Texte de la QUESTION :
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M. Alain Bocquet attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les conditions désastreuses dans lesquelles s'annonce la rentrée 2008 dans le secondaire et particulièrement sur la situation du lycée d'État Ernest Couteaux de Saint Amand les Eaux, lycée public d'enseignement général et technologique qui fut, historiquement, un des tout premiers en France à mettre en place une polyvalence d'enseignements qui est, encore plus aujourd'hui, un atout essentiel au service de la diversité des besoins de formation de l'Amandinois. Or cette situation amandinoise, qui reflète les graves difficultés des établissements du Valenciennois et de l'académie de Lille, est exceptionnellement alarmante et conduit les enseignants, les familles, les jeunes et les élus locaux à s'interroger sur l'avenir même de cet équipement. Il faudrait, par exemple, conforter les résultats du lycée professionnel et lui donner les moyens de devenir un véritable lycée des métiers, en permettant qu'il accueille un bac pro "structures métalliques" débouchant sur un BTS ROC (réalisation d'ouvrages chaudronnés), ce qui correspond à sa vocation de pôle "chaudronnerie/structures métalliques" et à notre bassin d'emploi (industries ferroviaire et automobile, chaîneries...), et un bac pro électrotechnique. Ces orientations sont d'autant plus indispensables qu'il existe un besoin énorme de personnel dans l'industrie de transformation métallurgique et autour du pôle de compétitivité ferroviaire. Et dans les 161 entreprises du secteur que recensent l'Amandinois et le Valenciennois, la moyenne d'âge des 4 225 salariés, auxquels s'ajoutent les 3 000 emplois des groupes ferroviaires Alstom et Bombardier, est de 45 ans. Pourtant, les décisions annoncées témoignent, au contraire, d'un total mépris pour le travail accompli. À la rentrée prochaine, le rectorat de Lille prévoit en effet au lycée Couteaux, l'équivalent de 14 postes supprimés, soit une réduction de 14,3 % du personnel actuellement en fonction, pour 68 élèves de moins ! Proportionnellement aux moyens qui sont les siens, ces suppressions de postes, la perte de huit divisions, toutes sections confondues, dont deux classes de seconde, feraient du lycée Couteaux l'établissement le plus touché de l'académie. Si les choses devaient en rester là, ce serait un gâchis considérable, gâchis humain et gâchis d'argent public (région, ville...), compte tenu des travaux financés ces dernières années, et des aménagements essentiels et urgents qui vont suivre (restructuration de l'internat, réaménagement des ateliers, réorganisation de l'entrée du lycée pour la sécurité des élèves). Tout cela doit permettre que ce lycée, qui, depuis 82 ans, contribue à la réussite des élèves de Saint Amand les Eaux et de ses environs, continue de faire face à ses missions de service public : la formation des jeunes jusqu'au niveau bac + 2, leur insertion dans la vie professionnelle avec de réelles possibilités d'embauche, leur ouverture à la société et au monde. Tenant compte de l'ensemble de ces éléments et de ces enjeux, il lui demande quelles suites le Gouvernement prévoit-il de donner non seulement à la demande d'annulation des suppressions de postes envisagées pour la rentrée 2008, mais aussi à la nécessité de renforcer les moyens et l'offre de formation de l'établissement amandinois.
