Texte de la QUESTION :
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M. Claude Bodin attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le montant significatif de la dette hospitalière laissée par les visiteurs étrangers dans les hôpitaux français. Un récent rapport parlementaire estime à 17 millions d'euros par an les factures impayées transmises à la trésorerie générale pour l'étranger, pour recouvrement, par les hôpitaux français au titre de frais médicaux de visiteurs étrangers. La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) évalue, quant à elle, à 23,7 millions d'euros le cumul des soldes d'impayés imputables aux patients étrangers dans les budgets des hôpitaux publics. Mais ce chiffre ne représente que la partie émergée de l'iceberg : il ne concerne que les patients pour lesquels aucune couverture maladie n'a pu être trouvée ou pour lesquels les assurances privées ont refusé le paiement, ou encore des patients sans solvabilité se présentant aux urgences. À ce chiffre s'ajoutent les impayés de patients se présentant avec une prise en charge de certains organismes (caisse de sécurité sociale du pays d'origine, ambassades, consulats,...), lesquels ne s'acquittent pas toujours de la facture en souffrance. S'agissant du recouvrement, rien ne permet de savoir si les hôpitaux procèdent systématiquement à des procédures de relance à l'étranger. Environ un quart des factures ne peut pas être envoyé aux consulats à l'étranger, faute d'éléments suffisants pour identifier et localiser le débiteur. Le taux de recouvrement est infime, de l'ordre de 5 % en moyenne. Un audit en cours sur les procédures de recouvrement des hôpitaux montrerait qu'en 2008 les créances sur l'étranger représentent 2,3 % du reste à payer des CHU audités. Cette dette hospitalière ne provient pas que des ressortissants de pays soumis à l'obligation de visas, mais également de touristes occidentaux. Ainsi, hormis le Maroc et le Mali qui accumulent d'importantes dettes hospitalières, les pays à l'origine de forts montants d'impayés sont le Royaume-uni, les États-unis et l'Allemagne. Il faut également noter que cette dette n'est pas comptabilisée pour des pays comme l'Algérie, faute d'accord avec les autorités algériennes et de l'inconvertibilité du dinar. Sans restreindre l'accès aux soins des patients étrangers, il lui demande donc quelles mesures elle entend prendre pour mettre un terme à ces abus, sachant qu'au final ces sommes irrécouvrables participent au déficit de la sécurité sociale puisqu'elles sont incluses à terme dans les prix de journée hospitalière.
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Texte de la REPONSE :
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DETTE HOSPITALIÈRE DES VISITEURS ÉTRANGERS M. le président. La parole est à M. Claude
Bodin, pour exposer sa question, n° 341, relative à la dette hospitalière des
visiteurs étrangers. M. Claude Bodin. Alors que le nouveau
plan " Hôpital 2012 " va bientôt être mis en oeuvre et que chacun s'accorde pour
reconnaître que le secteur hospitalier a besoin de réformes structurelles de
grande ampleur, je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de la santé
sur le montant significatif de la dette hospitalière laissée par les visiteurs
étrangers dans les hôpitaux français. Un récent rapport parlementaire estime
à 17 millions d'euros par an le montant des factures impayées transmises à la
trésorerie générale pour l'étranger au titre de frais médicaux de visiteurs
étrangers dans les hôpitaux français. La direction de l'hospitalisation et de
l'organisation des soins évalue, quant à elle, à 23,7 millions d'euros le cumul
des soldes d'impayés imputables aux patients étrangers dans les budgets des
hôpitaux publics. Mais ce chiffre ne représente que la partie émergée de
l'iceberg : il ne concerne que les patients pour lesquels aucune couverture
maladie n'a pu être trouvée ou pour lesquels les assurances privées ont refusé
le paiement, ou encore des patients sans solvabilité qui s'étaient présentés aux
urgences. À ce chiffre, s'ajoutent les impayés de patients se présentant avec
une prise en charge de certains organismes - caisses de sécurité sociale du pays
d'origine, ambassades, consulats -, lesquels ne règlent pas toujours la facture
en souffrance. S'agissant du recouvrement, rien ne permet de savoir si les
hôpitaux procèdent systématiquement à des relances à l'étranger. Environ un
quart des factures ne peuvent être envoyées aux consulats à l'étranger, faute
d'éléments suffisants pour identifier et localiser le débiteur. Le taux de
recouvrement est infime, de l'ordre de 5 % en moyenne. Un audit en cours sur les
procédures de recouvrement des hôpitaux montrerait qu'en 2008, les créances sur
l'étranger représentent 2,3 % du reste à payer des CHU audités. Cette dette
hospitalière ne provient pas que des ressortissants de pays soumis à
l'obligation de visa, mais également de touristes occidentaux. Ainsi, hormis le
Maroc et le Mali qui accumulent d'importantes dettes hospitalières, les pays à
l'origine de forts montants d'impayés sont le Royaume-Uni, les États-Unis et
l'Allemagne. Il faut également noter que cette dette n'est pas comptabilisée
pour certains pays, comme l'Algérie, faute d'accord avec ses autorités et du
fait de l'inconvertibilité du dinar. À ce problème de recouvrement s'ajoute
celui mis récemment en exergue par le rapport annuel de la Cour des comptes sur
les lois de financement de la sécurité sociale, concernant la fiabilité des
