Texte de la QUESTION :
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M. Philippe Vuilque attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État sur les procédures de recouvrement du trop-versé en indemnités de licenciement par les AGS (assurance garantie des salaires) aux ex-salariés suite à la mise en liquidation judiciaire de leur entreprise. Par exemple, l'entreprise Artis de Monthermé avait été liquidée en 2002. En première instance, le conseil des prud'hommes alloue aux salariés des indemnités assorties de dommages et intérêts pour « licenciement sans cause réelle et sérieuse ». Ce jugement fit l'objet d'un appel qui confirme la décision prud’homale mais fixe des indemnités en deçà de celles qu'avaient allouées les prud'hommes. Trois ans et demi après, les AGS se manifestent par voie d'huissier auprès d'une cinquantaine d'ex-salariés pour réclamer le trop-perçu. Ils doivent rembourser une partie des indemnités allouées par les prud'hommes mais aussi des intérêts et des frais d'huissier. Les salariés sont victimes d'une liquidation particulière puisque la situation économique n'est pas seule en cause : en effet, l'ancien PDG d'Artis fait l'objet de poursuites pénales. Il sera enfin jugé en mai 2011, neuf ans après la liquidation de l'entreprise. Par ailleurs, beaucoup d'ex-salariés n'ont pas retrouvé d'emploi, certains sont en fin de droit. Dans le contexte économique ardennais, il est préjudiciable pour les familles et pour les budgets d'aide sociale d'aggraver leurs difficultés financières si telle disposition était appliquée. Il souhaiterait connaître les marges de manoeuvre susceptibles d'être envisagées par le Gouvernement pour prendre en compte ces situations.
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Texte de la REPONSE :
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MODALITÉS DE RECOUVREMENT DU TROP-PERÇU AUPRÈS DES ANCIENS
SALARIÉS D'UNE ENTREPRISE EN LIQUIDATION JUDICIAIRE Mme la présidente. La parole est à M.
Philippe Vuilque, pour exposer sa question, n° 1441, relative aux modalités de
recouvrement du trop-perçu auprès des anciens salariés d'une entreprise en
liquidation judiciaire.. M. Philippe Vuilque. Monsieur le
garde des sceaux, je voudrais attirer votre attention sur les procédures de
recouvrement par l'association pour la gestion du régime de garantie des
créances des salariés - AGS - du trop versé en indemnités de licenciement aux
anciens salariés suite à la mise en liquidation judiciaire de leur
entreprise. Prenons l'exemple de l'entreprise Artis de Monthermé, dans les
Ardennes, liquidée en 2002. En première instance, le conseil des prud'hommes
alloue aux salariés des indemnités assorties de dommages et intérêts pour "
licenciement sans cause réelle et sérieuse ". Il est fait appel de ce jugement
et la cour d'appel, tout en confirmant la décision, fixe des indemnités
inférieures à celles allouées par les prud'hommes. Trois ans et demi après, les
AGS se manifestent par voie d'huissier auprès d'une cinquantaine d'anciens
salariés pour réclamer le trop-perçu. Ils doivent rembourser une partie des
indemnités allouées par les prud'hommes mais aussi les intérêts et les frais
d'huissier. Rappelons par ailleurs que ces salariés sont victimes d'une
liquidation particulière puisque la situation économique n'est pas seule en
cause. En effet, l'ancien P-DG d'Artis fait l'objet de poursuites pénales. Il
sera enfin jugé - je dis bien, " enfin " - à l'automne prochain, soit neuf ans
après la liquidation de l'entreprise. De surcroît, beaucoup d'anciens salariés
n'ont pas retrouvé d'emploi et certains sont aujourd'hui en fin de droits.
Dans le contexte économique des Ardennes, que vous savez très difficile, il
me semble intolérable d'aggraver la situation financière de ces familles en
appliquant une telle disposition. Je souhaiterais par conséquent que le
Gouvernement intervienne auprès des AGS pour que soit pris en compte l'ensemble
des ces situations. Mme la présidente. La parole est à M.
Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des
libertés. M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre
de la justice et des libertés. Je voudrais tout d'abord vous dire combien le
Gouvernement est sensible à la situation économique du département des Ardennes
qui a perdu plus de 3 000 emplois industriels et connu une forte réduction de
ses effectifs industriels ces dix dernières années. Encore tout récemment, le
Président de la République a pu évoquer cette question lors de son déplacement
dans votre département. Dans un tel contexte, comment ne pas comprendre, en
effet, le désarroi des salariés de l'entreprise Artis qui, après avoir obtenu
gain de cause devant le conseil des prud'hommes dans le cadre de la contestation
de leur licenciement, se voient réclamer une part des indemnités qui leur ont
été versées par l'association de garantie des salaires après que la cour d'appel
a réduit le montant de ces indemnités fixées en première instance. Si je
comprends ce désarroi, la décision rendue en appel, et dont nul ne conteste le
bien-fondé en droit, ne saurait toutefois rester inexécutée. Elle appelle
nécessairement la restitution des sommes trop versées. En l'occurrence, ces
sommes sont d'ailleurs destinées au financement d'un système contributif de
paiement des salaires en cas de procédure collective, fondé sur le principe de
la solidarité. Ces explications doivent conduire à insister sur le caractère
provisoire des condamnations en première instance même s'il est très
certainement difficile pour les salariés d'une entreprise de comprendre qu'ils
doivent restituer une partie des dommages et intérêts qui leur ont été accordés
en première instance. L'exécution provisoire de la décision de première
instance assure un bon équilibre entre les intérêts en présence. Elle permet en
effet au salarié de disposer immédiatement d'indemnités jugées nécessaires
plutôt que d'attendre l'expiration des voies de recours, mais le salarié qui en
bénéficie doit être invité à une grande prudence dans l'utilisation de ces
fonds. Pour ce qui est des intérêts, ils ne courent en réalité qu'à compter
de la notification de la décision de la cour d'appel, en vertu d'une
jurisprudence de la Cour de cassation : aucun intérêt de retard n'est dû pour la
période qui précède. Et les frais d'huissier de justice que vous évoquez ne
concernent en réalité que les voies d'exécution que l'AGS a dû entreprendre à
défaut de restitution spontanée. Nous sommes dans une situation délicate,
face à une décision de justice qui doit être exécutée. Le garde des sceaux ne
peut rien vous dire d'autre. Il appartient à présent à l'AGS de procéder
avec humanité et je suis certain, monsieur le député, que vous saurez comment
l'en convaincre. Je ne peux pour ma part que l'appeler à agir le plus
convenablement possible. Mme la présidente. La parole est à
M. Philippe Vuilque. M. Philippe Vuilque. Je vous remercie
pour votre réponse, monsieur le garde des sceaux, mais vous n'avez pas répondu à
ma question, mon souhait étant que le Gouvernement puisse également discuter
avec l'AGS pour éviter d'en arriver à ce genre de situation. Vous m'avez répondu
sur un point de droit que je ne conteste pas mais le problème est que la
jurisprudence de l'AGS va beaucoup plus loin : même en cas de condamnation en
prud'hommes, l'AGS attend la décision en appel et ne verse pas les sommes
auxquelles elle a été condamnée en première instance, ce qui est
inacceptable. M. Michel Mercier, garde des sceaux. En
effet. M. Philippe Vuilque. Bien sûr, j'ai d'ores et déjà
saisi l'AGS pour tenter d'améliorer la situation mais il aurait été souhaitable
que le Gouvernement contacte également l'AGS - même si ce sont les partenaires
sociaux qui gèrent l'AGS - pour l'appeler à prendre des mesures transitoires à
l'égard des salariés, en envisageant par exemple des remboursements échelonnés.
Tout un système pourrait être mis en place mais rien n'est fait. Je le
répète, il est scandaleux que l'AGS puisse agir ainsi et considérer qu'en raison
des difficultés de recouvrement qu'elle rencontre elle puisse s'autoriser à ne
pas payer aux prud'hommes et attendre la décision en appel. Une telle attitude
n'est pas normale face à un jugement des prud'hommes qui est exécutoire. Je
regrette que votre réponse se situe uniquement sur le plan juridique, lequel est
incontestable. Le Gouvernement pourrait de son côté appeler l'AGS à tenir compte
des situations locales pour que les salariés aient le moins à pâtir de telles
situations.
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