FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 341  de  M.   Bodin Claude ( Union pour un Mouvement Populaire - Val-d'Oise ) QOSD
Ministère interrogé :  Santé, jeunesse, sports et vie associative
Ministère attributaire :  Santé, jeunesse, sports et vie associative
Question publiée au JO le :  10/06/2008  page :  4774
Réponse publiée au JO le :  11/06/2008  page :  3169
Rubrique :  établissements de santé
Tête d'analyse :  hôpitaux
Analyse :  recouvrement des créances. ressortissants étrangers
Texte de la QUESTION : M. Claude Bodin attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative sur le montant significatif de la dette hospitalière laissée par les visiteurs étrangers dans les hôpitaux français. Un récent rapport parlementaire estime à 17 millions d'euros par an les factures impayées transmises à la trésorerie générale pour l'étranger, pour recouvrement, par les hôpitaux français au titre de frais médicaux de visiteurs étrangers. La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) évalue, quant à elle, à 23,7 millions d'euros le cumul des soldes d'impayés imputables aux patients étrangers dans les budgets des hôpitaux publics. Mais ce chiffre ne représente que la partie émergée de l'iceberg : il ne concerne que les patients pour lesquels aucune couverture maladie n'a pu être trouvée ou pour lesquels les assurances privées ont refusé le paiement, ou encore des patients sans solvabilité se présentant aux urgences. À ce chiffre s'ajoutent les impayés de patients se présentant avec une prise en charge de certains organismes (caisse de sécurité sociale du pays d'origine, ambassades, consulats,...), lesquels ne s'acquittent pas toujours de la facture en souffrance. S'agissant du recouvrement, rien ne permet de savoir si les hôpitaux procèdent systématiquement à des procédures de relance à l'étranger. Environ un quart des factures ne peut pas être envoyé aux consulats à l'étranger, faute d'éléments suffisants pour identifier et localiser le débiteur. Le taux de recouvrement est infime, de l'ordre de 5 % en moyenne. Un audit en cours sur les procédures de recouvrement des hôpitaux montrerait qu'en 2008 les créances sur l'étranger représentent 2,3 % du reste à payer des CHU audités. Cette dette hospitalière ne provient pas que des ressortissants de pays soumis à l'obligation de visas, mais également de touristes occidentaux. Ainsi, hormis le Maroc et le Mali qui accumulent d'importantes dettes hospitalières, les pays à l'origine de forts montants d'impayés sont le Royaume-uni, les États-unis et l'Allemagne. Il faut également noter que cette dette n'est pas comptabilisée pour des pays comme l'Algérie, faute d'accord avec les autorités algériennes et de l'inconvertibilité du dinar. Sans restreindre l'accès aux soins des patients étrangers, il lui demande donc quelles mesures elle entend prendre pour mettre un terme à ces abus, sachant qu'au final ces sommes irrécouvrables participent au déficit de la sécurité sociale puisqu'elles sont incluses à terme dans les prix de journée hospitalière.
Texte de la REPONSE :

