Texte de la QUESTION :
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M. Jacques Domergue alerte M. le ministre de la défense sur les grandes options stratégiques et les restructurations à réaliser sur le territoire national contenues actuellement dans le « Livre blanc » de notre défense. La chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide ont grandement modifié les sites potentiels de conflit. Le danger n'est plus à l'est et les sites de conflits potentiels sont aujourd'hui tournés vers la Méditerranée, le Proche-Orient et les territoires africains. Nos bases militaires sont encore trop souvent situées dans des régions qui ne seront plus concernées. Bien qu'il comprenne parfaitement les enjeux d'aménagement du territoire, une adaptation efficace de nos armées à la situation actuelle justifie des changements stratégiques. Montpellier, ville de garnison, abrite deux écoles que sont l'école supérieure militaire d'administration et de management (EMSAM) anciennement dénommée commissariat de l'armée de terre, qui abrite 300 personnels permanents, et l'école d'application de l'infanterie (EAI) où travaillent 600 permanents, et qui forme chaque année 4 600 fantassins. Parfaitement intégrés dans la vie de la cité, ces établissements et leurs effectifs contribuent à l'activité économique et sociale de Montpellier. Plusieurs options semblent actuellement à l'étude. Comme le préconise le Livre blanc, le regroupement de ces deux écoles sur le site unique de l'EAI et des quelques unités de la ville (recrutement et DMD) pourrait permettre d'arriver au seuil nécessaire de 1 000 personnels, avec le souci de rationaliser les moyens des armées par la vente du site de l'EMSAM. Si cette solution ne correspondait pas à celle qu'il retient et si les deux écoles étaient amenées à être délocalisées, sur des sites différents, à Draguignan pour l'EAI et Coëtquidan pour l'EMSAM, quelles solutions envisage-t-il pour les sites de Montpellier ? La logique voudrait que le site de l'EAI soit dévolu à l'arrivée d'un ou plusieurs régiments, qui pourrait utiliser le centre d'entraînement de l'infanterie au tir opérationnel du Larzac et le camp des Garrigues, situé à proximité, comme terrain d'entraînement. Aussi il le remercie de la réponse qu'il pourra lui apporter et il l'assure de toute sa disponiblité pour les solutions qu'il serait amené à étudier.
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Texte de la REPONSE :
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RESTRUCTURATION DES DEUX ÉCOLES MILITAIRES DE MONTPELLIER M. le président. La parole est à M. Jacques
Domergue, pour exposer sa question, n° 312, relative à la restructuration des
deux écoles militaires de Montpellier. M. Jacques Domergue.
Nous sommes tous d'accord pour que le pays se réforme et que des
restructurations aient lieu. Comme vous pouvez le constater, monsieur le
secrétaire d'État chargé de la défense et des anciens combattants, nous faisons
preuve d'un esprit positif. Même si le livre blanc n'a pas encore été publié -
le Président de la République ne devant s'exprimer à ce sujet que le 17 juin -
nous commençons à avoir quelques éléments d'informations concernant les
restructurations à venir. Celles-ci - c'est du moins ce qui nous a été dit -
visent à la cohérence et à un meilleur équilibre. Personne ne peut être contre !
Il est nécessaire de procéder à des regroupements, car, depuis que le service
militaire a été supprimé et que nous avons une armée de métier, l'évolution n'a
pas été assez rapide et nous avons aujourd'hui trop de secteurs et de pôles
militaires, qu'il faut réorganiser. Il convient aussi de prendre en compte la
localisation des conflits potentiels pour répartir au mieux les secteurs
militaires sur l'ensemble de notre territoire. Jusqu'à présent, l'essentiel de
nos forces était concentré sur la frontière orientale de la France, et ce, à
juste titre puisque, jusqu'en 1989, la menace à l'est était réelle. Cependant
les choses ont changé, avec la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre
froide. Les sites de conflits potentiels se situent désormais sur le pourtour
méditerranéen, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et en Afrique noire. À cet
égard, la ville de Montpellier est particulièrement exposée. Celle-ci abrite
aujourd'hui deux écoles. L'EAI - l'école d'application de l'infanterie - héberge
600 personnels permanents et forme chaque année 4 600 fantassins. Des
investissements lourds ont été consacrés à ce site et nous avons pu, lors d'une
visite, y voir des simulateurs, récemment installés. L'EMSAM - l'école militaire
supérieure d'administration et de management - compte 250 à 300 personnels
permanents, et peut, elle aussi, être restructurée. On parle de transférer ces
deux écoles sur d'autres sites, comme Coëtquidan, Draguignan ou Saumur et leur
sort semble scellé. Pourtant, elles pourraient être regroupées sur l'un des deux
sites existants, ce qui permettrait à l'armée de revendre un foncier de grande
