Texte de la REPONSE :
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SITUATION DE L'EMPLOI DANS LE DOUAISIS M. le président. La parole est à M.
Jean-Jacques Candelier, pour exposer sa question, n° 399, relative à la
situation de l'emploi dans le Douaisis. M. Jean-Jacques
Candelier. Madame la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur,
dans le Nord, l'arrondissement de Douai est particulièrement touché par la crise
industrielle. Là-bas, l'industrie reste un secteur déterminant, avec 432
établissements et des dizaines de milliers de salariés. Dans les années 70,
l'installation dans le Douaisis de Renault et de l'Imprimerie nationale était
motivée par la disparition des mines. Aujourd'hui, près de 20 000 emplois
dépendent encore de l'usine Renault-Douai, la plus importante du groupe au plan
mondial. Or, le niveau d'activité y est extrêmement préoccupant. Au total, le
site aura fermé 88 jours en 2008. Bien entendu, cette fermeture forcée a des
répercussions sur tout le secteur. Récemment, nous avons appris que la descente
aux enfers allait continuer. Les opérateurs sur chaînes vont en effet se
souhaiter de bonnes fêtes de fin d'année le soir du 11 décembre. Les premiers à
reprendre le travail ne le feront que le 12 janvier. De même, un plan de
suppression de 1 500 postes a été annoncé par la direction du site, sous forme
de départs volontaires. Je vous le dis clairement, nous ne voulons pas d'un
Vilvorde 2. Dans les autres industries, les menaces sont également très
précises et constituent une épée de Damoclès sur la tête des salariés. Chez
Inoplast, à Flers-en-Escrebieux, gros sous-traitant automobile, le chômage
partiel est également d'actualité. Celui-ci est indemnisé à 50 % du taux
horaire. On note également une chute vertigineuse du recours aux intérimaires.
Les salariés qui n'ont pas la chance, comme à Renault, de prendre des congés
forcés, y vont de leur poche. Chez Oxford Automobile, à Douai, qui fait
partie du groupe Wagon, la direction a demandé de recourir au chômage partiel
pour les quatre prochains mois, pour un total de quarante-cinq jours chômés -
530 salariés de ce sous-traitant automobile sont concernés. De la même
manière, alors qu'il y a deux ans l'entreprise comptait 700 CDI et 250
intérimaires, on y recense aujourd'hui à peine 600 CDI et plus aucun
intérimaire. Les salariés vont subir trois semaines de chômage partiel en
décembre, puis deux chaque mois de janvier, février et mars. Pour empêcher
ces difficultés, le chômage technique n'est pas une solution de long terme.
D'ailleurs, il n'est qu'une partie de l'iceberg. Les restructurations ne sont
pas seulement conjoncturelles. Elles sont bien la conséquence d'une gestion
d'entreprise entièrement aux mains des actionnaires. Par exemple, la situation
de Renault est-elle due au manque de dynamisme du marché ou bien à la
distribution de 1,2 milliard d'euros aux actionnaires ? Je penche pour la
deuxième explication. Même quand le marché se portait bien, cela n'a pas
empêché les suppressions de postes massives, le site de Douai étant passé, en
quelques décennies, de 10 000 à seulement 5 500 emplois à ce jour, alors que les
profits sont toujours restés colossaux. Quel gâchis ! Voilà, selon moi, le fond
du problème, et celui-ci n'est pas propre à cette entreprise. La crise remonte à
loin ; elle ne date pas de cette année. Toutefois, cela rend le volontarisme
de l'État encore plus nécessaire. Maintenir les emplois et le pouvoir d'achat
des salariés, relancer les filières de production par une véritable politique
industrielle devraient être les seules préoccupations du Gouvernement. Or, je
constate que son action est procyclique. Ainsi, à l'Imprimerie nationale de
Flers-en-Escrebieux, 100 % publique, à cause d'une mauvaise gestion et bien que
l'activité fiduciaire soit équilibrée et que les perspectives de développement
soient au vert, il y a de nouvelles menaces de licenciements. Voilà le triste
paysage industriel, madame la secrétaire d'État ! S'agissant de l'Imprimerie
nationale, j'avais demandé au Gouvernement, le 24 octobre, une table ronde avec
tous les acteurs. J'attends toujours une réponse. Même si la situation de
chaque entreprise est différente, puisque Nicolas Sarkozy a déclaré que l'État
serait intraitable face aux restructurations sans rapport avec la crise,
comptez-vous proposer un moratoire sur tout licenciement économique ? Par
ailleurs, si le chômage technique est parfois un moindre mal, l'État compte-t-il
garantir à 100 % les revenus des salariés, à travers une augmentation de
l'allocation spécifique ? Enfin, dans l'optique du prochain plan massif de
soutien à l'industrie et aux secteurs les plus touchés, qu'il vous appartient de
détailler, ne pensez-vous pas, pour réellement développer l'emploi et améliorer
les conditions de travail, qu'il est plus que temps d'instaurer un contrôle de
la circulation de l'argent et de son utilisation par les salariés et les élus du
personnel ? M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie
Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Mme
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur.
