FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 1122  de  M.   Rochebloine François ( Nouveau Centre - Loire ) QOSD
Ministère interrogé :  Santé et sports
Ministère attributaire :  Santé et sports
Question publiée au JO le :  15/06/2010  page :  6431
Réponse publiée au JO le :  23/06/2010  page :  4567
Rubrique :  professions de santé
Tête d'analyse :  ophtalmologistes
Analyse :  effectifs de la profession. répartition géographique
Texte de la QUESTION : M. François Rochebloine souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur les délais d'attente anormalement longs pour obtenir un rendez-vous avec un médecin ophtalmologiste dans certaines régions françaises. Il lui rappelle que, dans de nombreux départements, dont celui de la Loire, il est difficile de consulter un spécialiste à proximité de son domicile, en dehors des structures hospitalières. Quelles qu'en soient les causes, cette pénurie de praticiens crée un vrai problème de santé publique qui, au-delà de la gêne certaine pour les assurés sociaux, peut poser des difficultés en matière de prévention des troubles et de prises en charge des urgences. Aussi, il la remercie de bien vouloir lui préciser quelques éléments statistiques sur le nombre de médecins ophtalmologistes et leur inégale répartition en métropole, et enfin de lui indiquer quelles mesures le Gouvernement compte mettre en oeuvre pour répondre aux besoins des territoires où actuellement on enregistre un réel déficit de spécialistes en ophtalmologie.
Texte de la REPONSE :

