Texte de la REPONSE :
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PLAN DE DÉPARTS ANTICIPÉS CHEZ RENAULT M. le président. La parole est à M.
Jean-Pierre Brard, pour exposer sa question, n° 1215, relative au plan de
départs anticipés chez Renault. M. Jean-Pierre Brard. La
direction de Renault France vient d'annoncer un dispositif de départs anticipés
à la retraite concernant 3 000 de ses salariés. Bien entendu, ce plan n'est pas
un effet de la mobilisation populaire pour les retraites : c'est le dernier
épisode en date de la désindustrialisation de notre pays, que le Gouvernement
mène tambour battant. Madame la ministre chargée de l'apprentissage et de la
formation professionnelle, je dois dire que vous faites bien peu de cas des
engagements pris par le Président de la République qui avait promis aux
Français, en mars dernier, la mobilisation générale pour " enrayer le déclin de
l'industrie française " ! Quel est le résultat de cette " mobilisation générale
" ? 200 000 emplois supprimés dans l'industrie au cours de la seule année
dernière, 500 000 entre 2000 et 2008 ! Le cas de Renault est exemplaire.
Après avoir supprimé, au cours de ces cinq dernières années, 11 700 emplois en
France, Carlos Ghosn récidive aujourd'hui et détruit 3 000 emplois
supplémentaires, puisque ce sont des préretraites qui ne disent pas leur nom, et
que ne compense aucun remplacement. De Sandouville à Douai en passant par
Vénissieux ou Le Mans, ce sont donc 3 000 nouvelles familles qui vont être
sacrifiées sur l'autel des revenus de M. Ghosn et des actionnaires de Renault.
Ce sont 3 000 familles qui vont faire les frais des 26 % de hausse de l'action
Renault en 2010. Dois-je vous rappeler, madame la ministre, le salaire - si
l'on peut encore appeler cela un salaire - de M. Ghosn en 2010 ? 8 millions
d'euros, c'est-à-dire cinq siècles de SMIC ! Dois-je vous rappeler, madame la
ministre, le chiffre d'affaires de Renault au premier semestre 2010 ? 19,6
milliards d'euros, en hausse de 23,1 % ! Dois-je enfin vous rappeler, madame
la ministre, que l'État détient 15 % du capital de cette entreprise
? Soutenue il y a deux ans par l'État à grands coups de milliards d'euros,
l'entreprise de M. Ghosn continue de licencier en France et de délocaliser ses
chaînes de production à l'étranger. La Slovénie, la Turquie, la Roumanie
produisent désormais les voitures destinées au marché français. Renault profite
des aides de l'État, mais pille notre pays et détruit la base de l'automobile
française. L'État doit prendre ses responsabilités et mettre un terme à la
politique destructrice, antisociale, anti-industrielle, antinationale menée par
M. Ghosn. Plus généralement, que comptez-vous faire pour mettre un terme à la
saignée industrielle de notre pays et chez Renault en particulier pour amener M.
Ghosn à la raison ? S'il n'a pas la fibre nationale, exercez au moins vos
responsabilités vis-à-vis de ce sinistre personnage ! M. le
président. La parole est à Mme la ministre chargée de l'apprentissage
et de la formation professionnelle. Mme Nadine Morano,
ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Monsieur le député, tout d'abord, je tiens à excuser M. Xavier Bertrand, qui m'a
demandé de vous transmettre sa réponse. La mobilisation du Gouvernement en
faveur de l'emploi des seniors est totale ; il l'a démontré en augmentant la
surcote, en libéralisant le cumul emploi-retraite, en réformant les limites
d'âge et la mise à la retraite d'office, en mettant fin aux préretraites
publiques et en obligeant les entreprises à conclure des accords en faveur de
l'emploi des seniors. S'agissant de Renault, il faut d'abord rappeler que
nous ne parlons pas, à ce stade, d'un accord mais d'un projet d'accord. Laissons
d'abord les partenaires sociaux négocier. Cela n'empêche pas le Gouvernement
d'indiquer très clairement sa position. Xavier Bertrand l'a rappelé le 30
novembre dernier à l'occasion de la question d'actualité qui lui a été posée sur
le sujet par Mme Marietta Karamanli, au nom du groupe SRC : " S'il s'agissait de
préretraites, Renault serait taxé. " Le Gouvernement est, vous l'aurez compris,
très réservé sur ce projet, au même titre que les organisations
syndicales. Si le projet d'accord était finalisé, le ministre du travail
demanderait à la direction générale du travail et à la délégation générale à
l'emploi et à la formation professionnelle d'étudier scrupuleusement son
contenu, afin de veiller au respect intégral de la loi. Xavier Bertrand
entretient un dialogue constant avec les représentants de Renault auxquels il a
demandé des précisions et fait part de sa position. M. le
président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard. M.
Jean-Pierre Brard. Des " précisions " ! Cela nous fait une belle jambe
! Quand M. Ghosn arrive chez Nissan, en 1999, pour " redresser " le groupe,
il supprime 21 000 emplois. Dix ans plus tard, il annonçait, pour mars 2010, la
suppression de 20 000 emplois supplémentaires. En mars 2010, Nicolas Sarkozy
dit ceci - je sais, madame Morano, que vous avez une admiration sans bornes pour
le Président de la République, et je suis donc sûr que vous allez fondre en
écoutant cette citation (Sourires) : " Je n'accepte pas que le grand
groupe privé automobile PSA ait les deux tiers de ses effectifs en France et que
l'autre constructeur automobile Renault ait seulement un tiers de ses effectifs
en France, alors que l'État en est propriétaire à 15 %. " Voilà des mouvements
de menton intéressants ! M. le président. Monsieur Brard, il
faudrait conclure. M. Jean-Pierre Brard. Je termine,
monsieur le président. Et vous, madame la ministre, que dites-vous ce matin à
M. Ghosn ? Qu'il suffit de ne pas utiliser le mot de " préretraite " et qu'alors
tout est en ordre. Voilà l'homo horribilis de cette année (M. Brard
brandit une photographie) : M. Ghosn, 8 millions de salaire, 14 700 emplois
supprimés ! Qu'allez-vous faire pour défendre l'intérêt national face à l'Attila
de l'automobile ? M. le président. Monsieur Brard, nous
avons déjà eu cette discussion il y a de cela quelques heures, alors que vous
étiez à la tribune. Vous connaissez parfaitement nos usages, vous savez donc que
ce type de pancarte est proscrit. M. Jean-Pierre Brard.
C'est une exégèse très libre de votre part ! M. le
président. C'est une exégèse constante, en cours bien avant que je ne
sois assis à ce fauteuil et bien avant la présente législature. M.
Jean-Pierre Brard. Ne vous en faites pas, on va changer tout cela !
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