Monsieur le député, malheureusement, tout ce que vous dites sur la crise de
l'industrie automobile, nous le constatons avec la lucidité et le besoin
d'action qui dès lors s'imposent. La situation dans le bassin d'emploi du
Douaisis est d'autant plus préoccupante que ce bassin minier s'est reconverti
autour du secteur de l'automobile, grâce à l'implantation, en 1970, de l'usine
Renault de Cuincy et d'un certain nombre de sous-traitants ou d'équipementiers
que vous avez cités. Pour autant, le Douaisis bénéficie d'importants atouts
et de nombreux projets de développement sur lesquels il faut s'appuyer. Ce
bassin d'emplois comprend trente et une zones d'activités et plusieurs autres
sont en projet ou en cours d'aménagement. La réalisation de nouvelles
infrastructures, comme le Canal Seine-Nord ou encore le développement et la
spécialisation de la gare de triage de Somain sur les matières dangereuses,
débouchera sur de nouvelles perspectives de développement durable. L'École
des mines de Douai constitue le principal atout du territoire en matière de
recherche scientifique et technique. Elle accompagne plus particulièrement des
projets du domaine des éco-entreprises et de la maîtrise de l'énergie. C'est
ainsi que Douaisis Technopole Environnement, agence de développement spécialisée
vers les éco-entreprises, vise à faire du Douaisis un territoire clairement
identifié et reconnu d'accueil et de développement des activités liées à
l'environnement et au développement durable. Par ailleurs, le Douaisis a
obtenu son classement en ZFU. Dans le cadre des restructurations, plusieurs
conventions de revitalisation pouvant entraîner la création de plusieurs
centaines d'emplois sont en cours d'exécution. Les pouvoirs publics dans la
région Nord-Pas-de-Calais sont particulièrement mobilisés pour accompagner les
mutations économiques de la filière automobile. Le préfet a rencontré les
constructeurs en octobre 2008 et la DRIRE a réuni, le 7 novembre 2008, le comité
de pilotage comprenant l'État, le conseil régional, et les représentants de
l'industrie automobile, pour étudier l'adaptation des actions actuelles à la
conjoncture ainsi que la nécessité de mettre en place de nouvelles
actions. Pour 2009-2011, le programme Asparance s'inscrit dans le cadre de la
mise en place du pôle d'excellence automobile régional. Il a pour ambition de
structurer la filière automobile en partageant la même vision de l'automobile et
de permettre aux équipementiers de consolider leur compétitivité. Au niveau
national, dans le cadre de sa politique de soutien de l'activité et de sa
politique industrielle - je reprends à dessein l'expression que vous avez
employée, monsieur le député -, le Gouvernement, sous l'impulsion du Président
de la République, a décidé de créer un fonds stratégique d'investissement,
filiale de la Caisse des dépôts et consignations. Ce fonds, destiné à soutenir
les entreprises françaises et leurs investissements, sera chargé du soutien de
l'activité pendant la crise et des investissements sur le long terme, via
notamment des prises de participations dans les entreprises
stratégiques. Nous réfléchissons à des mesures de relance, et le Président de
la République a précisément choisi Douai pour les annoncer jeudi prochain, 4
décembre. Il n'est un secret pour personne que le secteur automobile en sera un
bénéficiaire important, et ce afin d'y assurer les emplois aujourd'hui et les
investissements demain. Quant aux salariés malheureusement touchés par les
difficultés actuelles, le Président de la République a annoncé l'extension du
dispositif des CTP, les contrats de transition professionnelle, dispositif
expérimenté depuis 2006, qui concernera vingt-cinq bassins d'emploi
particulièrement touchés par la crise économique, contre sept actuellement. Il
s'agit d'assurer à des salariés licenciés économiques un revenu de remplacement
équivalant à 80 % du salaire brut pendant douze mois, et de leur faire
bénéficier de mesures renforcées d'accompagnement et d'incitation au retour à
l'emploi. Je ne puis préjuger, à ce stade, de la décision sur les nouveaux
bassins qui bénéficieront du dispositif ; il est néanmoins clair que la
situation du bassin du Douaisis justifie une attention particulière dans
l'examen pour arrêter cette liste. M. le président. La
parole est à M. Jean Jacques Candelier. M. Jean-Jacques
Candelier. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d'État. Bien
que faisant partie des nombreux invités de M. Sarkozy jeudi prochain à Douai, je
n'ai pas eu l'honneur d'être sollicité pour l'élaboration de son discours. J'en
ignore donc le contenu, mais je serais étonné qu'il réponde à mes légitimes
préoccupations. Quoi qu'il en soit, je vous saurais gré de lui soumettre les
pistes que je vous ai présentées : en cette période de fin d'année, il est
peut-être permis de rêver ! J'attends toujours une réponse ferme sur
l'organisation d'une table ronde au sujet de l'Imprimerie nationale. Quant au
plan de soutien massif, dont on parle beaucoup, j'attends d'en savoir plus, mais
je répète que celui-ci ne servira à rien s'il s'agit encore de donner des
millions sans contrôle de l'État ou des salariés. Compte tenu de ce trou béant
qu'est le marché financier, cela reviendrait à vouloir remplir une passoire. Il
est donc absolument nécessaire d'instituer un droit d'intervention des salariés,
entreprise par entreprise, dans le suivi et la mise en oeuvre du plan.
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