Texte de la QUESTION :
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Mme Michèle Delaunay attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la nécessité de placer la culture au coeur des apprentissages. Dans une étude publiée en 2006 à la suite d'une enquête dans les lycées d'Île-de-France, une sociologue conclue que « la culture classique n'est plus aujourd'hui transmise à la jeunesse, hormis sa fraction la plus favorisée ». Par culture classique on entend la musique, mais aussi le cinéma et la littérature. Chez les jeunes, les produits culturels sont très liés à leurs capacités à créer du lien social et cette circulation de la culture se fait avant tout autour de la musique actuelle, des contenus télévisuels et des jeux vidéo. Dans l'échange de produits culturels communs et donc majoritairement contemporains de leur époque, le jeune va avoir tendance à fuir ce qui pourrait le marginaliser par rapport au groupe. Cette rupture de transmission ne vient pas d'une démission parentale car les parents ne font que subir les offres culturelles présentées à leurs enfants et ne peuvent la contrôler sans les marginaliser. Pourtant, cette rupture dans la transmission de la culture pose plusieurs problèmes. D'abord parce que de trop nombreux objets culturels liés à la culture dite humaniste, comme certains ouvrages mais aussi les films en noir et blanc par exemple, sont devenus étrangers à la majorité des jeunes. Ensuite, parce que même les foyers familiaux se sont développés comme des territoires clivés selon les générations dans lesquels on ne trouve plus d'objets culturels communs. Elle souhaite donc savoir ce qu'il entend mettre en oeuvre afin d'empêcher que cette individualisation et cette privatisation de la culture pour les jeunes ne favorisent qu'une culture générationnelle au détriment d'une culture commune transgénérationnelle.
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Texte de la REPONSE :
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Le ministère de la culture et de la communication conduit depuis plusieurs années une politique de développement des publics attentive à la mixité générationnelle. Cette politique est mise en oeuvre par le biais de programmes d'actions relevant de l'éducation artistique, de l'action culturelle et de la formation. Cette mise en oeuvre concerne l'ensemble des champs artistiques, dont le domaine de la musique. Prioritaire pour le ministère de la culture et de la communication, l'éducation artistique est un des leviers principaux pour insérer la jeunesse dans un réseau de pratiques culturelles et artistiques. Pour atteindre cet objectif, l'ensemble des structures de spectacle vivant et d'art contemporain élabore des parcours culturels permettant la rencontre avec des artistes et des oeuvres. En moyenne, les structures réservent 20 % de leur capacité d'accueil aux groupes et dispositifs d'éducation artistique. Ces actions concernent tous les domaines de la création, et notamment la musique grâce au travail accompli par les orchestres, les ensembles instrumentaux et les opéras. Ces structures culturelles amènent le jeune public à découvrir les divers répertoires de musique classique au moyen de concerts éducatifs ou participatifs et de projets de pratiques artistiques. Actuellement, par exemple, les ministères de la culture et de la communication et de l'éducation nationale travaillent sur un projet intitulé « Élèves au concert ». Son enjeu est de familiariser la jeunesse avec les diverses esthétiques musicales par la fréquentation de lieux dédiés, la participation à des concerts et la rencontre avec les artistes, le tout étayé par des démarches pédagogiques spécifiques. Ce projet, expérimenté avec l'Union nationale des jeunesses musicales de France, est appelé à s'ouvrir à toutes les structures de diffusion et de création musicales dans le cadre de leurs activités d'éducation artistique. C'est toujours avec l'objectif d'une pratique artistique ou d'une culture partagée que le ministère encourage les résidences d'artistes dites de territoire. Par ce moyen, peuvent être réunis autour d'un projet commun divers publics, scolaire, estudiantin, adulte, lors de temps de restitution ou de présentation de travaux. Ces moments permettent d'associer la parenté et les proches au projet artistique. C'est dans cet esprit que nombre de structures culturelles inversent le rapport traditionnel aux oeuvres et à l'univers culturel, en permettant aux enfants inscrits à un spectacle ou un concert dans le cadre scolaire de venir accompagnés d'une personne de leur choix. Ainsi, tous les projets, toutes les actions conduites dans le cadre scolaire ou périscolaire comprennent un volet valorisation et rayonnement incluant l'ouverture à un public