FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 3581  de  M.   Ayrault Jean-Marc ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Loire-Atlantique ) QG
Ministère interrogé :  Premier ministre
Ministère attributaire :  Premier ministre
Question publiée au JO le :  26/10/2011  page : 
Réponse publiée au JO le :  26/10/2011  page :  6617
Rubrique :  finances publiques
Tête d'analyse :  déficits publics
Analyse :  réduction. perspectives
DEBAT :

SITUATION ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et .divers gauche
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, vous avez reçu, hier, les présidents des groupes parlementaires entre deux sommets européens qui se tiennent à trois jours d'intervalle. Preuve s'il en fallait une de la gravité de la crise que nous traversons. Nous ne nions pas votre volonté de maîtriser la crise de la dette (" Tout de même ! " sur plusieurs bancs du groupe UMP) et de préserver l'euro de la tourmente.
M. Jean-Marc Roubaud. Bravo !
M. Jean-Marc Ayrault. Mais nous sommes inquiets des moyens que vous entendez mettre en oeuvre pour y parvenir. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Au lieu de lancer de véritables initiatives de croissance aux plans national et européen, vous dessinez une spirale infernale qui entraîne les peuples européens de plan d'austérité en plan d'austérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cette logique crée un cercle vicieux : l'austérité casse la croissance.
M. Dominique Dord. DSK.
M. Jean-Marc Ayrault. Ce qui conduit à une baisse de recettes fiscales avec pour conséquence l'aggravation des déficits. Vous improvisez alors de nouvelles coupes dans le budget sur une base purement comptable. Par exemple, vous réduisez de 12 % les crédits du budget de l'emploi alors même que le chômage n'a jamais été aussi massif.
M. Lucien Degauchy. On attend vos solutions !
M. Jean-Marc Ayrault. Cela conduit à une croissance si faible que votre loi de finances qui sera soumise au vote tout à l'heure est désormais caduque. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Christian Jacob. C'est le programme socialiste qui est caduc !
M. Jean-Marc Ayrault. Nous croyons, au contraire, nécessaire d'accompagner les mesures de sauvegarde financière d'une politique de croissance et de création d'emplois (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) en orientant l'épargne vers les secteurs à haut potentiel. Nous pensons indispensable de faciliter l'accès au crédit des PME et des collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous voulons remettre les banques au service de l'économie plutôt que de laisser leurs dirigeants s'octroyer 44 % de hausse de revenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Austérité, inégalité, inefficacité résument votre politique.
M. le président. Merci.
M. Jean-Marc Ayrault. Transparence, justice et croissance, voilà ce que nous voulons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et quelques bancs du groupe GDR. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le président Ayrault, le cercle vicieux qui a conduit à la crise que nous connaissons et qui est à l'origine de la chute de la croissance dans le monde, c'est exactement le contraire de celui que vous venez d'évoquer. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Patrick Lemasle. Pas du tout !
M. François Fillon, Premier ministre. C'est l'endettement excessif des États (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui a créé une situation où le monde entier s'interroge pour savoir si l'Union européenne est capable d'apporter une solution à la crise des dettes souveraines. Il n'y a aucune autre raison objective à la baisse de la croissance mondiale. Il n'y a pas problème de demande. Il n'y a pas de contraction des liquidités financières dans le monde
M. Henri Emmanuelli. Si.
M. François Fillon, Premier ministre. Il y a simplement une inquiétude, une crise de confiance sur la capacité de l'Union européenne à résoudre ces problèmes.
Il est donc inutile d'opposer une politique de soutien à la croissance et la solution des problèmes que rencontrent l'Union européenne et la zone euro. C'est la raison pour laquelle, pour le Gouvernement, pour le Président de la République, la priorité absolue est de réussir le rendez-vous de mercredi.
Nous avons, dimanche dernier, obtenu plusieurs accords.
M. Henri Emmanuelli. Non.
M. François Fillon, Premier ministre. Le premier sur un nouveau décaissement d'une tranche d'aide à la Grèce, ce qui permet au passage de montrer qu'après beaucoup d'hésitations, l'ensemble des pays européens a désormais intégré l'idée qu'il n'est pas possible de laisser tomber la Grèce, que nous devons faire preuve de solidarité avec ce pays pour sauver la zone euro ainsi que soixante ans de construction européenne.