comptes des hôpitaux. Dans un contexte de tensions budgétaires persistantes -
les dépenses hospitalières représentent environ la moitié des dépenses
d'assurance maladie, soit 65,6 milliards d'euros -, il n'est pas rare que
l'obligation de présenter des comptes à l'équilibre ait conduit les hôpitaux à
reléguer au second plan la sincérité et l'image fidèle des comptes. Ainsi
certaines dettes ne sont-elles pas constatées : on procède à l'apurement des
créances reconnues irrécouvrables, qui ne sont ni provisionnées ni passées en
perte. Ces créances auraient atteint 205 millions d'euros à la fin de l'année
2005. Sans restreindre l'accès aux soins des patients étrangers, quelles
mesures entend prendre le Gouvernement pour mettre un terme à ces abus, sachant
que ces sommes irrécouvrables contribuent à aggraver le déficit de la sécurité
sociale puisqu'elles sont répercutées à terme dans les prix de journée
hospitalière ? M. le président. La parole est à M. Bernard
Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie
associative. M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé
des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Afin d'éclairer la
question des dettes des visiteurs étrangers, il convient d'effectuer une
distinction entre les créances hospitalières que l'on peut qualifier de
publiques, puisqu'elles incombent à des organismes de sécurité sociale
étrangers, et les créances hospitalières individuelles, qui résultent de
l'initiative personnelle de patients étrangers. Dans le premier cas, ces
créances, dont le débiteur est identifié, ont pour origine des conventions
internationales en matière de sécurité sociale : leur remboursement fait l'objet
d'une particulière vigilance de la part de la France, compte tenu des sommes en
jeu. Le montant des créances hospitalières individuelles de visiteurs et
patients étrangers s'élève à 23, 7 millions d'euros. Et afin de mieux prendre la
mesure des ordres de grandeur, il convient de le rapprocher de quelques éléments
chiffrés issus des comptes hospitaliers. Il correspond à la dette cumulée au 31
décembre 2007 et non à celle du seul exercice 2007. Les restes à recouvrer au
titre des créances des visiteurs et patients étrangers représentent 2,3 % de
l'ensemble des restes à recouvrer comptabilisés dans les centres hospitaliers
universitaires. L'immense majorité des créances concerne en effet des patients
nationaux. Les recettes issues de la participation restant à la charge des
patients sont de l'ordre de 2,7 milliards d'euros, montant incluant les sommes
versées par les patients étrangers, qui sont nombreux à programmer leur
hospitalisation et à payer d'avance leurs frais de séjour. Malgré la relative
faiblesse de ces dettes, il est indéniable que la prise en charge médicale de
cette catégorie de patients peut se solder par des impayés. Les raisons en sont
multiples : difficulté à recueillir des informations administratives de qualité
lors des passages dans les services d'urgence, limites des attestations
d'assurance prévues dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers, limites
du droit d'asile, limites juridiques des pouvoirs des comptables du Trésor à
procéder à des recouvrements à l'étranger. Il convient donc de toujours
rapporter le coût d'une démarche de recouvrement à ses chances de succès. Par
ailleurs, les soins dispensés aux patients étrangers apportent des recettes non
négligeables aux établissements de santé. En 2006, plus de 225 millions d'euros
leur ont ainsi été versés dans le seul cadre des conventions
internationales. Enfin, les hôpitaux sont soumis à l'obligation de soins
prévue par le code de la santé publique, ainsi qu'à l'accueil de tous les
malades, de jour comme de nuit, et éventuellement en urgence. En raison des
limites des procédures de recouvrement à l'étranger, les hôpitaux n'ont pas
d'autre solution que d'améliorer leur processus de facturation et de prise en
charge administrative. En effet, les tarifs servant de base aux remboursements
de l'assurance maladie n'intègrent plus les impayés, qui restent à la charge des
établissements de santé et pèsent sur leur situation financière. C'est dans
ce contexte que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction
publique et Roselyne Bachelot-Narquin ont demandé à la mission d'audit,
d'évaluation et de contrôle de réaliser un audit sur les processus de
facturation et de recouvrement des produits hospitaliers. Cette mission a rendu
en mars 2008 son rapport, qui formule de nombreuses recommandations, visant à
une amélioration globale des procédures. Ces propositions sont en cours d'examen
par les services, et leur mise en oeuvre s'inscrira dans le processus
d'amélioration de la gestion hospitalière lié à la réforme de la tarification à
l'activité et à la recherche d'une plus grande efficacité des hôpitaux. D'autres
initiatives ont également été prises - missions d'accompagnement, formation,
guides de procédures, etc. - en vue d'améliorer l'efficacité des services
chargés de l'instruction des dossiers et des patients, notamment étrangers.
Toutes ces actions porteront progressivement leurs fruits, et le taux de
recouvrement des produits hospitaliers devrait ainsi être
amélioré. M. le président. La parole est à M. Claude
Bodin. M. Claude Bodin. Je vous remercie de cette réponse,
monsieur le secrétaire d'État. J'espère que les procédures qui seront mises en
place à la suite de cet audit seront efficaces et qu'elles permettront de
réduire au maximum les irrécouvrables.
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