Texte de la QUESTION :
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M. Patrick Beaudouin interroge M. le ministre de la défense sur la formation des cadres militaires étrangers en France. La diminution de près de 40 % du budget d'intervention de la direction de la coopération de sécurité et de défense a conduit à réduire de façon drastique les moyens affectés à cette formation. La coopération dans le domaine de la formation des cadres a pourtant un impact extrêmement positif à plusieurs égards. Sur le plan militaire, elle est d'autant plus utile que les responsables militaires français travaillent chaque jour davantage dans un cadre multilatéral, à l'occasion d'opérations conduites sous le commandement de l'ONU, de l'OTAN ou de l'Union européenne. Elle a aussi un impact économique, en favorisant l'acquisition d'armements français, qui est elle-même un atout pour la pénétration des entreprises françaises sur les marchés étrangers. Au niveau des relations internationales, elle valorise le réseau diplomatique français et alimente le réseau d'information extérieure. Enfin, c'est un enjeu culturel, puisque la formation des cadres militaires se déroule en français, et contribue ainsi à la défense de la francophonie. C'est pourquoi, si l'effort de maîtrise des dépenses publiques est légitime, il lui demande de bien vouloir envisager la mise en place de solutions de substitution. Il lui demande, en particulier, de bien vouloir étudier la création, sous l'égide du ministère de la défense, d'un fonds de formation des stagiaires étrangers, qui permettrait de rassembler les financements en provenance de tous les bénéficiaires de ces stages, qu'ils soient du secteur public ou du secteur privé (les industriels, qui bénéficient ensuite des commandes), qu'ils soient français ou étrangers (États bénéficiaires, voire partenaires francophones). La démarche consisterait à mutualiser les contributions, de façon à dépenser plus rationnellement, dans un secteur essentiel, plutôt que de supprimer définitivement une dépense nécessaire.
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Texte de la REPONSE :
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FINANCEMENT DE LA FORMATION DES CADRES MILITAIRES ÉTRANGERS
M. le président. La parole est à M.
Patrick Beaudouin, pour exposer sa question, n° 731, relative au financement de
la formation des cadres militaires étrangers. M. Patrick
Beaudouin. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires
étrangères. La diminution de près de 40 % du budget d'intervention de la
direction de la coopération de sécurité et de défense a conduit à réduire de
façon drastique les moyens affectés à cette formation. En tant que président
du groupe d'amitié France-Corée du Sud, j'ai moi-même constaté l'incompréhension
provoquée, auprès de nos amis coréens, par cet arrêt brutal et inattendu d'un
lien non seulement d'amitié, mais également de formation et d'échanges
bilatéraux, né à la fin de la guerre de Corée et poursuivi depuis lors de façon
forte, puisque nous construisons avec eux, dans le cadre de la coopération
industrielle, la version coréenne de l'hélicoptère NH90. La coopération dans
le domaine de la formation des cadres a un impact extrêmement positif à
plusieurs égards. Sur le plan militaire, elle est d'autant plus utile que les
responsables militaires français travaillent chaque jour davantage dans un cadre
multilatéral, à l'occasion d'opérations conduites sous le commandement de l'ONU,
de l'OTAN ou de l'Union européenne. Elle a aussi un impact économique, car elle
favorise l'acquisition d'armements français, qui est elle-même un atout pour la
pénétration des entreprises françaises sur les marchés étrangers. Au niveau des
relations internationales, elle valorise notre réseau diplomatique et alimente
notre réseau d'information extérieure. Enfin, c'est un enjeu culturel, puisque
la formation des cadres militaires se déroule en français, et contribue ainsi à
la défense de la francophonie. C'est pourquoi, si l'effort de maîtrise des
dépenses publiques est naturellement légitime, je demande au Gouvernement de
bien vouloir envisager la mise en place de solutions de substitution. On
pourrait notamment étudier la création d'un fonds de formation des stagiaires
étrangers, qui permettrait de rassembler les financements en provenance de tous
les bénéficiaires de ces stages, qu'ils soient du secteur public ou privé. Les
industriels français ou étrangers, qui bénéficient ensuite des commandes, les
États bénéficiaires, mais aussi, éventuellement, certains de nos partenaires
francophones, pourraient se montrer intéressés par ce dispositif. La démarche
consisterait à mutualiser les contributions, de façon à dépenser plus
rationnellement dans un secteur essentiel, au lieu de supprimer définitivement
une dépense nécessaire. Si la création d'un tel fonds est envisageable à brève
