Texte de la REPONSE :
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CONSÉQUENCES DE LA CONTAMINATION À LA DIOXINE POUR LES
ÉLEVEURS DE LOIRE-ATLANTIQUE M. le
président. La parole est à M. Michel Hunault, pour exposer sa question,
n° 24, relative aux conséquences de la contamination à la dioxine pour les
éleveurs de Loire-Atlantique. M. Michel Hunault. Monsieur le
ministre de l'agriculture et de la pêche, je tiens à vous remercier de vous être
déplacé pour répondre personnellement à cette question, qui dépasse le cas des
producteurs et des éleveurs de l'arrondissement de Châteaubriant, puisque
l'arrondissement de Redon a également été contaminé par de la dioxine en août
dernier. C'est un sujet que vous connaissez bien, puisque vous avez accepté
de présider, le 9 septembre dernier, à Rennes, à l'occasion de cette belle
manifestation agricole qu'est le SPACE, honoré cette année par la présence du
Président de la République, une réunion de travail. Plus de quatre cents
éleveurs sont touchés par la dioxine, avec des conséquences sur la production
laitière et, désormais, la production bovine. Je dois saluer l'esprit
exemplaire des agriculteurs. Pour des raisons de transparence et de sécurité
sanitaire, des mesures d'urgence ont été prises, en concertation avec le monde
agricole. Mais aujourd'hui, monsieur le ministre, le problème est aussi
financier, car nous n'avons toujours pas trouvé officiellement la cause de cette
pollution, ce qui empêche l'application du principe pollueur-payeur. Les
éleveurs et les agriculteurs sont à bout, victimes d'une pollution dont ils
n'ont pas les moyens de payer les conséquences. Quelles aides concrètes peut
donc leur apporter le Gouvernement ? Dans la mesure où ce genre de crise peut
survenir dans toutes les régions françaises, permettez-moi d'avancer une
proposition : la profession est prête à prendre sa part dans la création de
mécanismes de mutualisation du risque. Si la sécurité sanitaire exige la
transparence, cela ne doit pas se faire au seul profit des consommateurs. Ce
n'est pas aux éleveurs et aux producteurs de payer seuls la note. Ma question
est donc double : l'État peut-il faire jouer la solidarité nationale et de
quelle manière ? Est-il envisageable de créer pour l'avenir un fonds qui
permettrait de répondre dans la sérénité à ce genre de problème ? M.
le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la
pêche. M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de
la pêche. Je vous remercie, monsieur Hunault, d'évoquer cette question, qui
ne concerne pas votre seul département. Je n'ai pas oublié à ce sujet la gravité
du dialogue que nous avons eu avec les éleveurs et les représentants
professionnels au SPACE de Rennes. Une contamination aérienne par des
dioxines, intervenue à la fin du printemps 2006, a en effet entraîné la
contamination de certains fourrages et, par voie de conséquences, des bovins les
ayant consommés. La production laitière et bouchère de plusieurs cheptels des
départements de la Loire-Atlantique, du Morbihan et de l'Ille-et-Vilaine en a
été affectée. Les élevages laitiers dont le lait ne semblait pas conforme ont
été placés sous surveillance. Pour être précis et transparent, je précise que le
lait non conforme aux normes est collecté puis écrémé, cette crème étant
détruite et la fraction restante transformée en poudre de lait. Il y a donc un
premier manque à gagner, évalué à environ 900 000 euros. Concernant le bétail
à vocation bouchère, les analyses menées par les directions départementales des
services vétérinaires ont permis de mettre en évidence l'absence de
contamination des élevages allaitants, contrairement aux élevages engraissant
les taurillons. Ces élevages ont été mis sous surveillance eux aussi. Les
animaux destinés à l'engraissement ne pourront être commercialisés que si leurs
viandes sont conformes. Le préjudice subi par les éleveurs de taurillons est
encore difficile à estimer, dans la mesure où le nombre total d'élevages de
taurillons réellement touché n'est pas encore connu. J'ai envoyé sur place la
semaine dernière un de mes conseillers techniques de façon à mesurer de façon