valeur. Une autre solution, compréhensible sur le plan militaire, avait été
envisagée. Si le transfert des deux écoles était avéré, les équipements et les
bâtiments du site de Montpellier permettraient d'accueillir un ou plusieurs
régiments, auxquels ils offriraient une excellente qualité de vie et la
possibilité d'être installés à proximité de la frontière méditerranéenne. Or
on entend dire aujourd'hui que Montpellier peut perdre entre 900 et 1 000
militaires, qui vont être transférés, et ce, probablement, sans aucune
compensation. Je parle aujourd'hui en tant que parlementaire élu de Montpellier,
mais également au nom de mes collègues élus, eux aussi, de cette région, qui se
sont exprimés à ce sujet et soutiennent notre action. Nous avons sollicité Mme
la maire de Montpellier afin qu'elle soutienne ce projet, mais, contrairement au
maire de Nîmes, elle n'a pas daigné répondre à notre demande. Compte tenu du
prix du foncier et des possibilités de reconversion, la municipalité a en effet
tout intérêt à récupérer trente-cinq hectares sur le site de l'EAI et quinze
hectares sur celui de l'EMSAM ! Il est donc très difficile, pour nous,
parlementaires locaux, d'accepter ces restructurations, même si nous en
comprenons la cohérence. Je souhaite donc savoir quelle compensation vous
comptez proposer, car les discours sont parfois discordants : d'un côté, le
Président de la République dit que l'armée n'est pas faite pour organiser
l'aménagement du territoire ; de l'autre, les ministres concernés affirment en
tenir compte pour maintenir ou non un régiment ou une école, En fin de compte,
Montpellier n'étant pas considérée comme un secteur à aménager, nous ne serions
pas du tout desservis ! Je vous rappelle au passage que Montpellier fait
partie des villes françaises où le taux de chômage est l'un des plus élevés et
où le pouvoir d'achat est l'un des plus faibles. Certes, les conditions de vie y
sont très agréables, mais ce n'est pas une raison suffisante : la présence des
militaires et leur activité secondaire sont indispensables à la vie de notre
cité. M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Bockel,
secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. M.
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la défense et aux anciens
combattants. Ayant vécu moi-même, en tant que maire d'une ville dite "
prospère ", il y a une quinzaine d'années, les conséquences - et les
opportunités - d'un tel transfert, je comprends parfaitement, monsieur le
député, vos arguments. Je ne reprendrai pas ce que vous avez fort bien dit
vous-même sur ces deux écoles, sur les emplois civils et militaires qu'elles
génèrent ou sur les stagiaires qu'elles accueillent. Ces deux établissements
participent aujourd'hui au soutien des services et des armées dans le domaine de
la formation. C'est pourquoi la question de leur devenir s'inscrit naturellement
dans la réflexion qui a été engagée sur un éventuel regroupement des différentes
écoles de l'armée de terre afin de réduire leurs structures administratives et
de les rapprocher des grands centres d'entraînement. Pour autant, aucune
décision n'a été prise sur ce point comme sur l'ensemble des redéploiements des
unités militaires. La concertation engagée avec les associations nationales
d'élus locaux et les parlementaires concernés permettra de recueillir certains
éléments d'informations et de confronter les arguments pour mieux consolider les
dossiers en cours d'instruction. La réflexion tiendra compte de la situation
spécifique de chaque territoire. Bien entendu, les territoires ruraux
défavorisés ne sont pas les seuls à souffrir lorsque des restructurations sont
entreprises. Les territoires urbains ont également besoin d'un diagnostic
partagé avec l'État, le cas échéant avec l'aide de la mission pour la
réalisation des actifs immobiliers ou d'autres organismes. Une vision
consolidée, interministérielle est nécessaire pour leur permettre d'apporter les
meilleures réponses possibles à ces départs - s'ils viennent à être décidés, ce
qui n'est pas encore le cas en l'espèce - et de parvenir à faire d'un mal un
bien. Aucune ville n'est supposée trop favorisée pour bénéficier d'un
soutien de l'État ; tous les territoires méritent notre attention et un dialogue
avec leurs élus. Vous serez d'ailleurs reçu vous aussi par le ministre de la
défense. M. le président. La parole est à M. Jacques
Domergue. M. Jacques Domergue. Si la cohérence est
respectée, nous nous plierons aux restructurations, car nous pouvons comprendre
la nécessité de regrouper ces écoles dans un autre secteur. Néanmoins je
rappelle que nous disposons d'un site exceptionnel pour accueillir l'armée. Le
Gouvernement fait un choix cohérent s'il admet qu'il faut placer les forces en
face des lieux potentiels de conflit. En revanche s'il renonce à cette cohérence
au nom de l'aménagement du territoire, les élus se mettront en travers de son
projet.
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