M. Jean-Paul Lecoq. Il a fallu six mois !
M. François Fillon, Premier ministre. Nous avons ensuite obtenu un accord sur la recapitalisation des banques, laquelle se fera de manière ordonnée sur l'ensemble des banques européennes qui en ont besoin. S'agissant de la France, cette recapitalisation devrait être de l'ordre d'une dizaine de milliards d'euros, c'est-à-dire inférieure au résultat de ces mêmes banques françaises, ce qui signifie que les banques françaises doivent pouvoir se recapitaliser sans avoir besoin de demander l'aide des finances publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Restent trois points de discussion qui seront à l'ordre du jour de la réunion de mercredi. Le premier, et le plus important, est la question de savoir si nous sommes capables de mettre en place un Fonds européen de solidarité financière suffisamment puissant pour stopper toute tentative de spéculation sur d'autres, contre d'autres pays de la zone euro.
M. Roland Muzeau. Qui sont les spéculateurs ?
M. François Fillon, Premier ministre. Chacun sait que la France, comme vient de le dire François Baroin, appuyée par un grand nombre de pays a proposé de transformer le FESF en une banque adossée à la BCE. C'est une proposition française.
M. Patrick Lemasle. C'est l'Allemagne qui décide
M. François Fillon, Premier ministre. Je veux d'ailleurs faire remarquer que, depuis le début de cette crise, toutes les propositions originales ont émanées de la France (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et toutes les initiatives, qui ont été prises, l'ont été par la France. (Mêmes mouvements.)
M. Patrick Lemasle. Mais non, par l'Allemagne !
M. François Fillon, Premier ministre. Je mets les membres de cette assemblée au défi de me citer un seul exemple d'une proposition originale pour faire face à cette crise qui ne soit pas venue du Gouvernement français, du Président de la République et de notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Maintenant, il est vrai qu'il est compliqué de se mettre d'accord à vingt-sept, à dix-sept. Il faut obtenir des compromis avec nos voisins allemands ; rien d'anormal à cela. Obtenir un compromis avec nos voisins allemands, c'est une condition essentielle du succès. Mais je ne comprends pas cet acharnement d'un certain nombre de commentateurs et de responsables politiques à vouloir en permanence abaisser notre pays (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) en négligeant les initiatives qu'il prend et le rôle qui est le sien dans la lutte contre cette crise.
C'est la France qui, depuis plusieurs années, réclame la mise en place d'un gouvernement économique. L'Allemagne y était opposée, elle a finalement décidé de se ranger à cette solution.
C'est la France qui a proposé que l'on donne un effet de levier au Fonds européen de solidarité financière. C'est encore la France qui a pris l'initiative de hâter plusieurs rendez-vous européens pour faire en sorte que nous soyons capables de résoudre cette crise.
Enfin, un dernier sujet sera au coeur des discussions de mercredi, le niveau de restructuration de la dette grecque. Plus personne, et c'est un progrès qu'il faut mettre à notre actif, n'envisage plus désormais de laisser tomber la Grèce. Nous sommes donc tous d'accord pour dire qu'il faut une restructuration qui ne se traduise pas par ce que l'on appelle pudiquement un événement de crédit. C'est la raison pour laquelle se déroule depuis dimanche soir une négociation...
M. Henri Emmanuelli. Depuis le mois de juin !
M. François Fillon, Premier ministre. ...entre les créanciers privés de la Grèce, un certain nombre d'institutions et le Gouvernement français pour fixer le niveau de cette restructuration. J'entends sur les bancs de la gauche tous ceux qui m'expliquent qu'on aurait pu faire plus vite...
Mme Marylise Lebranchu. Oui !
M. François Fillon, Premier ministre. ...c'est très intéressant, la seule chose qu'ils oublient, c'est qu'il faut mettre dix-sept partenaires autour de la table.
M. Henri Emmanuelli. Non, pas dix-sept, deux !
M. François Fillon, Premier ministre. ...et qu'il ne suffit pas d'une pétition de principe pour y parvenir.
Mesdames et messieurs les députés, si nous parvenons mercredi à un accord, alors le Président de la République pourra enclencher une séquence très importante pour la croissance mondiale avec la réunion du G20. Du fait de la situation internationale, cette réunion sera axée autour de deux grandes priorités ; une coordination des politiques économiques des grandes puissances d'une part, pour faire en sorte que celles qui ont accumulé beaucoup de réserves dépensent un peu plus sur leur marché intérieur, et d'autre part, que celles qui ont accumulé beaucoup de dettes, se désendettent.
M. Jacques Myard. Très bien.
M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur Ayrault, la solution à la crise économique et financière que nous rencontrons ne peut en aucun cas être un surcroît de dépenses publiques (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Cela impose au parti socialiste de réviser complètement son programme. (Mmes et MM les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent longuement.)

S.R.C. 13 REP_PUB Pays-de-Loire O