plus vaste. Cette conception de l'éducation artistique rejoint la politique de la pratique en amateur développée par les associations, les agences départementales et les structures. À titre d'exemple, on peut évoquer le dispositif danse en amateur et répertoire initié par la direction générale de la création artistique et dorénavant mise en oeuvre par le Centre national de la danse. Depuis l'année 2006, un appel à projet suivi d'un comité de sélection a permis à plus de 90 groupes de danseurs amateurs de travailler des opus chorégraphiques avec le concours d'un professionnel danseur ou chorégraphe. Sont également encouragés, selon les spécificités des territoires, les projets réunissant amateurs et professionnels, comme c'est le cas au théâtre de Bussang ou de Beaumes-de-Venise par exemple. Enfin, les structures culturelles organisent également, en lien avec leur programmation, des ateliers de pratique artistique ouverts à la diversité culturelle et générationnelle. Ces activités créent des liens avec les pratiques en amateur, lesquelles concernent environ un quart de la population pour la fréquentation des spectacles. Dans la perspective de la poursuite d'une activité culturelle ou artistique d'amateur durant l'âge adulte, le ministère est attentif à proposer une initiation de qualité dispensée par des personnels compétents. Ainsi a-t-il créé en 1986, en collaboration avec le ministère de l'éducation nationale, les centres de formation de musiciens intervenant (CFMI). Leur mission est de former en deux ou trois ans des spécialistes d'une didactique participative de la musique qu'ils mettent en oeuvre dans le cadre de projets artistiques et éducatifs aux côtés des enseignants du premier degré, avec le concours des écoles de musique ou des associations péri-éducatives. Au total, ce sont plus de 7 000 « dumistes » qui ont, dans le domaine de la musique, permis le succès des classes à projet artistique et culturel créées en 2002. Leurs compétences pédagogiques alliées à une pratique musicale personnelle font de ces « dumistes » des médiateurs précieux dans la pratique et la découverte de la musique auprès de la jeunesse. Leur action est à mettre en relation avec le travail d'initiation et de formation réalisé dans l'enseignement spécialisé sous la tutelle pédagogique du ministère. Les conservatoires sont invités à ouvrir davantage leur programme pédagogique aux projets en lien avec l'éducation nationale et à élargir leur champ disciplinaire à la danse et au théâtre. Dans cet esprit, existent depuis 1974 les cursus dits classes à horaires aménagés qui permettent dès l'école primaire de rendre les enfants et les parents familiers d'une pratique artistique exigeante. Par ailleurs, les « orchestres à l'école » permettent d'initier de jeunes élèves à la pratique instrumentale collective. Dans le domaine de la création, les conventions d'objectifs de toutes les structures culturelles de création ou de diffusion et les organismes de formation intègrent cette question dans des propositions d'activités transgénérationnelles, spectacles tout public, ateliers de pratique, rencontres. Par ailleurs, dans le domaine du cinéma, le ministère de la culture et de la communication a mis en place des dispositifs de sensibilisation à la culture cinématographique : école et cinéma, collège au cinéma, lycéens et apprentis au cinéma. Ces opérations ont concerné plus de 1,2 million d'élèves l'an dernier et se sont développées grâce à l'aide du ministère de l'éducation nationale, des collectivités territoriales et des professionnels du cinéma. La volonté de faire venir les élèves pendant le temps scolaire dans les salles de cinéma correspond totalement à ce souci de faire vivre une expérience collective qui pourra être partagée entre les équipes enseignantes et les élèves. Les films inclus dans le catalogue de ces trois dispositifs sont représentatifs d'un genre, d'une nationalité, d'une esthétique... Enfin, la mise en oeuvre du dispositif Ciné-lycée qui consiste en l'organisation de séances de cinéma régulières dans tous les lycées généraux et professionnels par le biais d'une plate-forme Internet spécifique vient compléter ces actions. Il permettra aux élèves d'approfondir leur connaissance des oeuvres du patrimoine cinématographique ; de favoriser l'esprit d'initiative et l'autonomie des lycéens afin d'enrichir la vie culturelle au sein de leur établissement et de faciliter l'immersion dans les langues vivantes et les cultures étrangères par l'utilisation, pour les films étrangers, de la version originale sous-titrée. L'acquisition d'une culture cinématographique personnelle ne pourra qu'enrichir celle acquise en groupe lors de projections collectives.
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