FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 1323  de  Mme   Delaunay Michèle ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Gironde ) QOSD
Ministère interrogé :  Solidarités et cohésion sociale
Ministère attributaire :  Écologie, développement durable, transports et logement
Question publiée au JO le :  22/02/2011  page :  1588
Réponse publiée au JO le :  02/03/2011  page :  1290
Date de changement d'attribution :  01/03/2011
Rubrique :  logement
Tête d'analyse :  expulsions
Analyse :  calendrier. droit au logement opposable. compatibilité
Texte de la QUESTION : Mme Michèle Delaunay interroge Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur les dates de fin du dispositif de renforcement hivernal et de la trêve hivernale, leurs conséquences sociales et leur incompatibilité avec le droit au logement opposable.
Texte de la REPONSE :

DATES DE FIN DU DISPOSITIF DE RENFORCEMENT HIVERNAL
ET DE LA TRÊVE HIVERNALE

M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay, pour exposer sa question, n° 1323.
Mme Michèle Delaunay. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la cohésion sociale et de la solidarité.
Deux dates marqueront le mois qui s'ouvre pour les personnes qui vivent en grande précarité : le 15 mars, qui sonne la fin de la trêve hivernale et sera donc synonyme d'expulsion, et le 31 mars, date de la fin du dispositif de renforcement hivernal pour les personnes sans abri.
Il y a trois ans, votre majorité a entrepris une réforme ambitieuse, celle du droit au logement opposable. Malheureusement, les moyens attribués à ce dispositif ont fait la preuve de leur insuffisance.
Ainsi le 31 mars, dans un mois exactement, les 8 100 places d'hébergement ouvertes dans le cadre du dispositif de renforcement hivernal seront fermées. En conséquence, les personnes hébergées jusqu'à cette date seront mises dans la rue, en l'absence d'un dispositif de remplacement.
Cette situation contre laquelle de nombreuses associations ont déjà élevé la voix est en claire contradiction avec l'article 73 de la loi " MOLLE " qui dispose que " toute personne accueillie dans une structure d'hébergement d'urgence doit pouvoir y bénéficier d'un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu'elle le souhaite ".
En Gironde, 162 places d'urgence et chambres d'hôtel ont été ouvertes dans le cadre du niveau 1 du plan hiver et 44 places supplémentaires dans le cadre du niveau 2, soit au total 206 places dont 170 à Bordeaux. Ce seront donc au minimum 206 personnes qui seront rendues à la rue, sans aucune solution d'hébergement. Actuellement, les associations se battent auprès de la préfecture pour que le Centre de Tregey, qui compte 60 places, ne ferme pas.
L'année prochaine, l'Abbé Pierre aurait eu cent ans et ses combats restent d'actualité. Le Gouvernement découvre chaque année l'existence de l'hiver, sans moyens durables et surtout sans approche globale. Les associations et les bénévoles sont las de cette absence de vision à long terme : effectuant, jour après jour, un travail d'insertion souvent difficile qui ne peut être interrompu brutalement, passé le 31 mars, le risque est grand de les voir se désengager.
En décembre 2006, le candidat Nicolas Sarkozy avait déclaré : " Je veux, si je suis élu Président de la République, que d'ici à deux ans, plus personne ne soit obligé de dormir sur le trottoir et d'y mourir de froid ".
Pour avoir une chance de répondre un jour positivement à cette promesse, pouvez-vous vous engager à ce que le dispositif hivernal ne soit pas interrompu brutalement et donne à ceux qui n'ont que la rue des chances réelles d'insertion et de retour à une vie décente ?
M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports.
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports. Madame Delaunay, le dispositif de renforcement hivernal et de trêve hivernale répond aux besoins de protection des personnes les plus vulnérables en cette période de l'année. À ce titre, quelque 10 000 places d'hébergement sont actuellement mobilisées. Il s'agit là d'une mobilisation importante, supérieure de plus de 1 500 places à celle de l'an passé. Il est trop tôt pour dresser un bilan précis, mais il est possible d'estimer dès à présent que ce dispositif a répondu globalement aux besoins de l'hiver. Le Gouvernement salue ici l'engagement des milliers de professionnels de l'action sociale et des bénévoles qui permettent ce résultat.
Par définition, ce dispositif spécifique n'a pas vocation à perdurer au-delà de la période pour laquelle il est instauré. Je tiens toutefois à répondre précisément aux inquiétudes que vous venez d'évoquer.
Il convient de rappeler que le parc d'hébergement hivernal ne représente qu'une petite fraction d'un dispositif beaucoup plus large qui, lui, est pérenne. Ce dispositif s'est beaucoup accru ces dernières années. En cinq ans le dispositif d'hébergement pour les personnes sans domicile est passé de 51 500 à 72 000 places, soit une progression de 40 %.
Cet accroissement permet d'éviter dans une large mesure que des personnes admises dans le dispositif durant la période hivernale soient remises à la rue à la fin de l'hiver. Conformément au voeu des associations, la circulaire signée par mon collègue Benoist Apparu, le 15 octobre 2010, a donné aux préfets la mission de veiller à ce que la mobilisation hivernale soit l'occasion d'apporter des solutions durables aux personnes faisant appel au dispositif.
Une autre circulaire, du 19 mars 2010, a rappelé la nécessité de veiller à la prise en charge des personnes hébergées pendant la période hivernale par une évaluation sociale et une orientation adaptée à leurs besoins. Par ailleurs, je rappelle qu'une refondation des services d'hébergement et d'accompagnement des personnes sans abri est en cours.
Partant du constat partagé par tous que l'extension indéfinie du parc d'hébergement ne constitue pas une réponse pertinente aux besoins, l'accent est mis désormais sur la stratégie dite du " logement d'abord " à l'instar de l'orientation prise par de nombreux pays en Europe et en Amérique du Nord.
M. le président. La parole est à Mme Michèle Delaunay.
Mme Michèle Delaunay. Aujourd'hui, nous sommes à moins d'un mois de la fin de ce dispositif. Les centres d'hébergement sont pleins. Cela signifie donc que le dispositif régulier ne suffit pas.
Pensons aux personnes qui sont mises à la rue, mais aussi aux bénévoles, aux représentants des associations, qui s'engagent et qui mettent toute leur énergie - étant moi-même sur le terrain, je partage leur inquiétude - pour qu'une partie au moins des sans-abri retrouvent une vie décente et un logement.
M. le président. Merci, madame la députée.
Mme Michèle Delaunay. S'ils voient leurs efforts brusquement ruinés par la mise à la rue de ces personnes, je redoute qu'eux-mêmes ne se désengagent.

S.R.C. 13 REP_PUB Aquitaine O