Question N° :
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Question publiée au JO le :
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Réponse publiée au JO le :
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Analyse : |
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Texte de la REPONSE : |
Il convient de distinguer, d’une part, la notion d’intérêt à l’affaire au sens de l’article L.2131-11 du code général des collectivités territoriales (CGCT), d’autre part, la définition du délit de prise illégale d’intérêt au sens de l’article 432-12 du code pénal. En premier lieu, la notion d’intérêt à l’affaire au sens de l’article L.2131-11 du CGCT constitue l’un des critères d’examen de la légalité de la délibération du conseil municipal. Aux termes de l’article L.2131-11 du CGCT, « sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l’affaire qui en fait l’objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires ». Le Conseil d’Etat considère de manière générale que l’intérêt à l’affaire existe dès lors qu’il ne se confond pas avec « les intérêts de la généralité des habitants de la commune » (CE, 16 décembre 1994, req. n°145370). Cependant, la simple présence du conseiller municipal ne suffit pas à remettre en cause la légalité de la délibération du conseil municipal. Le juge administratif vérifie si la participation de l’élu a été de nature à lui permettre d’exercer une influence sur le résultat du vote. L’existence d’une influence de l’élu sur le résultat du vote fait l’objet d’une appréciation par le juge administratif au regard du cas d’espèce. A titre d’exemple, le Conseil d‘Etat a jugé que dans la mesure où le maire, associé de la société civile immobilière à laquelle la commune vendait des parcelles, présidait la séance du conseil municipal et était présent au vote qui a eu lieu à main levée, une telle participation était de nature à exercer une influence sur la délibération du conseil municipal (CE, 17 novembre 2010, req. n°338338). En revanche, la participation d’un adjoint au maire, propriétaire de parcelles dont le classement avait été modifié, à la délibération du conseil municipal n’était pas de nature à rendre la procédure irrégulière dès lors qu’il avait quitté la salle au moment du vote et n’avait pas pris une part active aux réunions préparatoires. Le Conseil d’Etat a jugé que l’élu était bien intéressé à l’affaire mais n’avait pas été en mesure d’exercer une influence décisive sur la délibération (CE, 30 décembre 2002, req. n°229099). Dans un arrêt du 4 novembre 2011, la cour administrative d’appel de Lyon a considéré que, dans le cas d’espèce, la circonstance qu’un conseiller municipal, attributaire des biens d’une section de commune, ait « assisté aux débats du conseil municipal sans prendre part au vote de la délibération » n’était pas « de nature à lui donner la qualité de personne intéressée à l’affaire au sens des dispositions de l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales » (CAA Lyon, 4 novembre 2011, req n°11LY01345). En second lieu, la notion de prise illégale d’intérêt est distincte de l’appréciation de la légalité de la délibération du conseil municipal. Aux termes de l’article 432-12 du code pénal, la prise illégale d’intérêt est définie comme le fait « pour une personne […] investie d’un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise […] dont elle a, au moment de l’acte, en tout ou partie, la charge d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement […] ». L’élément intentionnel du délit de prise illégale d’intérêt est caractérisé dès lors que l’auteur a accompli sciemment l’élément matériel du délit (Cour de cassation, chambre criminelle, 22 octobre 2008, req. n° 08-82068). L’intérêt pris par le prévenu n’est pas nécessairement en contradiction avec l’intérêt général (Cour de cassation, chambre criminelle, 19 mars 2008, req. n°07-84288). La prise illégale d’intérêt peut être caractérisée malgré l’absence d’enrichissement personnel des élus, notamment en cas de subventions accordées par des élus à des associations qu’ils président (Cour de cassation, chambre criminelle, 22 octobre 2008, req. n° 08-82068). Le juge pénal n’examine pas la légalité de la délibération mais l’existence des éléments matériel et moral de l’infraction. Ainsi, la chambre criminelle de la Cour de cassation a-t-elle jugé que « la participation, serait-elle exclusive de tout vote, d’un conseiller d’une collectivité territoriale à un organe délibérant de celle-ci, lorsque la délibération porte sur une affaire dans laquelle il a un intérêt, vaut surveillance ou administration à l’opération au sens de l’article 432-12 du code pénal » (Cour de cassation, chambre criminelle, 9 février 2011, req. n°10-82988). Cette jurisprudence est donc plus restrictive que celle précédemment évoquée de la cour administrative d’appel de Lyon du 4 novembre 2011. De même, le fait que le maire « se soit retiré sans prendre part au vote » du conseil municipal « s’avère sans incidence sur sa culpabilité » dès lors qu’il a pris une part active dans la procédure nécessaire pour l’adoption du plan local d’urbanisme tout en anticipant l’achat de terrains de la zone à urbaniser par la société dont il était l’associé principal (Cour de cassation, chambre criminelle, 23 février 2011, req. n°10-82880). Au regard des éléments précités, il apparaît que l’examen des critères matériel et moral du délit de prise illégale d’intérêt par le juge pénal repose sur des critères distincts de ceux du juge administratif dans le cadre de l’examen de la légalité de la délibération. Enfin, à la suite du rapport remis le 26 janvier 2011 par la commission de réflexion sur la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique au président de la République (dit « rapport Sauvé »), le conseil des ministres a adopté le 27 juillet 2011 le projet de loi relatif à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique. Ce projet de loi vise notamment à introduire une déclaration d’intérêts pour les personnes exerçant les responsabilités les plus importantes, la formalisation du mécanisme d’abstention lorsque leur impartialité pourrait être mise en doute (article 1er) et la création d’une autorité de déontologie de la vie publique.
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