Texte de la QUESTION :
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M. Patrick Roy attire l'attention de M. le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire sur la transformation des friches d'Usinor en zone d'activité économique, trente ans après la fermeture de cette usine et la perte brutale de 20 000 emplois et de 10 000 habitants pour la ville de Denain. En effet, trente ans après, la friche est restée une friche. Toutes les tentatives et volontés de développement de projet n'ont pu se concrétiser. Aujourd'hui, la volonté d'aboutir est plus forte que jamais. La municipalité, dans un souci de préservation de l'environnement et de pérennisation de l'activité agricole périurbaine, a souhaité que tous les efforts en matière de développement économique soient concentrés sur le réinvestissement de la friche Usinor. La communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut, les Voies navigables de France, la chambre de commerce et de l'industrie du Valenciennois, la ville de Denain et l'établissement public foncier partagent cette orientation. Au sein d'un comité de pilotage, les partenaires ont développé un projet économique réaliste basé sur la valorisation des potentialités du site : 80 hectares disponibles ; un bord à canal de 2 000 mètres dont 200 en cours d'exploitation et 400 rapidement exploitables ; une desserte ferroviaire ; une situation au coeur du réseau autoroutier nord-européen. Depuis fin 2008, un schéma d'aménagement global de la zone basé sur des certitudes d'implantation d'unités économiques a été élaboré. Nous entrons aujourd'hui dans la phase opérationnelle du projet de reconversion. Cependant, la faisabilité technique et financière d'un tel projet reste dépendante de la gestion des héritages de l'ère industrielle qui a laissé des sols et sous-sols en très mauvais état. Ces difficultés se matérialisent sur un projet d'implantation économique et de constructions neuves qui malgré l'aide de la CAPH et des partenariats financiers, peine à boucler son plan de financement. Cette expérience nous permet de bien identifier les difficultés rencontrées et leur incidence sur l'opérationnalité des projets, à savoir la pollution des sols et des sous sols, ainsi qu'une structure de sous-sol hétérogène et méconnue Les collectivités territoriales ne peuvent pas assumer, au cas par cas, les conséquences d'un passé oublié. Cela réduit à néant les politiques d'aide au développement. Celles-ci sont englouties dans des surcharges foncières et ne peuvent participer à crédibiliser l'action de développement de la zone aux yeux des porteurs de projets économiques. Aussi, le projet des Pierres Blanches a besoin d'une intervention financière massive pour dégager la constructibilité des terrains de toutes contraintes liées à l'histoire industrielle. Seul l'État peut assumer cette charge au titre de l'histoire et du rôle qu'a joué la ville de Denain dans le développement industriel et économique de la France. C'est le seul moyen de mettre ce projet en perspective et lui donner un caractère opérationnel. Ce sera aussi le moyen de permettre à chaque acteur du territoire d'assumer pleinement ses compétences. Les bilans prévisionnels d'aménagement et de concession portuaire, en dehors de toute réalisation d'infrastructure spécifique et notamment portuaire, font apparaître un déficit évalué à 20 millions d'euros. Il nous semble essentiel pour l'avenir du bassin d'emploi du Denaisis et, au-delà, du Valenciennois, que des moyens spécifiques puissent être mobilisés sur la reconversion définitive de cette friche industrielle. Nous sollicitons l'État, dans la continuité du classement en zone franche urbaine de 25 hectares de la friche par décret n° 2006-1623 en date du 19 décembre 2006, pour que le dossier de la zone des Pierres Blanches soit examiné par un comité interministériel d'aménagement et de compétitivité du territoire afin que des solutions financières basées sur un cofinancement équitable entre l'État et les collectivités territoriales puissent être trouvées.
