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13ème législature
Question N° : 1726 de M. Jean-Pierre Brard ( Gauche démocrate et républicaine - Seine-Saint-Denis ) Question orale sans débat
Ministère interrogé > Écologie, développement durable, transports et logement Ministère attributaire > Écologie, développement durable, transports et logement
Rubrique > logement Tête d'analyse > amélioration de l'habitat Analyse > perspectives. Seine-Saint-Denis
Question publiée au JO le : 21/02/2012 page : 1423
Réponse publiée au JO le : 29/02/2012 page : 1497

Texte de la question

M. Jean-Pierre Brard alerte Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement sur l'état du logement en France en général et en Seine-Saint-Denis en particulier.

Texte de la réponse

ÉTAT DU LOGEMENT EN FRANCE ET EN SEINE-SAINT-DENIS

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour exposer sa question, n° 1726, relative à l'état du logement en France et en Seine-Saint-Denis.
M. Jean-Pierre Brard. Je suis impressionné, monsieur le ministre chargé du logement ! Vous n'avez pas besoin de GPS pour conduire quelqu'un dans le Cantal ! Votre connaissance des routes est formidable !
Ma question sera plus simple - du point de vue de la diversité de la voirie -, puisqu'elle porte sur le logement.
La pénurie de logements sociaux touche durement mon département, la Seine-Saint-Denis, et ma bonne ville de Montreuil. Ainsi, 57 000 personnes sont en attente d'un logement social dans ce département. Comme vous le savez, cette situation provoque des drames terribles, même si nous comptons déjà 200 000 HLM. Par exemple, le mercredi 15 février dernier, une femme s'est immolée dans la mairie de Saint-Denis et elle en est morte. À Montreuil, la pénurie est grande. Il y a 6 000 demandeurs de logements sociaux en attente. Pour un logement libre, nous enregistrons sept à huit demandes.
J'en viens au coeur de ma question monsieur le ministre. À Montreuil, certains bailleurs sociaux profitent de cette situation pour se comporter de façon indigne avec les locataires. J'ai plusieurs exemples à l'esprit, comme le bailleur social LogiRep, dans le quartier de La Noue, qui n'hésite pas à alourdir les charges de ses locataires déjà endettés, puis à envoyer les huissiers frapper à leurs portes pour leur mettre la pression, aggravant l'inquiétude et l'angoisse.
Mais je voudrais vous faire part, plus particulièrement, du comportement d'Emmaüs Habitat. Cette société anonyme a acquis, en 2001, plusieurs résidences rue Gaston Monmousseau à Montreuil. Grâce à ma médiation, en mars 2000, un accord avait été trouvé entre les locataires et Emmaüs Habitat sur le prix des loyers. Emmaüs Habitat n'a pas respecté sa parole, en fixant des loyers supérieurs à ce qui avait été décidé. D'une certaine manière, monsieur le ministre, Emmaüs Habitat, c'est la sainte-nitouche du logement social ! On lui donnerait le bon Dieu sans confession, mais l'expérience montre que ce serait une erreur. Par exemple, M. et Mme Trebol, qui habitent au 15 rue Gaston Monmousseau, avaient un loyer de 554,47 euros, charges comprises, en mai 2002. Sept mois plus tard, en décembre 2002, Emmaüs Habitat a augmenté le loyer, sans concertation, de 16 % en le portant à 644 euros, charges comprises. Aujourd'hui, le loyer, charges comprises, s'élève à 793 euros. En dix ans, il a augmenté de 32 % et Emmaüs Habitat leur réclame, en plus, des régularisations de charges qui s'élèvent à plus de 150 euros. Ces augmentations répétées ont mis les locataires en grande difficulté financière. Ces derniers résistent et refusent de régler le surplus de loyer. Ils payent de l'ordre de 700 euros par mois pour se loger, alors qu'ils se trouvent à l'écart des moyens de transport. En dépit de cela, Emmaüs Habitat a décidé d'enclencher une procédure d'expulsion contre huit locataires. Son comportement face à la souffrance de ces locataires est insupportable. Depuis dix ans, ils vivent dans un climat pesant, qui impacte leur vie quotidienne. Des pressions et des harcèlements moraux m'ont été rapportés. Emmaüs Habitat a joué avec leurs nerfs en enclenchant plusieurs fois des procédures judiciaires, puis en les annulant quelques semaines après. Certains, sous contrainte psychologique, ont dû signer des reconnaissances de dettes. Ils vivent aujourd'hui dans la peur de perdre leur logement et de se retrouver à la rue. Il est désolant de constater qu'Emmaüs Habitat trahit l'âme de l'abbé Pierre en adoptant une politique commerciale de rentabilité. Le logement social n'a pas vocation à produire des excédents, ni à être rentable au sens affairiste du terme. L'abbé Pierre disait : " Sur ma tombe, à la place de fleurs et de couronnes, apportez-moi les listes de milliers de familles, de milliers de petits enfants auxquels vous aurez pu donner les clés d'un vrai logement. " Je suis sûr, monsieur le ministre, qu'il doit se retourner dans sa tombe à l'heure qu'il est et qu'Emmaüs Habitat ne pourrait pas répondre à l'exhortation du saint homme sans commettre un sacrilège !
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire face à ces bailleurs sociaux qui profitent de la situation dramatique du logement social dans certaines parties du pays pour tirer avantage de la misère et de la détresse de leurs locataires ?
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé du logement.
M. Benoist Apparu, ministre chargé du logement. Monsieur le député, vous avez raison, le département de la Seine-Saint-Denis, comme l'ensemble des départements franciliens, manque de logements et notamment de logements sociaux. Au cours de ce quinquennat, 30 000 logements, au total, auront été construits en Seine-Saint-Denis dont 23 000 logements sociaux, et 6 000 auront été réhabilités hors opérations ANRU, dont vous savez que la Seine-Saint-Denis est le principal bénéficiaire.
Comme vous l'avez indiqué, en Seine-Saint-Denis, comme ailleurs, des bailleurs sociaux remplissent parfaitement bien leur rôle et permettent aux plus modestes de se loger dans la plus grande dignité. Parallèlement, hélas, certains bailleurs se comportent mal et augmentent indûment les loyers. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé, l'année dernière, d'encadrer les loyers du logement social - et uniquement du logement social - en les basant sur l'indice de référence des loyers. Auparavant, vous le savez, les bailleurs sociaux pouvaient, sur simple décision du conseil d'administration, augmenter les loyers comme ils le souhaitaient. Depuis l'année dernière, c'est l'État qui fixe l'augmentation annuelle des loyers du logement social. Autrement dit, ce que vous venez d'évoquer ne pourra plus se produire demain. Cette année, par exemple, l'IRL se situant à 2 %, le loyer ne peut pas augmenter de plus de 2 %. Il n'en demeure pas moins que nous avons la possibilité de regarder ce qui a été fait et de diligenter des enquêtes via un certain nombre d'organismes, comme la mission interministérielle d'inspection du logement social, pour savoir si telle ou telle situation est abusive et si certains bailleurs sociaux se comportent, pour reprendre votre expression, comme les " pires des bailleurs privés ". Je m'engage, bien évidemment, devant vous à regarder ce qui s'est passé à Montreuil avec les deux bailleurs que vous avez cités, non pour vérifier l'information, mais pour pouvoir en tirer toutes les conséquences utiles et nécessaires.

 

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