Texte de la QUESTION :
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Mme Laure de La Raudière interroge M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur les difficultés rencontrées par de nombreux chefs d'entreprises, en raison de l'imprécision actuelle des articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail, qui aboutit à une confusion dans la définition des infractions constituant le prêt de main-d'oeuvre illicite et le délit de marchandage. Le prêt de main-d'oeuvre illicite est actuellement défini comme étant toute opération à but lucratif ayant pour seul objet le prêt de salarié. Le délit de marchandage est actuellement défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a pour conséquence de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application de dispositions légales ou conventionnelles. Toutes les entreprises prestataires de services (forces de vente, nettoyage, accueil, gardiennage, informatique, maintenance..., sous-traitance en général) sont amenées à mettre à disposition leur personnel auprès d'une société cliente. L'inspecteur du travail, les syndicats, le personnel peuvent, sur le fondement des articles précités, saisir le juge pénal pour que l'entreprise prestataire de service et l'entreprise cliente soient condamnées pour les délits de marchandage et/ou de prêt de main-d'oeuvre illicite. L'imprécision actuelle des articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail ne permet pas une application prenant en compte l'évolution et la complexité accrue des tâches développées par les entreprises prestataires de services. La généralité et l'imprécision du contenu de ces articles sont à l'origine de nombreux contentieux à l'occasion desquels des sous-traitants ou prestataires de services ont été soit condamnés pénalement, ou civilement, soit au contraire relaxés après de longues et injustes poursuites. Cette situation fait peser un risque anormal sur l'entrepreneur prestataire de services, ce qui justifie de donner une définition des éléments constitutifs du prêt de main-d'oeuvre illicite. Lors de la discussion du projet de loi de modernisation de l'économie, le Gouvernement avait pris l'engagement de travailler sur ce sujet. Aussi, elle souhaiterait connaître les mesures qu'il envisage de prendre pour solutionner ce problème rapidement.
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Texte de la REPONSE :
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DÉLITS DE MARCHANDAGE ET DE PRÊT ILLICITE DE MAIN-D'OEUVRE M. le président. La parole est à Mme Laure de
La Raudière, pour exposer sa question n° 547, relative à l'imprécision de la
définition des délits de marchandage et de prêt illicite de main-d'oeuvre dans
le code du travail. Mme Laure de La Raudière. Ma question
s'adresse à M. Brice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de
la famille, de la solidarité et de la ville. Elle concerne les difficultés
rencontrées par de nombreux chefs d'entreprise de prestations de services en
raison de l'imprécision actuelle de la définition du prêt de main-d'oeuvre
illicite et du délit de marchandage dans les articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du
code du travail. Ma question s'inscrit pleinement dans le cadre du contrôle des
engagements pris par le Gouvernement lors de la discussion du projet de loi de
modernisation de l'économie. Le prêt de main-d'oeuvre illicite est
actuellement défini comme étant toute opération à but lucratif ayant pour seul
objet le prêt de salarié. Le délit de marchandage, quant à lui, est actuellement
défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a
pour conséquence de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder
l'application de dispositions légales ou conventionnelles. Toutes les
entreprises prestataires de services - forces de vente, nettoyage, accueil,
gardiennage, informatique, maintenance, sous-traitance en général - sont amenées
à mettre à disposition leur personnel auprès d'une société cliente. L'inspecteur
du travail, les syndicats, le personnel peuvent, sur le fondement des articles
précités, saisir le juge pénal pour que l'entreprise prestataire de service et
l'entreprise cliente soient condamnées pour les délits de marchandage et/ou de
prêt de main-d'oeuvre illicite. Ces entreprises risquent une condamnation pénale
dans un flou reconnu de tous et qui n'est que relativement juridique. Prenons
un seul exemple : celui d'une entreprise mettant un animateur commercial à
disposition de grandes marques agro-alimentaires. Celui-ci a été formé par
l'entreprise qui l'emploie, et il se rend dans les supermarchés pour faire la
promotion du produit de la marque cliente. Il arrive d'ailleurs fréquemment
qu'un animateur commercial effectue des prestations pour plusieurs marques
différentes, toutes clientes de l'entreprise dans laquelle il est employé. Or le
dirigeant de l'entreprise qui l'emploie peut parfaitement être attaqué pour prêt
illicite de main-d'oeuvre et délit de marchandage. La personne portant plainte
va arguer que l'animateur commercial travaille en réalité pour la marque
agro-alimentaire initialement cliente de l'entreprise employeuse, et donc
considérer qu'il doit bénéficier des avantages de l'entreprise de la marque
agro-alimentaire : convention collective, convention d'entreprise. La définition
actuelle retenue par le code du travail ignore totalement que l'entreprise
prestataire de services a son propre savoir-faire, transmis à son salarié, et sa
propre convention collective. Les dispositions législatives en vigueur ignorent
que l'animateur commercial peut travailler chez plusieurs clients. On aboutit
donc à des plaintes au pénal contre les dirigeants des entreprises proposant des
prestations d'animation commerciale, avec des relaxes au bout de trois ou quatre
ans, après une période de stress constant pour les personnes poursuivies. Un
tel exemple montre que l'imprécision des articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du code
du travail ne permet pas une application prenant en compte l'évolution et la
complexité accrue des tâches développées par les entreprises prestataires de
services. C'est un sujet important, étant donné l'augmentation du nombre
d'emplois dans ce secteur en développement. La généralité et l'imprécision du
contenu de ces articles sont à l'origine de nombreux contentieux. Le risque
anormal qui pèse sur l'entrepreneur prestataire de services justifie de donner
une définition des éléments constitutifs du prêt de main-d'oeuvre illicite ou du
délit de marchandage. Lors de la discussion du projet de loi de modernisation
de l'économie, le Gouvernement avait pris l'engagement de travailler sur ce
sujet. Quelles mesures M. Hortefeux envisage-t-il de prendre pour régler ce
problème rapidement, conformément à cet engagement pris en juin dernier
? M. le président. La parole est à M. Michel Barnier,
ministre de l'agriculture et de la pêche. M. Michel Barnier,
ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame Laure de La Raudière, M.
le ministre du travail vous prie d'excuser son absence, et je vous remercie de
votre compréhension. Vous travaillez activement sur ces sujets avec beaucoup
de compétence et d'humanité, chacun le sait, Brice Hortefeux en particulier. Je
suis en mesure de vous confirmer en son nom qu'une mission de réflexion a été
confiée, le 20 novembre 2008, par le ministre du travail, des relations
sociales, de la famille et de la solidarité, à Thomas Chaudron, chef
d'entreprise et ancien président du Centre des jeunes dirigeants, sur la place
du tiers dans la relation de travail, thème incluant notamment la question que
vous avez évoquée avec beaucoup de précision, à savoir le cadre légal applicable
en matière de prêt de main-d'oeuvre. M. Thomas Chaudron a remis son rapport à
Brice Hortefeux le 2 février. Il émet un certain nombre de propositions
concernant la possibilité de prêt de personnel dans des bassins d'emploi, en
fonction de la nature des missions exercées. Le rapport ayant été rendu hier,
vous comprendrez que le ministre ait besoin d'un peu de temps pour étudier ces
propositions et pour pouvoir se prononcer concrètement sur la suite à leur
donner. Mais je suis sûr qu'il sera à votre écoute et qu'il mènera, avec vous et
les autres parlementaires concernés par cette question importante, toute la
concertation nécessaire.
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