Texte de la QUESTION :
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M. Bernard Debré attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur l'un des projets pharaoniques de la mairie de Paris : la destruction du stade Jean-Bouin. Le maire de Paris a en effet souhaité laisser son empreinte dans un arrondissement qui ne lui a jamais été acquis. Pour ce faire, et malgré une vive opposition des élus et de la population, le maire de Paris poursuit sa lancée, avec une ardeur et un entêtement qui interdisent toute concertation. Ce projet a notamment été décrié car, dès le commencement des travaux, les 4 500 élèves des lycées et collèges avoisinants devront s'orienter vers d'autres structures beaucoup plus éloignées. Ce préjudice s'accroît encore pour les élèves de terminale qui ne peuvent préparer dans de bonnes conditions les épreuves sportives du baccalauréat. Les habitants, non scolaires, qui régulièrement profitent des installations de ce stade, seront également expulsés d'un stade, en fait, privatisé au seul bénéfice d'un club professionnel. Au-delà de la période des travaux, cette restructuration aura en effet pour conséquence de consacrer ce stade jadis omnisports, à la seule pratique du rugby. Qui plus est, le financement de ce projet interpelle car il sera financé par les Parisiens, un financement de près de 200 millions d'euros, la redevance prévue ne finançant que les lourds frais de fonctionnement du stade, bien loin du projet « Paris 2012 » qui emportait l'assentiment général, pour un budget de seulement 40 millions d'euros. Malgré les interventions des élus, de la population, de la presse, aucun débat ne semble plus envisageable avec le maire de Paris. C'est la raison pour laquelle, il lui demande quelles mesures elle envisage de prendre pour éviter cette gabegie.
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Texte de la REPONSE :
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RESTRUCTURATION DU STADE JEAN-BOUIN Mme la présidente. La parole est à M. Bernard
Debré, pour exposer sa question, n° 831. M. Bernard Debré.
Madame la secrétaire d'État chargée des sports, je souhaite vous interroger sur
la restructuration du stade Jean-Bouin, dans le XVIe arrondissement. Ce
stade vieillissant, utilisé par tous les élèves de l'arrondissement, ainsi que
par des personnes âgées, n'est pas dévolu à la pratique d'un seul sport. Or,
depuis un certain temps, le maire de Paris a décidé, allez savoir pourquoi, de
transformer ce stade avec une ardeur et un entêtement qui interdisent quasiment
toute concertation. Il souhaite presque le privatiser pour ne le dédier qu'à un
seul sport : le rugby. D'autres endroits à Paris ne peuvent-ils donc être
utilisés pour pratiquer cette activité sportive, certes très importante mais qui
va progressivement évincer les autres sports de Jean-Bouin ? Pendant les
travaux, qui vont durer un certain temps, les élèves seront forcés d'aller
ailleurs, et parfois loin. Je pense en particulier à ceux de terminale : le
sport est une discipline qui compte pour le bachot. Ensuite, quand la réfection
du stade sera terminée et qu'il sera privatisé au profit d'un seul sport, le
rugby, je le répète, où iront ces élèves ? Il est prévu qu'ils aillent plus
loin, en car, sans qu'on sache très bien où : sera-ce au milieu de champs de
courses ? Une telle initiative me paraît disproportionnée et au moins sujette à
critique. Quant au financement des travaux, même s'il reste à la charge de la
ville de Paris, je soulignerai que si son montant initial était, dit-on, de 100
millions d'euros, il atteint aujourd'hui 150 millions d'euros et pourquoi pas
200 demain, ce qui est gigantesque. Au passage, je note qu'une partie de
l'augmentation des impôts que nous subissons cette année sera utilisée pour la
transformation du stade Jean-Bouin, qui n'était même pas prévue lorsque nous
étions candidats aux Jeux Olympiques de 2012. Ces dépenses pharaoniques
auxquelles sera consacrée une grande partie de l'augmentation des impôts
serviront, certes, à la rénovation du stade mais quid de son
fonctionnement ? Ne devra-t-on pas une nouvelle fois mettre les Parisiens - et,
qui sait, le ministère des sports et de la santé - à contribution, alors que ce
stade ne sera dévolu qu'au rugby ? Malgré les interventions des élus, de la
population, de la presse, il est très difficile d'obtenir la tenue d'un débat
avec le maire de Paris. C'est la raison pour laquelle, madame la secrétaire
d'État, je vous demande quelle appréciation vous portez sur cette transformation
qui n'est pas acceptée par beaucoup et qui coûtera très cher aux
Parisiens. Mme la présidente. La parole est à Mme Rama Yade,
secrétaire d'État chargée des sports. Mme Rama Yade,
secrétaire d'État chargée des sports. Monsieur le député, le stade
Jean-Bouin, complexe omnisports, a été construit en 1925 dans le XVIe
arrondissement de Paris. Il comprend un terrain d'honneur dédié aujourd'hui au
rugby, entouré d'une piste d'athlétisme et de tribunes ; il comprend également
un gymnase, un terrain de hockey sur gazon, dix-sept courts de tennis et des
locaux administratifs et d'accueil. Aujourd'hui, ces installations sportives
ne sont plus conformes aux normes de sécurité en matière de dispositions
relatives à la sécurité des personnes. Le conseil de Paris a adopté le 13
février 2007 le principe d'une démolition-reconstruction partielle de ce stade.
