DEBAT :
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RÉGULARISATION DES TRAVAILLEURS SANS PAPIERS M. le président. La parole est à Mme Michèle
Delaunay, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers
gauche. Mme Michèle Delaunay. Je remercie Mme Bourragué de
me soutenir dans la défense de l'école de santé navale de Bordeaux !
(Sourires.) Ma question s'adresse à M. le ministre de l'immigration,
de l'intégration, de l'identité nationale et du développement
solidaire. Monsieur le ministre, la grève des travailleurs sans papiers
d'Île-de-France a fait prendre conscience à votre Gouvernement de l'absurdité de
cette politique du chiffre, avec laquelle vous croyez rallier l'opinion des
Français. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) Les Français comprennent, en réalité, qu'il s'agit là d'une
aberration politique, économique et, plus encore, humaine. (Exclamations sur
les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Politique,
monsieur le ministre. En effet, le Président Sarkozy, dans sa récente
intervention télévisée, a rappelé qu'il voulait être le Président de la valeur "
travail ". Eh bien, voilà l'occasion de mettre enfin des faits en face des
déclarations ! Ces sans papiers, monsieur le ministre, se lèvent tôt, se
couchent souvent tard, pour assumer des tâches exigeantes. Allons-nous leur dire
que le travail des uns n'a pas la même valeur que le travail des autres ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et
divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. -
Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un
mouvement populaire. Les droits de l'homme ! Mme Michèle
Delaunay. Allez-vous nous affirmer, comme le Président de la République
l'a fait, que 22 % des étrangers en situation régulière seraient au chômage,
chiffre sans fondement, démenti par tous les instituts de statistiques ? Alors,
pourquoi cette communication bâtie sur des mensonges et des peurs supposées ?
(Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) M. Richard Mallié. La question
! Mme Michèle Delaunay. C'est aussi - et cela, vous pouvez
l'entendre - une aberration économique. Ces sans papiers, qui occupent bien
souvent des emplois non pourvus, si on ne les régularise pas, les entreprises
devront s'en passer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour
un mouvement populaire.) C'est enfin et surtout, monsieur le ministre,
une aberration humaine, comme toute votre politique de reconduite à la
frontière, d'affichage, de chiffres (Exclamations sur les bancs du groupe de
l'Union pour un mouvement populaire),... M. le
président. Veuillez poser votre question, madame. Mme
Michèle Delaunay. ...de quotas, quand chacun de ces travailleurs est
justement une personne humaine. Ils ont appris notre langue, fait des efforts et
travaillé à nos côtés. Ma question est très concrète : allez-vous étendre la
régularisation des sans papiers qui travaillent à l'ensemble du
territoire... M. Richard Mallié. Non ! Mme
Michèle Delaunay. ...et la fonder enfin sur des critères stables et
transparents ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical,
citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. le président. La parole est à M. Brice Hortefeux,
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du
développement solidaire. M. Brice Hortefeux, ministre de
l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement
solidaire. Madame la députée, vous m'interrogez sur un sujet, à l'évidence,
sensible. Je vous répondrai donc précisément. Tout d'abord - et je vous demande
de me croire - je ne jette pas la pierre à ceux qui ont pensé, sans doute avec
beaucoup de naïveté, qu'en régularisant massivement... M. Jean
Glavany. C'est pourtant ce que vous faites, sans le dire !
M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité
nationale et du développement solidaire. ...on repartirait sur des
bases nouvelles et qu'on remettrait les compteurs à zéro ! En 1997, on a
régularisé 80 000 personnes. M. Jean Glavany. Vous
régularisez sans le dire ! M. le ministre de l'immigration, de
l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
La conséquence fut immédiate : cela a provoqué un appel d'air formidable, et le
nombre de demandeurs d'asile a été multiplié par quatre ! (Applaudissements
sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'ajoute, madame la députée, que l'Italie et l'Espagne, que vous auriez
pu citer, qui ont pratiqué de telles régularisations, y ont officiellement
renoncé, voici plus d'un an et ils n'entendent plus le faire à l'avenir !
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) Notre politique se veut simple, claire et juste. Le principe
est simple : sauf cas particulier - humanitaire, sanitaire, social, le travail
-... Mme Michèle Delaunay. Eh oui, le travail
! M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité
nationale et du développement solidaire. ...un étranger en situation
irrégulière a vocation être reconduit dans son pays d'origine.
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement
populaire.) M. Jean Glavany. Vous ne répondez pas à la
question qui vous a été posée ! M. le ministre de l'immigration, de
l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
J'ajoute que ce principe est appliqué par tous les pays d'Europe, quelle que
soit leur sensibilité. Concernant les travailleurs clandestins, c'est-à-dire
ceux qui séjournent sur notre territoire sans y avoir été autorisés et qui y
travaillent sans autorisation de travail ou avec des papiers frauduleux ou
falsifiés,... M. Maxime Gremetz. Ils paient pourtant des
impôts. C'est honteux ! M. le ministre de l'immigration, de
l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
...je ne peux, alors que l'on demande tous les jours à tous les membres
de la communauté nationale sans exception de respecter la loi, accorder une
prime à l'illégalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union
pour un mouvement populaire.) Donc, pas de régularisation générale et
massive ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un
mouvement populaire.) En revanche, je vous confirme, madame la députée,
qu'il doit y avoir des critères pour des situations
exceptionnelles. M. Jean Glavany. Lesquels ? M.
le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du
développement solidaire. M. Glavany m'approuve ! (Sourires.) Il
m'a sollicité sur des sujets bien précis et je lui ai donné satisfaction
! Quels sont ces critères ? D'abord, un métier sous tension. Ensuite, une
zone géographique déterminée, car les besoins ne sont pas les mêmes en Gironde,
dans le Puy-de-Dôme, dans les Bouches-du-Rhône ou le Cantal. Par ailleurs, un
vrai contrat de travail. Enfin, l'obligation pour les employeurs d'acquitter les
taxes qui sont dues lorsqu'ils recrutent un étranger. Il n'est pas question
qu'ils profitent d'une opportunité pour ne rien payer ! (Applaudissements sur
les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M.
le président. Merci, monsieur le ministre... M. le ministre
de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement
solidaire. Je conclus, monsieur le président. C'est un sujet très
sensible ; je le dis en pensant particulièrement à Mme Pau-Langevin, qui a été
obligée de quitter, voici quelques jours, une manifestation à ce propos sous
protection policière. Ce genre de situation devrait conduire à plus de mesure et
de pragmatisme ! Non aux régularisations générales ! Oui aux régularisations
au cas par cas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un
mouvement populaire.)
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