DEBAT :
|
ENQUÊTE JUDICIAIRE CONTRE TROIS CHEFS D'ÉTAT AFRICAINS M. le président. La parole est à M. André
Vallini, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers
gauche. M. André Vallini. Madame la garde des sceaux, le 2
décembre dernier l'association Transparence-international France a déposé une
plainte contre MM. Sassou Nguesso, Bongo et Obiang, présidents respectifs du
Congo, du Gabon et de la Guinée équatoriale. Cette plainte, qui vise des faits
de détournement de fonds publics, de corruption ou encore de blanchiment,
concerne la façon dont ces trois chefs d'État ont acquis un patrimoine mobilier
et, surtout, immobilier très important dans notre pays. Mardi dernier, la
doyenne des juges du pôle financier de Paris a jugé cette plainte recevable et
autorisé l'ouverture d'une enquête. Or, deux jours plus tard, le parquet a fait
appel de cette décision, estimant qu'il n'y avait pas lieu à engager des
poursuites. Depuis que vous êtes en fonction, madame la garde des sceaux,
vous revendiquez le lien hiérarchique entre vous et les parquets, vous
présentant même, à plusieurs reprises, comme la " chef des procureurs ". Ma
question est donc simple : nul ne pouvant croire que le parquet a agi sans vos
instructions, quelles sont celles que vous lui avez données ? Êtes-vous
intervenue et, si oui, de quelle façon ? D'autres autorités de l'État sont-elles
également intervenues dans ce dossier ? (Vifs applaudissements sur les bancs
du groupe SRC.- Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe
GDR.) M. le président. La parole est à Mme Rachida Dati,
garde des sceaux, ministre de la justice. Mme Rachida Dati,
garde des sceaux, ministre de la justice. Je commence par quelques
éléments de chronologie, monsieur le député. En mars 2008, trois
associations ont déposé plainte auprès du parquet de Paris pour des faits de
recel et de détournement de biens publics visant des chefs d'État africains. Une
enquête préliminaire du parquet a eu lieu, à l'issue de laquelle la plainte a
été classée pour absence d'infractions pénales. (Exclamations sur les bancs
du groupe SRC.) Une autre association a déposé une nouvelle plainte en
juillet 2008, laquelle, sur la base des mêmes faits et des mêmes arguments, a
été classée à son tour par le parquet. En décembre 2008, l'association que
vous avez citée ainsi qu'un contribuable gabonais ont déposé plainte pour ces
faits auprès du doyen des juges d'instruction, avec constitution de partie
civile, contre trois chefs d'État africains. Vous avez raison de rappeler
que le garde des sceaux a autorité sur les parquets - on l'a trop longtemps
oublié ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC - Applaudissements sur
quelques bancs du groupe UMP) de sorte que la même justice est assurée sur
l'ensemble du territoire pour tous les Français. J'ajoute que, dans notre
système judiciaire, le parquet juge de l'opportunité des poursuites et de leur
éventuel classement, en fonction des faits qui lui sont soumis. En
l'occurrence une plainte a été déposée auprès du doyen des juges d'instruction,
qui a jugé, contrairement au parquet, que l'association et le contribuable
gabonais avaient qualité à agir : cette divergence repose donc sur un élément
purement juridique. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe
SRC.) Le juge d'instruction a maintenu la plainte ; le parquet a fait
appel en toute opportunité, sans que nous n'intervenions M. le
président. Merci, madame la garde des sceaux. Mme Rachida
Dati, garde des sceaux. ...à moins de vouloir changer
l'organisation judiciaire, on ne saurait lui contester ce droit. La chambre de
l'instruction, composée de trois magistrats indépendants, statuera...
|