FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 3774  de  M.   Paul Christian ( Socialiste, radical, citoyen et divers gauche - Nièvre ) QG
Ministère interrogé :  Défense et anciens combattants
Ministère attributaire :  Défense et anciens combattants
Question publiée au JO le :  21/12/2011  page : 
Réponse publiée au JO le :  21/12/2011  page :  8965
Rubrique :  défense
Tête d'analyse :  armement
Analyse :  armes technologiques. vente. contrôle
DEBAT :

EXPORTATION DE MATÉRIELS
DE SURVEILLANCE DE L'INTERNET

M. le président. La parole est à M. Christian Paul, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
M. Christian Paul. Monsieur le Premier ministre, il est désormais confirmé qu'au cours des dernières années, des entreprises françaises ont vendu à des dictatures des matériels de surveillance de l'Internet permettant d'intercepter le courrier électronique, de pister la consultation des sites et de connaître l'usage fait par chacun des réseaux sociaux.
Ces armes électroniques sont à la fois des outils de guerre et des outils de police. Dans ces dictatures, avec l'aide de la France et le soutien de l'État, elles sont devenues des armes de basse police destinées à surveiller la population et à espionner l'opposition, les journalistes et les avocats.
Il s'agit de l'un des plus scandaleux manquements aux valeurs démocratiques au cours des années récentes. Pour la Libye du colonel Kadhafi, ces faits sont prouvés. Une liste des opposants surveillés grâce à ce matériel français est publique. Le rôle de M. Takieddine est cité dans la négociation de ces contrats, et l'on sait quelles relations il a entretenues au sommet de l'État et de l'UMP. (" Très bien ! " sur plusieurs bancs du groupe SRC. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) En Syrie, où le pouvoir torture et assassine, tout pousse à croire que ces technologies sont encore actives aujourd'hui.
Monsieur le Premier ministre, vous devez rendre des comptes (Murmures sur les bancs du groupe UMP)...
Mme Chantal Bourragué. Assez !
M. Christian Paul. ...à la représentation nationale, mais aussi à l'opinion mondiale et aux militants des révolutions arabes. Dix questions parlementaires sont restées sans réponse de la part du Gouvernement, et une commission d'enquête est demandée en vain à l'Assemblée nationale. Pourquoi ce silence assourdissant ? Ces faits et cette omerta abîment l'honneur de la France qui aurait dû, au contraire, soutenir les cyberdissidents. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Que savez-vous réellement de l'usage actuel ou passé de ces technologies de surveillance de l'Internet, en particulier en Syrie ? Quelles autorisations administratives ont été accordées ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Dino Cinieri. Et les écoutes de Mitterrand ?
M. Christian Paul. À quel niveau le feu vert politique a-t-il été donné ?
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mitterrand !
M. Christian Paul. Êtes-vous prêts à décider, dès aujourd'hui, d'un moratoire sur ces exportations et, pour l'avenir, à encadrer strictement leurs ventes et leur usage, à des États étrangers, mais aussi...
M. le président. Monsieur Paul, votre temps de parole est écoulé.
La parole est à M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants.
M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants. Monsieur le député, en qualité de ministre de la défense, je me sens l'obligation de m'efforcer de répondre à votre question...
M. Christian Paul. Votre responsabilité est en cause !
M. Gérard Longuet, ministre. ...puisque vous semblez viser des matériels de défense.
La France est un pays parfaitement exemplaire pour ce qui concerne l'exportation de ces matériels.
M. Bernard Roman. C'est faux !
M. Gérard Longuet, ministre. De majorité en majorité, nous avons construit un dispositif qui permet de n'autoriser les exportations, qu'elles soient le fait de grandes entreprises ou de PME, que dans le cadre d'un contrôle extrêmement strict.
Depuis 1939, l'affaire n'est pas nouvelle, de CIEMG en CIEMG - je parle des commissions interministérielles des exportations des matériels de guerre -, nous autorisons ces exportations et nous contrôlons l'usage final du matériel.
Vous posez une question fondamentale car elle suppose l'existence d'un détournement d'emploi de tel ou tel matériel. En ce qui concerne les télécommunications, force est de reconnaître qu'à ce jour, aucune commission interministérielle des exportations des matériels de guerre n'a été sollicitée en la matière. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
S'il y a eu détournement de l'emploi de ces matériels, notre devoir est d'adapter l'administration des exportations des matériels de guerre. Mais pouvons nous imaginer à tout instant quels détournements peuvent avoir lieu ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous nous reprocherez bientôt de ne pas contrôler les exportations alimentaires ou celles de biens de d'équipements - pour les vêtements des troupes, par exemple. Ce n'est simplement pas possible.
M. Bernard Roman. Mais pour qui nous prenez-vous ?
M. Gérard Longuet, ministre. Dans le cas particulier, je tiens à la transparence absolue : jamais la commission interministérielle n'a été sollicitée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Bernard Roman. Monsieur Guéant était au courant ! Il a signé !
M. Christian Paul. Interrogez-le !

S.R.C. 13 REP_PUB Bourgogne O