FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 56303  de  M.   Morel-A-L'Huissier Pierre ( Union pour un Mouvement Populaire - Lozère ) QE
Ministère interrogé :  Santé et sports
Ministère attributaire :  Travail, emploi et santé
Question publiée au JO le :  28/07/2009  page :  7378
Réponse publiée au JO le :  12/04/2011  page :  3737
Date de changement d'attribution :  14/11/2010
Rubrique :  santé
Tête d'analyse :  alcoolisme
Analyse :  lutte et prévention
Texte de la QUESTION : M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur le baclofène, médicament susceptible d'être efficace dans le traitement de l'alcoolo-dépendance et réclamé par de nombreux patients souffrant de cette addiction. Ce relaxant musculaire commercialisé depuis plus de trente ans pour soulager les contractures douloureuses accompagnant certaines paralysies n'a pas d'autorisation de mise sur le marché dans l'indication du sevrage alcoolique. Il lui demande de bien vouloir lui donner son avis sur ce sujet.
Texte de la REPONSE : La publication en 2008, du livre « Le Dernier Verre », dans lequel il fait état de l'efficacité du baclofène dans le maintien du sevrage alcoolique, à des doses très largement supérieures aux doses habituellement utilisées en neurologie (jusqu'à 270 mg par jour), a largement contribué à la médiatisation du débat autour de l'intérêt du baclofène dans la prise en charge thérapeutique de l'alcoolo-dépendance. C'est dans ce contexte et devant la demande croissante des patients alcoolo-dépendants de disposer du baclofène, relayée par leurs médecins et leur entourage, que l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) s'est saisie de cette problématique. Le baclofène est un myorelaxant d'action centrale, principe actif de la spécialité LIORESAL(R) (Laboratoires Novartis). Ce médicament bénéficie depuis 1975 d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) en France dans le traitement des contractures spastiques accompagnant certaines affections neurologiques. Chez l'adulte, la posologie du baclofène est progressive et adaptée individuellement. Elle se situe généralement entre 30 et 75 mg par jour. Des posologies supérieures (jusqu'à 120 mg par jour) peuvent être administrées mais uniquement en milieu hospitalier. À ces doses, les effets indésirables les plus fréquemment rapportés sont une sédation et une somnolence survenant en début de traitement. Au-delà de 120 mg par jour, le baclofène peut induire des troubles de la conscience, une confusion mentale et une dépression respiratoire. C'est pourquoi, depuis 2008, l'AFSSAPS poursuit la veille et l'analyse de l'ensemble des données expérimentales, pharmacologiques, toxicologiques et cliniques disponibles. Concernant tout d'abord l'efficacité dans la prévention du syndrome de sevrage alcoolique, certaines données expérimentales disponibles chez l'animal (modèles de rats alcoolo-dépendants) démontrent une efficacité du baclofène dans la diminution de l'intensité des symptômes du sevrage, cependant une seule étude clinique a comparé le baclofène au traitement de référence, à savoir les benzodiazépines, chez un petit nombre de patients. Concernant ensuite l'efficacité dans la prévention de la rechute, plusieurs études expérimentales, principalement issues des travaux d'une même équipe, suggèrent une efficacité du baclofène. Les données cliniques disponibles sont principalement issues du suivi de séries de patients, et seules trois études comparatives portant sur de petits nombres de patients ont été réalisées, dont deux par une même équipe et une troisième qui s'est avérée négative. Plusieurs études cliniques sont en cours ou sont prévues, notamment aux États-Unis, en Australie et en Allemagne. En France, un projet hospitalier de recherche clinique (PHRC) de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (APHP) a été autorisé en 2009. Il s'agit d'une étude clinique multicentrique, comparative, randomisée, en double insu, visant à évaluer l'efficacité du baclofène à la posologie de 90 mg par jour dans l'aide au maintien de l'abstinence après sevrage hospitalier chez des patients alcoolo-dépendants. Par ailleurs, afin de mieux appréhender le profil de risques du baclofène, l'AFSSAPS a saisi le réseau des centres anti-poison et de toxicovigilance afin de disposer d'une analyse des données des cas de surdosage aigus ou chroniques recensés et de pouvoir préciser la dose seuil à partir de laquelle des signes cliniques d'intoxication pourraient se manifester. Ainsi, il existe des données expérimentales et cliniques évoquant un effet positif du baclofène dans la prise en charge thérapeutique des patients alcoolo-dépendants. Cependant le petit nombre de patients inclus dans ces études et les biais méthodologiques n'ont pas permis d'établir à ce jour des recommandations sur l'utilisation du baclofène dans ce contexte. Seules des études cliniques comparatives répondant aux conditions définies dans les recommandations européennes, permettront de confirmer ou d'infirmer l'utilité du baclofène dans la prise en charge thérapeutique des patients alcoolo-dépendants, le profil de sécurité d'emploi, un schéma posologique adapté et éventuellement un profil de patients répondeurs. Un groupe d'experts réuni par l'AFSSAPS une première fois en février 2009, s'est prononcé sur l'intérêt de réaliser et de promouvoir des études cliniques pour définir le rapport bénéfice/risques et les conditions d'utilisation du baclofène dans la prise en charge de la dépendance alcoolique. Il avait ainsi reconnu l'intérêt de l'étude du PHRC et avait proposé quelques modifications du protocole. Suite à une nouvelle réunion de ce groupe d'experts, en février 2011, une communication de l'AFSSAPS, à l'attention du public et des prescripteurs, relative à l'état des connaissances et rappelant les conditions d'utilisation du baclofène dans l'attente des résultats d'autres études cliniques est en cours d'élaboration. En l'état actuel des connaissances, l'AFSSAPS incite à l'extrême prudence et met en garde les médecins contre toute prescription de baclofène en dehors des indications mentionnées dans I'AMM, et rappelle que la prescription d'un traitement médicamenteux dans le traitement de l'alcoolo-dépendance, addiction souvent multifactorielle, doit toujours s'inscrire dans une prise en charge globale.
UMP 13 REP_PUB Languedoc-Roussillon O