échéance, ne serait-il pas souhaitable de le rattacher à la fois au ministère
des affaires étrangères et au ministère de la défense, dont on peut penser que
la formation militaire constitue la vocation naturelle et régalienne
? M. le président. La parole est à Mme Rama Yade, secrétaire
d'État chargée des affaires étrangères et des droits de l'homme. Mme
Rama Yade, secrétaire d'État chargée des affaires étrangères et des
droits de l'homme. Monsieur le député, il est vrai que, depuis 2007, les
crédits d'intervention de la direction de la coopération militaire et de défense
- aujourd'hui direction de la coopération de sécurité et de défense - ont subi
une baisse de près de 40 %. Celle-ci s'est traduite concrètement par une
diminution des flux de formation des stagiaires étrangers dans les écoles
militaires françaises, ainsi que du soutien apporté par la direction aux actions
d'enseignement du français en milieu militaire. Malgré ce constat, je
souligne que la DCSD, soucieuse de rationaliser une partie de ses moyens, a pu
dégager des marges de manoeuvre. De ce fait, elle a réussi à maintenir un effort
constant et important au profit, en particulier, des écoles nationales à
vocation régionale, indispensables outils d'appropriation de la formation au
profit des partenaires étrangers. Près de 10 millions d'euros sont consacrés
annuellement par le ministère des affaires étrangères et européennes au soutien
du réseau de ces écoles. De même, l'effort au profit des actions de formation de
haut niveau conduites en France, notamment dans le cadre des cours interarmées
de défense et de l'Institut des hautes études de défense nationale, a été
maintenu au cours des dernières années et s'établit annuellement à plus de 3
millions. Quant à la nécessité de maintenir à un niveau acceptable les cours
d'enseignement du français en milieu militaire au profit des partenaires
étrangers, je précise que, malgré la baisse déjà évoquée des crédits, la DCSD
mène depuis quelques années une politique volontariste. Elle a notamment réussi
à intéresser à certaines de ses actions l'Organisation internationale de la
francophonie. De même, au sein du ministère des affaires étrangères et
européennes, une recherche de solutions de substitution a permis la prise en
charge de certains des cours de langue française, auparavant financés sur des
crédits de la DCSD, par les alliances françaises ou les centres culturels
français. Mais il est vrai que ces modes opératoires, pour intéressants
qu'ils puissent paraître, ne sont pas suffisants. Aussi, comme vous l'évoquez
dans votre question, la solution pourrait-elle passer par une participation
financière de divers acteurs institutionnels ou privés à certains de nos efforts
en matière de cycles de formation et d'enseignement de la langue française. Le
ministère des affaires étrangères et européennes a engagé une réflexion sur les
modalités pratiques qui pourraient permettre à certaines de nos entreprises
implantées à l'étranger, dans des zones dont la sécurisation pérenne est
indispensable à leurs activités - je pense en particulier aux golfes de Guinée
et d'Aden, et aux pays sahéliens -, d'abonder des fonds spécifiques dédiés au
financement d'actions de formation ciblées. Plus qu'un intérêt matériel
immédiat, j'y vois une reconnaissance du travail effectué par notre coopération
de sécurité et de défense au profit de certaines des institutions régaliennes de
pays partenaires et amis, afin de les aider aux règlements de problèmes de
sécurité. Ces fonds, gérés par les services du ministère, permettraient de
maintenir les indispensables flux de formation tout en s'affranchissant pour
partie de l'incidence des contraintes budgétaires. Je peux d'ores et déjà vous
annoncer que certaines de nos entreprises bien implantées à l'étranger ont
manifesté un vif intérêt pour cette idée. Enfin, vous n'êtes pas sans savoir
que nombre de nos actions de coopération s'inscrivent aujourd'hui dans un cadre
multilatéral, ce qui se traduit concrètement par la participation active -
financière et humaine - au soutien de certains centres de formation militaires à
l'étranger, à l'émergence desquels la France a initialement contribué. Ainsi,
pour citer quelques exemples concrets, l'École de maintien de la paix de Bamako
est actuellement soutenue par une dizaine de partenaires étrangers, européens
mais aussi américains et même asiatiques, comme le Japon. De même, plusieurs
contributeurs étrangers soutiennent le Centre de perfectionnement aux actions
post-conflictuelles de déminage et de dépollution de Ouidah au Bénin. Je
pourrais multiplier les exemples. Comme vous le constatez, notre coopération
de sécurité et de défense est engagée dans une démarche résolument novatrice et
volontariste visant à intéresser aux actions qu'elle mène nombre plus important
de partenaires de la sphère institutionnelle et privée.
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