Texte de la REPONSE :
|
La loi de modernisation de l'économie (LME) du 4 août 2008 est venue compléter la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) qui fixait notamment les délais de paiement supplétifs au trentième jour suivant la date de réception des marchandises mais laissait toute liberté aux parties pour convenir contractuellement de délais différents. L'enjeu de la nouvelle législation instaurant un plafonnement des délais conventionnels est de permettre de transférer 110 MdEUR vers les entreprises créancières, d'après une étude récente de la Banque de France, étant observé qu'avec des dettes fournisseurs s'élevant à 99 MdEUR, l'allègement de la charge nette de trésorerie pour les entreprises dans leur ensemble s'établirait à 11 MdEUR. Depuis le 1er janvier 2009, tout nouveau contrat ne peut prévoir des délais de paiement qui excéderaient 45 jours fin de mois ou 60 jours nets à compter de la date d'émission de la facture. Toutefois, un dispositif particulier de dérogation temporaire a été mis en place pour prendre en compte la difficulté que peuvent connaître certains secteurs dans l'application de cette loi. Ainsi, 39 accords ont été conclus dans différents secteurs d'activité ayant donné lieu à ce jour à 34 décrets d'homologation (disponibles sur le site Internet de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes [DGCCRF]). La DGCCRF a diligenté une vaste enquête nationale en 2009, reconduite en 2010, qui visait à vérifier les conditions d'application des nouvelles dispositions relatives aux délais de paiement. Les résultats de l'enquête 2010 ne sont pas encore disponibles, mais le bilan de l'année 2009 qui a pu être dressé est très satisfaisant. À l'occasion de l'enquête 2009, 929 entreprises ont été contrôlées. Ces entreprises relèvent essentiellement des activités de production et de services (81 %), le reliquat portant sur des enseignes de la grande distribution. Les résultats permettent de recenser à ce jour : 259 notifications d'information réglementaire ; 126 rappels de réglementation qui exigent un second contrôle dans un délai rapproché ; 26 projets de procès-verbaux pour dépassements des délais de paiement réglementés et non-respect des règles de facturation ; un projet d'assignation devant les juridictions civiles. Selon la nature des manquements, la répartition est la suivante : 11 % de signalements pour des dépassements des délais légaux ; 10 % de signalements pour des dépassements des délais réglementés ; 20 % de signalements pour des infractions aux règles de la facturation. Le bilan montre que les professionnels ont été sensibilisés très tôt à ce sujet par une importante communication effectuée autour de la LME et respectent globalement ses nouvelles dispositions puisque les manquements constatés n'ont concerné que 11 % des entreprises contrôlées sur un échantillon de 929 entreprises. Encore convient-il d'observer que ce taux est affecté par les mauvais résultats enregistrés au niveau des Antilles (Guadeloupe et Martinique), où les anomalies, relevées dans la totalité de l'échantillon contrôlé, représentent 20,2 % des signalements nationaux. Il résulte de ce constat qu'une baisse des délais de paiement est effectivement intervenue entre 2008 et 2009 et est ressentie comme telle par les opérateurs sachant que les délais de paiement moyens étaient de 67 jours dans une période récente. En outre, nombre des dépassements s'avèrent souvent non significatifs puisque compris entre 2 et 5 jours par rapport au plafond LME, ce qui ne caractérise pas véritablement un déséquilibre avéré de la relation commerciale. En revanche, des dépassements de délais de paiement plus importants ont pu être observés dans des secteurs d'activité interindustriels ciblés qui sont confrontés à des difficultés économiques structurelles : équipementiers automobiles, travail temporaire, formation professionnelle, vente par correspondance, nettoyage industriel et réparation multisecteur. Dans le secteur de la grande distribution, les contrôles opérés n'ont généralement pas mis en évidence de dépassements significatifs des délais de paiement légaux, les quelques dépassements concernent plutôt les réseaux de franchisés indépendants et une enseigne de grand magasin. Des manquements ponctuels sont aussi observés auprès de certaines enseignes intégrées sans qu'on ait pu y voir une politique délibérée de ces enseignes. En tout état de cause, ces dépassements ont justifié un approfondissement des enquêtes auprès des centrales d'achat dont les résultats seront connus ultérieurement alors que le respect des délais légaux de la part de la grande distribution ne signifie pas nécessairement le respect des délais contractuels. Par ailleurs, un volet important de l'enquête a été consacré aux secteurs concernés par des accords dérogatoires. Si quelques anomalies ont été relevées, le constat du respect des délais issus des accords dérogatoires n'est pas remis en cause. La principale difficulté signalée porte sur la pression qu'exercent certains clients sur leurs fournisseurs pour appliquer les délais dérogatoires maximaux contre la volonté des mêmes fournisseurs d'appliquer les délais légaux de droit commun. La position de l'administration est de considérer en la matière que les accords ont pour objet de permettre aux créanciers, qui le souhaitent d'accorder des délais de paiement supérieurs aux plafonds légaux à leurs débiteurs et non d'autoriser ces derniers à imposer des délais de paiement à leurs créanciers. Pour autant, certains fournisseurs ont dû se résoudre à consentir les délais dérogatoires pour ne pas perdre un marché. Cette situation se rencontre dans les secteurs où les clients sont en position de force tels les secteurs du bricolage, du sport, du textile et du bâtiment et des travaux publics. Enfin, les secteurs dans lesquels existe une réglementation spécifique des délais de paiement fixant des délais plus courts concentrent un nombre de manquements dont les plus graves devraient donner lieu à des procédures, contentieuses pénales (26 projets de procès-verbaux). Ainsi, des retards pouvant atteindre jusqu'à 77 jours, voire 105 jours en Guadeloupe, ont été observés en matière de produits alimentaires périssables et de viandes fraîches. Hormis le cas de ce département ultramarin où les dépassements concernent exclusivement la grande distribution, les manquements constatés en métropole sont majoritairement le fait de petits commerçants et de restaurateurs. La grande distribution métropolitaine paraît plus attentive au respect des délais réglementés, même si des dépassements sont encore constatés ici et là. Ce retard, d'ampleur moindre, peut avoir aussi pour origine l'émetteur de la facture, tel cet industriel de l'agro-alimentaire qui appliquait à sa clientèle professionnelle le nouveau délai légal conventionnel au lieu du délai réglementé. S'agissant du secteur des transports routiers, les retards de paiement des donneurs d'ordre restent encore assez nombreux et d'ampleur relativement conséquente puisque ceux-ci peuvent aller jusqu'à 50 jours. Ces retards ont plusieurs causes : une mauvaise application de la facture récapitulative avec un point de départ du délai de paiement fixé à la dernière facture, un envoi de chèques de règlement le jour de l'échéance de sorte que le prestataire de service ne peut pas les encaisser dans le délai de 30 jours, quand il ne s'agit pas tout simplement d'un règlement délibéré hors délai. L'enquête 2009 de la DGCCRF a ainsi montré que la LME a reçu un accueil globalement positif des professionnels s'agissant de son volet sur les délais de paiement. Les résultats de l'enquête 2010, à vocation moins pédagogique et plus répressive, seront connus début 2011.
|