DEBAT :
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UTILISATION DE LA VIDÉOSURVEILLANCE EN MATIÈRE D'INVESTIGATION
POLICIÈRE M. le président. La parole est à
M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers
gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) M.
Jean-Pierre Dufau. Ma question s'adresse à M. le ministre de
l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Je comprends
l'émotion de notre collègue Jean-Claude Mignon. En effet, le 1er décembre 2007,
deux policiers espagnols étaient abattus par ETA dans ma ville de
Capbreton. Hier, le Président de la République, au nom de la nation tout
entière, a rendu hommage au policier Jean-Serge Nérin, tué par des membres
présumés d'ETA en France. Nous sommes unanimes pour condamner la violence et
le terrorisme. Nous sommes unanimes pour exprimer à la famille du défunt notre
profonde émotion et notre soutien. Nous tenons à souligner notre totale
solidarité avec les forces de police frappées par cette fusillade. Cependant,
dans cette période électorale, le Gouvernement s'est précipité, pour des effets
d'annonce erronés... (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) ayant
même entraîné des excuses du Premier ministre. (" C'est lamentable ! " sur
les bancs du groupe UMP.) Confondre un groupe de pompiers catalans en
congé avec de dangereux terroristes basques est consternant. Présenter aux
médias ces pompiers comme les coupables de la fusillade, au prétexte qu'ils ont
été filmés dans un supermarché par des caméras de surveillance, c'est une faute
politique majeure. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ces
faits méritent analyse. Une politique fondée sur la médiatisation ne peut
remplacer une politique sérieuse et méthodique d'investigation en matière de
sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le recours à
une police scientifique et technique ne saurait justifier la réduction des
effectifs de police et de gendarmerie. (Exclamations sur les bancs du groupe
UMP.) Policiers et gendarmes font un métier difficile. Ils ont besoin de
considération, de moyens humains et financiers, de proximité avec nos
concitoyens. (" Cela n'a rien à voir ! " sur les bancs du groupe
UMP.) Monsieur le ministre, quand allez-vous changer de politique pour
faire de la sécurité publique, non pas une exploitation électorale, mais une
action au service de nos concitoyens ? Quand allez-vous faire le choix du
savoir-faire plutôt que du faire savoir ? (Applaudissements sur les bancs du
groupe SRC ainsi que sur certains bancs du groupe GDR.) M. le
président. La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales. M. Brice
Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des
collectivités territoriales. Monsieur le député, vous vous associez à
l'hommage qui a été rendu de manière unanime et vous avez parfaitement raison,
même si la fin de votre intervention nous ramenait à des contingences qui,
honnêtement, ne sont pas dignes étant donné la nature de ce drame.
(Exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur les bancs
du groupe UMP.) M. Henri Emmanuelli. Excusez-nous de
vous importuner ! M. Brice Hortefeux, ministre de
l'intérieur. Votre intervention appelle trois remarques. Premièrement, je ne
peux pas laisser dire que nous avons souhaité remplacer les enquêteurs par des
moyens technologiques. M. Patrick Roy. Mais si
! M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Vous
avez raison : la police judiciaire, ce n'est pas simplement l'addition
d'ordinateurs, d'analyses génétiques et d'images de vidéosurveillance ; c'est le
travail de milliers d'hommes et de femmes qui, quotidiennement, recherchent la
vérité et identifient les coupables. M. Christian Bataille.
Avouez que vous êtes allés un peu vite ! M. Brice Hortefeux,
ministre de l'intérieur. Deuxièmement, je vous le dis : non, nous
n'allons pas nous excuser d'utiliser des images vidéos. M. Jérôme
Lambert. C'est ça le problème ! M. Brice Hortefeux,
ministre de l'intérieur. Ces images sont très souvent utiles. (" Bravo
! " sur les bancs du groupe UMP. - " Elles sont mal exploitées ! " sur les bancs
du groupe SRC.) C'était le cas il y a quelques mois, lorsque, à La
Défense, un homme a poussé une personne sur la voie ferrée : les images ont
permis d'identifier immédiatement le responsable. M. Henri
Emmanuelli. Mais pas en étant diffusées dans les journaux
! M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur. Ce fut
encore le cas à Lille, il y a quelques semaines à peine, où un violeur a lui
aussi été identifié immédiatement. Troisièmement, en ce qui concerne le drame
que vous évoquez, je ne comprends pas ce que vous nous reprochez. Pour qu'une
enquête de police progresse, il faut étudier toutes les pistes. En l'espèce, il
y avait des témoignages concordants ; il y avait, effectivement, des images
vidéos ; il y avait des éléments donnés par la police espagnole, que nous avons
vérifiés. Les suspects ont été entendus. Ils étaient effectivement innocents, et
ont donc, très concrètement, été disculpés immédiatement. (Exclamations sur
les bancs du groupe SRC.) Mais je vous le dis, monsieur le député, si
nous n'avions pas utilisé et diffusé ces images, nous aurions peut-être pris le
risque de laisser échapper un commando. Et alors, vous-même vous seriez érigé en
défenseur de ce qui, à vous en croire, n'aurait jamais dû être !
(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Alors ne prenez pas le
risque de vous enferrer dans la contradiction. Par ailleurs, l'enquête
progresse. Un responsable a été identifié ; un portrait-robot sera très
prochainement diffusé et je vous affirme que tous les responsables seront
identifiés, interpellés, déférés et sanctionnés. Enfin, conseil pour conseil,
sur le savoir-faire et le faire savoir, faites donc un exercice de mémoire :
vous n'exerciez ni l'un ni l'autre ! (Applaudissements sur les bancs du
groupe UMP.)
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