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Texte de la REPONSE :
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EFFECTIFS DE PERSONNEL DU LYCÉE COUTEAUX DE
SAINT-AMAND-LES-EAUX DANS LE NORD M. le
président. La parole est à M. Alain Bocquet, pour exposer sa question,
n° 177, relative aux effectifs de personnel du lycée Couteaux de
Saint-Amand-les-Eaux dans le Nord. M. Alain Bocquet.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, le 4 septembre 2007, M. le
Président de la République a rappelé, dans sa Lettre aux éducateurs, sa
volonté de faire de l'éducation nationale l'une des priorités de son
quinquennat. Sept mois plus tard, force est de constater que les promesses ne
seront pas tenues ! Voilà ce que dénoncent syndicats, personnels et parents
d'élèves opposés aux 11 000 suppressions de postes décidées pour la rentrée 2008
- on parle de 80 000 suppressions d'ici à 2012, dont 700 dans l'académie de
Lille qui en a déjà connu 4 000 depuis quatre ans ! Syndicats et personnels
revendiquent au contraire l'augmentation des moyens, le retrait de la réforme
des bacs professionnels en trois ans, la revalorisation des salaires et
l'ouverture de négociations sur le métier et le statut. Le risque d'une "
rentrée catastrophe " est bien là : les enseignants et les parents d'élèves du
lycée d'État Ernest- Couteaux de Saint-Amand-les-Eaux ne peuvent que le
constater. Seul lycée public d'enseignement général et technologique de
l'Amandinois, cet établissement est menacé de perdre, à la rentrée, l'équivalent
de quatorze postes soit une réduction de 14,3 % du personnel pour soixante-huit
élèves de moins ! Ces chiffres révèlent que le recul démographique ne justifie
pas tout. Comme le disent fort justement enseignants et familles : " Cet
argument ne tient plus ! ". Si les choses en restent là, des options
d'enseignement disparaîtront et le lycée Ernest-Couteaux perdra huit divisions
toutes sections confondues, dont deux classes de seconde. Une telle situation
est intolérable. Tout d'abord, ces décisions menacent directement la polyvalence
des enseignements, qui est l'atout majeur du lycée Couteaux pour répondre aux
besoins de formation de l'Amandinois. Ce lycée fut d'ailleurs l'un des premiers
à mettre en place en France une telle polyvalence. Ensuite, quel mépris pour les
efforts accomplis ! Il faudrait, au contraire, conforter les résultats obtenus
et donner notamment la possibilité au lycée professionnel de devenir un
véritable lycée des métiers, en lui attribuant un bac pro électrotechnique, un
bac pro structures métalliques et un BTS ROC, réalisation d'ouvrages
chaudronnés. En effet, ces formations diplômantes, ajoutées au BTS
électrotechnique dont dispose déjà le lycée, correspondent aux besoins de notre
bassin d'emploi, qui se caractérise par la présence d'une industrie de
transformation métallurgique - 161 entreprises et 4 225 emplois, occupés par des
personnes âgées de 45 ans en moyenne - et d'une industrie ferroviaire, autour
d'Alstom, de Bombardier, qui compte 3 000 emplois, et du pôle de compétitivité
I-Trans. Je précise d'ailleurs que l'on vient des chantiers de Saint-Nazaire
pour recruter, dans le Valenciennois, des métallurgistes formés. Depuis 82
ans, le lycée Ernest-Couteaux, dont chacun redoute que l'existence ne soit
désormais menacée, remplit une triple mission, en formant des jeunes jusqu'au
niveau bac + 2, en favorisant leur insertion professionnelle, grâce à de vraies
possibilités d'embauche, et en les ouvrant sur la société et le monde. Des
investissements et des travaux importants ont été réalisés par la région et la
ville, et d'autres vont suivre. Quelles dispositions allez-vous prendre pour
pérenniser ces acquis ? Allez-vous annuler les suppressions de poste ?
Comptez-vous renforcer et diversifier l'offre de formation, en accordant la
création de deux bac pro et d'un BTS ROC ? M. le président.