RÉPARTITION INÉGALE DES OPHTALMOLOGISTES
SELON LES RÉGIONS

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n° 1122.
M. François Rochebloine. Ma question concerne les délais anormalement longs imposés à de nombreux patients du département de la Loire qui souhaitent consulter un médecin ophtalmologiste.
Cette situation n'est apparemment pas propre à ce département. Elle n'est pas non plus nouvelle : le constat du manque de praticiens dans certaines spécialités tend à devenir récurrent dans certaines parties du territoire national.
En effet, on a observé ces dernières années une tendance lourde : les jeunes spécialistes diplômés délaissent souvent des installations réputées coûteuses et risquées au profit d'autres spécialités jugées plus sécurisantes, alors même que les besoins de soins vont croissant.
Je crois utile d'alerter Mme la ministre de la santé sur cette situation particulièrement préoccupante, car, au-delà du problème de santé publique et de la gêne évidente des assurés sociaux, une véritable fracture se crée entre les territoires. En effet, la répartition des ophtalmologistes entre les régions est particulièrement déséquilibrée.
Ainsi, dans la ville de Saint-Chamond, qui compte environ 36 000 habitants pour un bassin de vie de près de 80 000 habitants, il ne reste qu'un seul praticien, les délais d'attente dépassent six mois, et il est difficile, voire impossible, d'obtenir plus rapidement un rendez-vous avec un spécialiste d'une commune voisine.
Or les ophtalmologistes soulignent avec raison qu'en matière de pathologies oculaires, la phase de dépistage est essentielle et qu'il est inconcevable de se passer de leurs services parce que l'on habite dans un secteur sous-médicalisé.
Au cours des années à venir aura-t-on encore accès à une médecine de proximité de qualité dans les zones rurales ou dans les bassins de vie en voie de dévitalisation ou, tout simplement, peu attractifs - ne parle-t-on pas en la matière de déserts médicaux ?
Cette question mérite d'être posée car il n'échappe à personne que les projections démographiques montrent que nombre de médecins spécialistes et généralistes sont appelés à partir en retraite dans les dix ans qui viennent et ne seront pas remplacés, faute de successeurs. Je déborde du cadre de l'ophtalmologie pour faire écho aux inquiétudes légitimes exprimées par les habitants des communes concernées et par leurs élus, en espérant que des mesures incitatives fortes permettront de corriger l'évolution négative que l'on constate, hélas, depuis déjà trop d'années.
Je souhaite donc obtenir quelques données statistiques sur le nombre d'ophtalmologistes en exercice et leur répartition sur le territoire métropolitain.
Au vu de ces données objectives, quelle est la position du Gouvernement sur ce dossier particulièrement sensible ? Quelles mesures le ministère de la santé envisage-t-il de mettre en oeuvre pour répondre aux besoins des populations là où on enregistre un réel déficit de spécialistes en ophtalmologie ? C'est un appel au secours que je lance. Nous avons la chance d'avoir à Saint-Chamond un médecin ophtalmologiste, une femme remarquable qui consacre beaucoup de temps à ses patients mais qui, malheureusement, ne peut pas tout faire.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur Rochebloine, ma collègue Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, est retenue, vous le savez, en Afrique du Sud. Vous l'interrogez sur la répartition des ophtalmologistes selon les régions.
Au 1er janvier 2008, il y avait 5 503 ophtalmologistes en activité en France métropolitaine. Depuis 1984, l'effectif a augmenté de 51 %, contre 48 % pour l'ensemble des médecins. La densité nationale est de neuf ophtalmologistes pour 100 000 habitants. Si leur démographie est relativement stable ces dernières années, elle va diminuer dans les années à venir. Par ailleurs, leur répartition est inégale sur le territoire, ce qui pose, vous l'avez souligné, des problèmes d'accès aux soins pour nos concitoyens. Cette situation préoccupe le Gouvernement, et la ministre de la santé a déjà apporté plusieurs réponses s'agissant des compétences des professionnels, de leur mode de collaboration, de leur rémunération ainsi que de la démographie des ophtalmologistes.
Tout d'abord, le Gouvernement a renforcé le rôle des opticiens en matière de délivrance de lunettes : depuis le 15 avril 2007, les patients de plus de seize ans peuvent consulter directement un opticien pour un renouvellement à l'identique de leurs lunettes ou pour un renouvellement avec une modification du degré de correction - sous réserve de l'accord de l'ophtalmologiste. Il suffit au patient de se rendre chez un opticien, muni d'une prescription médicale datant de moins de trois ans.
De plus, la ministre de la santé a prévu dans la loi " Hôpital, patients, santé et territoires " le principe général de la collaboration entre professionnels de santé, c'est-à-dire la possibilité pour un professionnel de santé de déléguer une partie de ses compétences à un ou plusieurs collègues, dans le cadre d'un protocole autorisé par l'agence régionale de santé et validé par la Haute autorité de santé. De plus en plus de cabinets d'ophtalmologistes s'organisent ainsi pour améliorer le service rendu aux patients et réduire les délais d'attente. Cette mesure législative permet aux ophtalmologistes de mieux organiser la prise en charge de leurs patients, sur la base d'une nouvelle répartition des tâches avec les autres professionnels, en particulier avec les orthoptistes. Ces protocoles de soins sont à l'initiative des ophtalmologistes et leur permettent d'optimiser leur temps de travail, de valoriser leurs compétences et d'assurer au patient une meilleure prise en charge. Pour accompagner cette évolution, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 introduit la possibilité de partager la rémunération d'un acte entre le médecin et un autre professionnel de santé, ce qui apporte de la souplesse aux démarches de coopération.
Enfin, s'agissant de la démographie, rappelons qu'un chirurgien sur cinq en cours de formation est un ophtalmologiste. De surcroît, il est prévu d'augmenter le nombre d'internes en ophtalmologie dans les années à venir. À cet égard, la loi HPST prévoit la possibilité d'adapter le nombre d'internes formés dans chaque discipline aux besoins de chaque région.
M. le président. La parole est à M. François Rochebloine.
M. François Rochebloine. Je remercie Mme Bachelot de cette réponse, mais ses propos méritent d'être nuancés. Elle indique qu'il y a neuf ophtalmologistes pour 100 000 habitants. Or, dans la vallée du Giers, où j'habite, il n'y en a que deux, et à Saint-Chamond, qui en comptait cinq il n'y a pas si longtemps, il en reste un seul. On en arrive à des conséquences médicales aberrantes à cause de délais d'attente devenus trop importants. La crise est grave. Je ne doute pas que le nombre d'ophtalmos formés soit considérable puisqu'il y a une forte progression, mais la répartition territoriale n'est pas bonne. La solution n'est pas facile à trouver, mais il y a vraiment urgence.

NC 13 REP_PUB Rhône-Alpes O