Le projet de l'architecte Rudy Riccioti, retenu par le conseil de Paris le 8
novembre 2008, répond à l'objectif de la ville de destiner le stade, vous l'avez
dit, à l'accueil d'un club de rugby de haut niveau : le Stade français. Le
financement des travaux, voté par le conseil de Paris, est de 119 millions
d'euros. Selon la ville de Paris, la continuité de la pratique sportive de
proximité serait garantie par le déplacement et la reconstruction de la piste
d'athlétisme et du terrain de hockey sur les pelouses de l'hippodrome d'Auteuil.
Les courts de tennis doivent également être déplacés. À terme, ces nouvelles
installations devraient, toujours selon la ville de Paris, permettre
d'accueillir dans des conditions améliorées l'ensemble des élèves et des
associations utilisant actuellement le stade Jean-Bouin. Vous posez aussi,
monsieur le député, la question du financement des stades, outils de travail des
clubs professionnels, par les collectivités publiques. Il s'agit d'encourager
une transition vers le financement privé des enceintes sportives. Toutefois,
l'économie du rugby ne permet encore que très rarement, à la différence du
football, de trouver des partenaires privés susceptibles de financer et de
rentabiliser un tel investissement. En ce qui concerne ce projet, mis en
délibération et voté par le conseil de Paris, son financement est entièrement
public, sans partenariat privé. Au demeurant, aucune demande de subvention n'a
été déposée au ministère de la santé et des sports. Il s'agit donc d'un
équipement strictement communal et aucune disposition législative ou
réglementaire du code du sport ne s'oppose à sa démolition ou à son changement
d'affectation. Aussi, même si, du point de vue de la philosophie du sport, je
partage votre souci que les élèves puissent continuer à être accueillis dans ce
stade, il n'appartient pas, sur le plan juridique, au ministère chargé des
sports de se prononcer sur l'opportunité d'un projet d'intérêt local aujourd'hui
financé exclusivement par des fonds locaux. Mme la
présidente. La parole est à M. Bernard Debré. M. Bernard
Debré. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d'État, mais je
voudrais aller au fond des choses. On nous a dit qu'il n'était pas possible de
dédier le stade Charléty au rugby. Soit. Encore que je ne voie pas pourquoi ce
ne serait pas possible. Ce stade a toutes les caractéristiques requises pour que
l'on puisse y pratiquer ce sport. Et puis, on nous dit maintenant que c'est
formidable, que l'on va aménager le stade Jean-Bouin. Cela va durer trois,
quatre ans. Où va-t-on mettre le rugby, pendant ce temps-là ? À Charléty.
Autrement dit, pendant trois ou quatre ans, ce sera bien pour tout le monde,
mais après, ce ne sera plus bien. Incompréhensible ! Inacceptable ! Il suffisait
de faire quelques travaux dans le stade Charléty pour le dédier au
rugby. Vous dites, madame la secrétaire d'État, que ce sont des financements
publics. Oui, c'est vrai. Mais au bénéfice exclusif d'une équipe privée. Et cela
pose problème : on sait parfaitement que l'équipe de rugby va bénéficier de ce
stade, grâce aux fonds publics mobilisés pour une entreprise privée. Car il
s'agit bien d'une entreprise privée. Tout cela est déroutant.
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