DETTE HOSPITALIÈRE DES VISITEURS ÉTRANGERS

M. le président. La parole est à M. Claude Bodin, pour exposer sa question, n° 341, relative à la dette hospitalière des visiteurs étrangers.
M. Claude Bodin. Alors que le nouveau plan " Hôpital 2012 " va bientôt être mis en oeuvre et que chacun s'accorde pour reconnaître que le secteur hospitalier a besoin de réformes structurelles de grande ampleur, je souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de la santé sur le montant significatif de la dette hospitalière laissée par les visiteurs étrangers dans les hôpitaux français.
Un récent rapport parlementaire estime à 17 millions d'euros par an le montant des factures impayées transmises à la trésorerie générale pour l'étranger au titre de frais médicaux de visiteurs étrangers dans les hôpitaux français. La direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins évalue, quant à elle, à 23,7 millions d'euros le cumul des soldes d'impayés imputables aux patients étrangers dans les budgets des hôpitaux publics.
Mais ce chiffre ne représente que la partie émergée de l'iceberg : il ne concerne que les patients pour lesquels aucune couverture maladie n'a pu être trouvée ou pour lesquels les assurances privées ont refusé le paiement, ou encore des patients sans solvabilité qui s'étaient présentés aux urgences. À ce chiffre, s'ajoutent les impayés de patients se présentant avec une prise en charge de certains organismes - caisses de sécurité sociale du pays d'origine, ambassades, consulats -, lesquels ne règlent pas toujours la facture en souffrance.
S'agissant du recouvrement, rien ne permet de savoir si les hôpitaux procèdent systématiquement à des relances à l'étranger. Environ un quart des factures ne peuvent être envoyées aux consulats à l'étranger, faute d'éléments suffisants pour identifier et localiser le débiteur. Le taux de recouvrement est infime, de l'ordre de 5 % en moyenne. Un audit en cours sur les procédures de recouvrement des hôpitaux montrerait qu'en 2008, les créances sur l'étranger représentent 2,3 % du reste à payer des CHU audités.
Cette dette hospitalière ne provient pas que des ressortissants de pays soumis à l'obligation de visa, mais également de touristes occidentaux. Ainsi, hormis le Maroc et le Mali qui accumulent d'importantes dettes hospitalières, les pays à l'origine de forts montants d'impayés sont le Royaume-Uni, les États-Unis et l'Allemagne. Il faut également noter que cette dette n'est pas comptabilisée pour certains pays, comme l'Algérie, faute d'accord avec ses autorités et du fait de l'inconvertibilité du dinar.
À ce problème de recouvrement s'ajoute celui mis récemment en exergue par le rapport annuel de la Cour des comptes sur les lois de financement de la sécurité sociale, concernant la fiabilité des comptes des hôpitaux. Dans un contexte de tensions budgétaires persistantes - les dépenses hospitalières représentent environ la moitié des dépenses d'assurance maladie, soit 65,6 milliards d'euros -, il n'est pas rare que l'obligation de présenter des comptes à l'équilibre ait conduit les hôpitaux à reléguer au second plan la sincérité et l'image fidèle des comptes. Ainsi certaines dettes ne sont-elles pas constatées : on procède à l'apurement des créances reconnues irrécouvrables, qui ne sont ni provisionnées ni passées en perte. Ces créances auraient atteint 205 millions d'euros à la fin de l'année 2005.
Sans restreindre l'accès aux soins des patients étrangers, quelles mesures entend prendre le Gouvernement pour mettre un terme à ces abus, sachant que ces sommes irrécouvrables contribuent à aggraver le déficit de la sécurité sociale puisqu'elles sont répercutées à terme dans les prix de journée hospitalière ?
M. le président. La parole est à M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Afin d'éclairer la question des dettes des visiteurs étrangers, il convient d'effectuer une distinction entre les créances hospitalières que l'on peut qualifier de publiques, puisqu'elles incombent à des organismes de sécurité sociale étrangers, et les créances hospitalières individuelles, qui résultent de l'initiative personnelle de patients étrangers.
Dans le premier cas, ces créances, dont le débiteur est identifié, ont pour origine des conventions internationales en matière de sécurité sociale : leur remboursement fait l'objet d'une particulière vigilance de la part de la France, compte tenu des sommes en jeu.
Le montant des créances hospitalières individuelles de visiteurs et patients étrangers s'élève à 23, 7 millions d'euros. Et afin de mieux prendre la mesure des ordres de grandeur, il convient de le rapprocher de quelques éléments chiffrés issus des comptes hospitaliers. Il correspond à la dette cumulée au 31 décembre 2007 et non à celle du seul exercice 2007. Les restes à recouvrer au titre des créances des visiteurs et patients étrangers représentent 2,3 % de l'ensemble des restes à recouvrer comptabilisés dans les centres hospitaliers universitaires. L'immense majorité des créances concerne en effet des patients nationaux. Les recettes issues de la participation restant à la charge des patients sont de l'ordre de 2,7 milliards d'euros, montant incluant les sommes versées par les patients étrangers, qui sont nombreux à programmer leur hospitalisation et à payer d'avance leurs frais de séjour.
Malgré la relative faiblesse de ces dettes, il est indéniable que la prise en charge médicale de cette catégorie de patients peut se solder par des impayés. Les raisons en sont multiples : difficulté à recueillir des informations administratives de qualité lors des passages dans les services d'urgence, limites des attestations d'assurance prévues dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers, limites du droit d'asile, limites juridiques des pouvoirs des comptables du Trésor à procéder à des recouvrements à l'étranger. Il convient donc de toujours rapporter le coût d'une démarche de recouvrement à ses chances de succès.
Par ailleurs, les soins dispensés aux patients étrangers apportent des recettes non négligeables aux établissements de santé. En 2006, plus de 225 millions d'euros leur ont ainsi été versés dans le seul cadre des conventions internationales.
Enfin, les hôpitaux sont soumis à l'obligation de soins prévue par le code de la santé publique, ainsi qu'à l'accueil de tous les malades, de jour comme de nuit, et éventuellement en urgence.
En raison des limites des procédures de recouvrement à l'étranger, les hôpitaux n'ont pas d'autre solution que d'améliorer leur processus de facturation et de prise en charge administrative. En effet, les tarifs servant de base aux remboursements de l'assurance maladie n'intègrent plus les impayés, qui restent à la charge des établissements de santé et pèsent sur leur situation financière.
C'est dans ce contexte que le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et Roselyne Bachelot-Narquin ont demandé à la mission d'audit, d'évaluation et de contrôle de réaliser un audit sur les processus de facturation et de recouvrement des produits hospitaliers. Cette mission a rendu en mars 2008 son rapport, qui formule de nombreuses recommandations, visant à une amélioration globale des procédures. Ces propositions sont en cours d'examen par les services, et leur mise en oeuvre s'inscrira dans le processus d'amélioration de la gestion hospitalière lié à la réforme de la tarification à l'activité et à la recherche d'une plus grande efficacité des hôpitaux. D'autres initiatives ont également été prises - missions d'accompagnement, formation, guides de procédures, etc. - en vue d'améliorer l'efficacité des services chargés de l'instruction des dossiers et des patients, notamment étrangers. Toutes ces actions porteront progressivement leurs fruits, et le taux de recouvrement des produits hospitaliers devrait ainsi être amélioré.
M. le président. La parole est à M. Claude Bodin.
M. Claude Bodin. Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d'État. J'espère que les procédures qui seront mises en place à la suite de cet audit seront efficaces et qu'elles permettront de réduire au maximum les irrécouvrables.

UMP 13 REP_PUB Ile-de-France O