPARTEMENT DE
LA SEINE-SAINT-DENIS Mme la présidente. La
parole est à M. Claude Bartolone, pour exposer sa question, n° 1035, relative
l'évolution de la démographie médicale dans le département de la
Seine-Saint-Denis. M. Claude Bartolone. Monsieur le
secrétaire d'État à la justice, le Gouvernement a annoncé, le 8 avril,
l'installation d'une mission de l'Inspection générale des affaires sociales sur
la réduction des inégalités sociales de santé en France. À Livry-Gargan, le
Président de la République s'est d'ores et déjà engagé à valoriser les soins de
proximité en milieu périurbain. En matière de démographie médicale, la
Seine-Saint-Denis est particulièrement défavorisée, qu'il s'agisse de sa
situation actuelle ou celle qu'on peut prévoir. La densité en médecins est
faible. Celle des généralistes libéraux de premier recours est la plus faible de
France avec 63,2 médecins pour 100 000 habitants. Plusieurs communes, du
Pré-Saint-Gervais à Clichy-sous-Bois, ont très peu de médecins généralistes " en
ville ". La densité en médecins spécialistes se révèle quant à elle deux à
quatre fois plus faible en moyenne qu'en Île-de-France suivant les spécialités.
Avec 40 infirmiers libéraux pour 100 000 habitants, la Seine-Saint-Denis a
également la plus faible densité nationale. Il est courant que des patients
soient diagnostiqués tardivement pour des pathologies sévères : la mortalité
masculine consécutive à un cancer est ainsi supérieure de 30 % à celle de Paris
et de 9 % à celle de la France entière. Les centres de santé qui, de surcroît,
sont sujets à des incertitudes budgétaires, ne peuvent compenser les manques
d'effectifs. Par ailleurs, l'offre de soins destinée aux femmes enceintes et aux
enfants de moins de six ans connaît de fortes carences. Plusieurs communes n'ont
pas de pédiatre " en ville " quand d'autres n'ont pas de gynécologue. Au nombre
remarquable de 118, les centres de protection maternelle et infantile financés
par le département subissent une pression d'autant plus grande que les
dispositifs de santé scolaire s'affaiblissent. Du fait de la limitation
d'accès aux études médicales et d'un grand nombre de départs à la retraite, la
pyramide des âges laisse prévoir d'importantes difficultés dans les années qui
viennent. Alors que le financement de la protection maternelle et infantile
pourrait être remis en cause, quels moyens comptez-vous mobiliser pour l'agence
régionale de santé et la caisse primaire d'assurance maladie afin que le conseil
général de la Seine-Saint-Denis puisse continuer à assurer son action ? Par
ailleurs, quelles mesures entendez-vous prendre pour mettre fin à la situation
de grave inégalité sociale et territoriale que connaît la Seine-Saint-Denis en
matière de santé ? Mme la présidente. La parole est à M.
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. M. Jean-Marie
Bockel, secrétaire d'État à la justice. Vous avez bien voulu,
monsieur Bartolone, interroger Mme la ministre de la santé - qui se trouve à
l'étranger - sur l'évolution de la démographie médicale dans le département de
la Seine-Saint-Denis. Dans le cadre de la mise oeuvre des maisons de santé
pluridisciplinaires, prévues par la loi portant réforme de l'hôpital, plusieurs
outils seront rapidement mis à la disposition des médecins. Ainsi les ARS leur
proposeront des contrats collectifs sur la base du volontariat, contrats qui
seront dotés de budgets pluriannuels significatifs prenant en compte la
diversité des situations. Les schémas régionaux d'organisation des soins
ambulatoires permettront de soutenir les projets répondant à de vrais besoins de
santé. Une aide financière est d'ailleurs accordée depuis 2008 pour la création
de maisons de santé pluri-professionnelles à hauteur de 50 000 euros par projet.
Ce montant est porté à 100 000 euros pour les projets dans les quartiers
relevant de la dynamique " Espoir banlieue ". Les médecins pourront aussi
organiser mieux la prise en charge de leurs patients sur la base d'une nouvelle
répartition des tâches avec les autres professionnels. Je ne détaille pas ces
protocoles que vous connaissez. De plus, des contrats d'engagement de service
public seront proposés, dès la prochaine rentrée universitaire, à des étudiants
en médecine et à des internes. Ce contrat prévoit qu'en contrepartie d'une
allocation mensuelle, ces étudiants s'engageront à exercer dans des zones
identifiées comme sous-denses. Ces mesures complètent la politique entreprise
en faveur de la filière universitaire en médecine générale qui a permis
d'augmenter le nombre d'internes choisissant la médecine générale. En ce qui
concerne le département de Seine-Saint-Denis qui se caractérise, vous l'avez
dit, par de faibles densités en professionnels libéraux par rapport à la moyenne
régionale, le Gouvernement a envisagé plusieurs mesures. Cinq villes sont
classées dans ces zones déficitaires : Clichy-sous-Bois, Montfermeil, La
Courneuve, Bobigny et Pierrefitte. Elles ont signé une convention avec la caisse
primaire d'assurance maladie, la mission régionale de santé et le conseil
général. Un guichet unique a été ouvert pour aider à l'installation des
professionnels de santé. Afin de mieux assurer la permanence des soins, trois
maisons médicales de garde, financées par le fonds d'intervention pour la
qualité et la coordination des soins, fonctionnent à Aulnay-sous-Bois,
Saint-Denis et Montreuil avec plus de cent médecins libéraux, et offrent des
soins efficaces et rapides. Pour les périodes de permanence, une maison de santé
pluri-disciplinaire est en cours d'ouverture à Saint-Denis et un projet de
maison de santé est à l'étude sur le territoire de Clichy-Montfermeil. Pour
ce qui est de la lutte contre les cancers, que vous avez évoquée, la
Seine-Saint-Denis est dotée d'un groupement d'intérêt public du comité
départemental des cancers. Il dispose d'un budget annuel de plus de 2,5 millions
d'euros pour sensibiliser les populations du département aux programmes de
prévention et de dépistage organisés des cancers. Enfin, même si le sujet de
la protection maternelle et infantile est une compétence exclusive du conseil
général, je ne doute pas que les collectivités territoriales et 1'ARS
d'Île-de-France sauront coordonner leurs actions au service des patients. Le
Gouvernement attache la plus grande importance - comme vous-même - à la
réduction des inégalités de santé. C'est une des priorités de Roselyne Bachelot.
Une mission de l'IGAS a d'ailleurs été mise en place pour identifier les leviers
concrets qui permettront de réduire ces inégalités de santé - mission qui vaut
aussi, bien sûr, pour le département de Seine-Saint-Denis. Mme la
présidente. La parole est à M. Claude Bartolone. M. Claude
Bartolone. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez évoqué le conseil
général à plusieurs reprises. Voyez le lien qu'on peut établir entre les moyens
financiers des collectivités locales et leurs capacités d'intervention sur des
services publics indispensables à la survie d'une partie de la population. La
dernière étude de l'INSEE montre que le département de Seine-Saint-Denis est le
plus jeune et le plus pauvre de France. De toutes les inégalités, de toutes les
difficultés qui s'amoncellent sur ce département, la plus grande est celle
relative à l'espérance de vie - j'ai évoqué le taux de cancer masculin. Aussi,
pour combattre cette inégalité, faut-il, au-delà de la commande de rapports,
mettre en place un outil de santé le plus rapidement possible.
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