plus précise les difficultés des éleveurs et à estimer les besoins
financiers. Je pense comme vous, monsieur Hunault, que la solidarité
nationale doit jouer, en attendant que le pollueur soit identifié. Elle doit
engager l'État, au nom duquel je m'exprime, mais aussi l'interprofession et,
éventuellement, dans une crise de cette nature, les collectivités
locales. L'État a d'ores et déjà décidé de prendre en charge, au titre de
cette solidarité, toutes les analyses de contrôle officiel destinées à savoir si
les produits sont conformes ou non, pour un coût total de 500 000 euros. Les
paiements sont en cours. Mes services étudient les modalités de soutien à la
perte économique liée au retrait d'une partie de la production laitière, à
travers un mécanisme de reversement partiel des taxes prélevées au titre du
dépassement de quotas laitiers. Je suis par ailleurs sensible à la manière
dont votre question dépasse cette crise ponctuelle et nous invite à en tirer des
leçons. Je pense en effet que l'idée d'un mécanisme de mutualisation des risques
écologiques et agricoles, des aléas sanitaires ou climatiques, en partenariat
avec les professionnels et les assureurs, est une bonne idée. Je suis
personnellement favorable à l'idée du fonds que vous avez évoqué et qui,
d'ailleurs, doit être placé au coeur des réflexions que nous avons engagées dans
le cadre des Assises de l'agriculture pour le bilan de santé de la PAC. Ces
réflexions se poursuivront au sujet de la nouvelle politique alimentaire, rurale
et agricole, à laquelle nous travaillerons pour l'après-2013. Un tel fonds
pourrait servir à payer des avances remboursables aux agriculteurs, lesquels
pourraient ensuite engager une action contre le pollueur. En cas de pollution
orpheline, c'est-à-dire sans pollueur identifié, ou si le pollueur n'est pas
solvable, la question doit être étudiée avec les professionnels. Cette
proposition, qui est une solution à long terme, va nécessiter un travail de
concertation avec l'ensemble des filières agricoles. D'ailleurs, dans le
discours qu'il a prononcé le jour même où nous étions ensemble à Rennes, le
Président de la République a demandé, avec Mme Lagarde, de faire des
propositions sur ce sujet. Nous les préparons dans le cadre des assises de
l'agriculture. C'est pour moi un point névralgique dans les réformes à
entreprendre. Il y a les réformes qu'il nous faut mettre en place ensemble, mais
aussi les leçons que nous devons tirer d'une telle crise. Celle-ci n'est
d'ailleurs pas la seule, puisque nous parlerons sans doute dans les prochains
jours d'une autre crise sanitaire très sérieuse : la fièvre catarrhale ovine,
qui touche une cinquantaine de départements français. Nous ne disposons pas
actuellement des outils pour faire face, de manière mutualisée et préventive, à
de telles crises - nous n'y faisons face que lorsque nous sommes dos au mur.
J'ai donc bien l'intention de travailler avec le Parlement et les professionnels
à la mise en oeuvre des outils nécessaires qui permettront de mieux répondre à
une crise comme celle qui touche les éleveurs de votre région. M. le
président. La parole est à M. Michel Hunault. M. Michel
Hunault. Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir réaffirmé votre
souci sur cette question et votre engagement de faire jouer la solidarité
nationale au profit des éleveurs et des producteurs. Vous avez débloqué les 500
000 euros pour le paiement des analyses et des prélèvements, demande forte, le 9
septembre dernier : vous l'aviez promis, vous l'avez fait, soyez-en
remercié. Je suis certain que, s'agissant du reste des préjudices, vous ne
manquerez pas de suivre très attentivement la question, concernant notamment la
création d'un fonds qui puisse servir à gérer d'autres crises à
venir. Sachez, monsieur le ministre, que la représentation nationale est à
vos côtés et est prête à prendre sa part dans la création de mécanismes
juridiques et financiers mieux adaptés qui permettront à l'avenir d'atténuer le
caractère dramatique de ces crises.
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