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Texte de la REPONSE :
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TRANSFORMATION DES FRICHES INDUSTRIELLES DE DENAIN Mme la présidente. La parole est à M. Patrick
Roy, pour exposer sa question n° 905. M. Patrick Roy. Je
commencerai par un peu d'histoire en remontant à 1980, qui a été une année
terrible pour Denain et le Denaisis puisqu'elle a signé l'arrêt de mort de la
sidérurgie : la grande usine ferme et 20 000 emplois directs et indirects
disparaissent. Les années suivantes, la population a diminué de 10 000
habitants. Depuis trente ans, depuis cette funeste année 1980, la ville est
abandonnée, délaissée, oubliée. Les conséquences vous les connaissez : taux de
chômage record, taux de RMIstes encore plus élevé - cette ville a souvent été
qualifiée de capitale française du RMI, titre dont elle se passerait bien
volontiers -, fermeture des commerces, et j'en passe. Aujourd'hui, et c'est
la raison de mon interpellation, une vaste zone de quatre-vingts hectares,
située quasiment en centre-ville, à quelques encablures des rues principales,
est abandonnée dans un état effroyable, les sous-sols étant truffés de trous, de
caves où se trouvaient les anciens équipements d'Usinor. Denain, vous le
savez, a beaucoup apporté à la France et, après trente ans d'oubli, il est temps
d'agir, d'autant que ces friches occupent une grande surface et sont
remarquablement bien situées - elles longent l'Escaut sur 2 000 mètres. En
outre, il existe une desserte ferroviaire et un réseau autoroutier à
proximité. Tous les partenaires veulent se mobiliser - la ville,
l'agglomération, Voies navigables de France, la chambre de commerce -, mais,
vous l'avez compris, rien ne sera possible si l'État n'intervient pas
massivement aux côtés des partenaires. C'est donc un appel au secours que je
lance aujourd'hui pour sortir Denain de l'oubli. Je souhaite savoir quelles sont
les aides envisagées par l'État pour réparer le crime qui a été commis sur cette
région en 1980. Mme la présidente. La parole est à M.
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. M. Jean-Marie
Bockel, secrétaire d'État à la justice. Monsieur le député, je
vous prier de bien vouloir excuser mon collègue chargé de l'espace rural et de
l'aménagement du territoire, qui m'a donné des éléments de réponse sur ce sujet
extrêmement important. Je suis moi-même très sensible aux questions de
désindustrialisation et de reconstruction d'un tissu économique, et je comprends
bien le sens de votre question, surtout s'agissant de cet ancien site
sidérurgique emblématique que constituent les friches d'Usinor. Il est vrai
qu'elles ont fait l'objet de nombreux projets qui n'ont pu aboutir. Cette
reconquête, qui n'est donc pas achevée, doit être poursuivie, notamment au nom
de l'emploi. Un travail doit être poursuivi pour que la réaffectation de ces
friches se fasse au profit d'une nouvelle activité économique, de l'amélioration
générale du cadre de vie des habitants, et pour qu'elle permette de développer
des projets urbains et environnementaux. C'est sur cet objectif de mener une
politique renouvelée du traitement des friches industrielles que l'État et la
région ont d'ores et déjà affiché des moyens dédiés au sein du contrat de projet
2007-2013, dans le grand projet n° 13, et plus précisément afin d'accompagner le
traitement des friches en tissu urbain dense et d'encourager leur
recyclage. Par ailleurs, vous le savez, le programme FEDER est susceptible de
venir en soutien de ce type d'opération. Quant à l'établissement public foncier,
il a vocation à constituer le dispositif privilégié de portage de ces espaces
orphelins et de leur traitement, à travers notamment le pôle " Sites et sols
pollués ". Enfin, il importe de noter l'existence d'un comité de pilotage où
les partenaires concernés développent, sur la zone dite des Pierre Blanches, un
projet économique de reconversion définitive de l'ancien site d'Usinor qui
démontre la volonté des collectivités d'aboutir ensemble et mérite, à ce titre,
l'attention des pouvoirs publics, de l'État. Compte tenu de la complexité de
ce dossier, de son histoire, des vicissitudes qu'il a traversées, des échecs
qu'il a rencontrés et que vous avez rappelés à grands traits, ainsi que du poids
financier estimé d'une démarche qui pourrait enfin aboutir, les crédits
nationaux supplémentaires exceptionnels, non chiffrés à ce stade, qui sont sur
le principe sollicités, doivent au préalable être précisément évalués et ne
peuvent provenir d'une seule source budgétaire ministérielle. Si la réunion
d'un CIADT par le Premier ministre paraît une procédure inadaptée en l'espèce,
une réunion interministérielle sous l'égide de la DATAR, récemment rebaptisée et
renforcée, afin de dégager des solutions financières réalistes, peut en revanche
être envisagée, en liaison bien sûr avec la préfecture de région. C'est dans
cette direction que nous pourrions travailler sur ce dossier interministériel
auquel mon collègue est très sensible. Mme la présidente. La
parole est à M. Patrick Roy. M. Patrick Roy. Je vais
immédiatement m'engouffrer dans les pistes que vous me proposez, monsieur le
secrétaire d'État. Comme vous l'avez dit, les sommes en jeu sont considérables,
mais je tiens à revenir sur une contrevérité : la reconquête commence seulement,
car rien n'a été fait concrètement depuis trente ans, hormis quelques vagues
réunions. Les choses commencent donc maintenant et nous souhaitons ne pas
pouvoir dire, dans vingt ans : cela fait cinquante ans que rien n'est fait. Je
vais interpeller les services de l'État pour que nous puissions sortir par le
haut de cette triste situation.
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