La parole est à M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation
nationale. M. Xavier Darcos, ministre de l'éducation
nationale. Monsieur le député Bocquet, la préparation de la rentrée scolaire
2008 dans l'académie de Lille s'effectue dans un contexte de baisse importante
de la démographie scolaire, qui touche particulièrement les lycées généraux et
technologiques. Ainsi, pour la rentrée 2008, une diminution de 3 200 élèves est
prévue dans ces établissements par rapport aux effectifs constatés à la rentrée
2007. Et encore, les prévisions des établissements sont-elles souvent plutôt
optimistes, par crainte de devoir subir des ajustements ! Le lycée
Ernest-Couteaux de Saint-Amand-les-Eaux enregistre depuis plusieurs années une
diminution importante de ses effectifs. Pour mémoire, cet établissement
scolarisait 1 021 élèves à la rentrée 2000 et 781 à la rentrée 2007, soit une
diminution de 23 % en sept ans. Malgré une différence de 108 élèves entre les
prévisions et les élèves réellement scolarisés à la rentrée 2007, nous avons
décidé de maintenir le statu quo et les moyens d'enseignement n'ont pas
été réajustés. Mais il faut bien, pour la rentrée 2008, répercuter cette
baisse d'effectifs. Il en résultera en effet une diminution du nombre de
classes, ce qui nous permettra d'en ouvrir d'autres dans les établissements qui
enregistrent des augmentations d'effectifs. Ainsi, pour la rentrée scolaire
2008, la structure de l'établissement compterait, en seconde, 185 élèves pour 6
divisions, soit une moyenne de trente élèves ; en première, 171 élèves pour six
divisions, soit une moyenne de vingt-huit élèves et, en terminale, 250 élèves
pour huit divisions et demie, soit une moyenne de vingt-neuf élèves. Mais,
contrairement à ce vous venez de dire, monsieur Bocquet, la diminution du nombre
d'emplois reste proportionnellement moindre à celle des effectifs puisqu'elle
est de 14,3 %, contre une diminution de 19,8 % des effectifs appréciés à la même
date. Enfin, les filières offertes par l'établissement - les sections de BEP,
de baccalauréat technologique et de BTS du champ de l'électrotechnique et des
structures métalliques - sont reconnues et contribuent au maillage des
formations dans le bassin du Valenciennois et sur le territoire de l'académie.
C'est pourquoi nous ne toucherons pas à l'ensemble de ces formations et de ces
offres d'études. Bien au contraire, la poursuite d'études des jeunes engagés
dans les formations conduisant au BEP continuera à être offerte au sein des
classes de première technologique. La transformation de ces sections de BEP en
baccalauréat professionnel en trois ans - ce qui représente un progrès - pourra
être envisagée dans le cadre de la rentrée 2009, à la suite de la phase
d'expérimentation que nous engageons dès cette rentrée. Encore une fois,
monsieur Bocquet, le lycée Ernest-Couteaux, qui mérite tout notre respect, ne
devrait pas se trouver dans l'incapacité d'offrir à ses élèves, à la rentrée,
une offre scolaire en diminution par rapport à l'année précédente. M.
le président. La parole est à M. Alain Bocquet. M. Alain
Bocquet. J'ai écouté votre réponse avec attention, monsieur le
ministre, mais vos statistiques glacées n'offrent pas une vision exacte de la
réalité. Celle-ci est d'ailleurs bien différente pour ceux qui habitent le 16e
arrondissement de Paris et fréquentent le lycée Henri IV et pour ceux qui
subissent, dans le Valenciennois et l'Amandinois, la crise de la sidérurgie et
des mines. Je vous invite à vous en rendre compte par vous-même sur le terrain,
en venant à Saint-Amand-Les-Eaux, au lycée Couteaux. Vous serez bienvenu chez
les Ch'tis et vous verrez que la réalité ne correspond pas tout à fait aux notes
que vous a transmises l'administration. C'est une autre chanson que vous
entendrez sur le terrain. Les élèves, leurs parents, les enseignants et les
personnels attendent que l'on se place dans une perspective de développement du
lycée, lequel répond à des besoins énormes en matière de formation
professionnelle dans notre arrondissement, notamment dans le secteur de la
métallurgie. Les chefs d'entreprise vous le diront : ils ne trouvent personne
pour répondre à leurs besoins, dans le cadre de leur développement
économique. Nous ne pouvons donc pas partager votre vision étriquée,
sectaire, comptable de la réalité, car ce n'est pas ainsi que l'on contribuera
au développement de ce lycée. Nous avons sur ce point un désaccord de fond. Mais
je n'en resterai pas là : d'ores et déjà, le conseil municipal de Saint-Amand a
délibéré, et il sera bientôt suivi par ceux des communes voisines. Nous
engagerons une véritable campagne populaire, avec le soutien des parents
d'élèves et des familles, qui sont attachés à ce lycée, pour faire entendre
notre droit. Je regrette beaucoup, monsieur le ministre, que vous vous soyez
contenté de cette réponse. Je vous laisse cependant une chance : j'espère que
vous répondrez à mon invitation et qu'un débat s'engagera plus largement, à
partir des problèmes cruciaux de ce lycée, sur une autre conception de
l'éducation nationale.
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