FICHE QUESTION
13ème législature
Question N° : 90  de  M.   Gaultier Jean-Jacques ( Union pour un Mouvement Populaire - Vosges ) QOSD
Ministère interrogé :  Santé, jeunesse et sports
Ministère attributaire :  Santé, jeunesse et sports
Question publiée au JO le :  08/01/2008  page :  118
Réponse publiée au JO le :  09/01/2008  page :  14
Rubrique :  sang et organes humains
Tête d'analyse :  produits humains
Analyse :  dons de moelle osseuse. développement
Texte de la QUESTION : M. Jean-Jacques Gaultier souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur la situation de la greffe et du don de moelle osseuse en France. Pour les malades atteints de leucémie ou de graves maladies du sang qui touchent indifféremment les enfants et les adultes, la greffe est en effet le traitement de la dernière chance, l'ultime espoir de guérison en apportant les précieuses cellules souches nécessaires à la formation de nouvelles cellules sanguines. À l'heure actuelle, près de 1 200 interventions de ce type sont réalisées chaque année dans notre pays, soit à partir de donneurs familiaux, un frère ou une soeur, soit à partir de volontaires compatibles issus du fichier national ou des 56 fichiers étrangers de donneurs volontaires de moelle osseuse qui regroupent en tout 11 millions de donneurs potentiels. Alors que la France était pionnière dans le domaine des greffes de moelle osseuse dans les années 1980, de nombreux malades sont aujourd'hui sur liste d'attente et l'état actuel du fichier national de donneurs est très inférieur aux besoins : il y a 150 000 inscrits seulement, c'est-à-dire deux fois moins de donneurs qu'en Italie, quatre fois moins qu'en Grande-Bretagne et vingt fois moins qu'en Allemagne ! Que l'on considère le nombre absolu, le nombre relatif par rapport à la population du pays, ou le taux d'accroissement, notre fichier est l'un des plus faibles au monde ! C'est pourquoi l'Agence de biomédecine, sous l'impulsion de son prédécesseur à ce poste, M. Douste-Blazy recherche de nouveaux donneurs en programmant un plan d'action sur dix ans visant à recruter 100 000 nouveaux volontaires dans les dix années à venir, au rythme de 10 000 donneurs supplémentaires par an. Si l'intention est louable, elle est notoirement insuffisante, puisque l'Allemagne recrute en quatre mois ce que nous prévoyons sur dix ans ! Il faut bien comprendre qu'il n'existe qu'une chance sur 1 million pour que deux personnes aient un groupe tissulaire compatible, c'est à dire la nécessité d'augmenter le nombre de volontaires inscrits, ainsi que la diversité des phénotypes représentés, ces véritables cartes d'identités tissulaires. En raison des insuffisances des plans de recrutement prévus (10 000 donneurs par an) et face aux carences de notre registre national, très peu de greffes non apparentées sont réalisées et très peu de greffes issues de donneurs français, alors que les Allemands greffent 80 % de leurs malades avec un donneur allemand ; la France n'offre donc pas les meilleurs chances thérapeutiques aux malades qui justifient d'une greffe de moelle osseuse. Il lui demande donc quelles sont ses intentions pour améliorer cette situation, quelles seront les crédits alloués à l'Agence de biomédecine et quelles seront ses actions en terme d'accueil ou de stratégie d'analyses biologiques pour accueillir de nouveaux donneurs potentiels.
Texte de la REPONSE :

SITUATION DE LA GREFFE ET DU DON DE MOELLE OSSEUSE

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Gaultier, pour exposer sa question, n° 90, relative à la situation de la greffe et du don de moelle osseuse.
M. Jean-Jacques Gaultier. Madame la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, je tiens à appeler votre attention sur la situation de la greffe et du don de moelle osseuse en France. Pour les malades atteints de leucémies ou de graves maladies du sang - comme les lymphomes, myélomes ou aplasies -, qui touchent indifféremment les enfants et les adultes, la greffe est souvent le traitement de la dernière chance, l'ultime espoir de guérison en apportant les précieuses cellules souches nécessaires à la formation de nouvelles cellules sanguines.
À l'heure actuelle, près de 1 200 interventions de ce type sont réalisées chaque année dans notre pays, à partir de donneurs familiaux - un frère ou une soeur - ou de volontaires compatibles issus du fichier national ou des 56 fichiers étrangers de donneurs volontaires de moelle osseuse, qui regroupent en tout 11 millions de donneurs potentiels.
Alors que la France était pionnière dans le domaine des greffes de moelle osseuse dans les années 1980, de nombreux malades sont aujourd'hui sur liste d'attente et l'état actuel du fichier national de donneurs est très inférieur aux besoins. Il ne compte en effet qu'environ 150 000 inscrits, c'est-à-dire deux fois moins de donneurs qu'en Italie, quatre fois moins qu'en Grande-Bretagne et vingt fois moins qu'en Allemagne. Que l'on considère le nombre absolu, le nombre relatif par rapport à la population du pays ou le taux d'accroissement, notre fichier est l'un des plus faibles au monde. C'est pourquoi l'Agence de biomédecine, sous l'impulsion de votre prédécesseur à ce poste, M. Douste-Blazy, a entrepris de chercher de nouveaux donneurs en programmant un plan d'action sur dix ans visant à recruter 100 000 nouveaux volontaires dans les dix années à venir, au rythme de 10 000 donneurs supplémentaires par an.
Si l'intention est louable, elle est notoirement insuffisante, puisque l'Allemagne recrute en quatre mois ce que nous prévoyons sur dix ans. Il faut bien comprendre qu'il n'existe qu'une chance sur un million pour que deux personnes aient un groupe tissulaire compatible : c'est dire la nécessité d'augmenter le nombre de volontaires inscrits comme la diversité des phénotypes représentés, ces véritables cartes d'identités tissulaires. En raison des insuffisances des plans de recrutement prévus - 10 000 donneurs par an - et face aux carences de notre registre national, très peu de greffes non apparentées sont réalisées et très peu sont issues de donneurs français, alors que les Allemands greffent 80 % de leurs malades à partir d'un donneur allemand. La France n'offre donc pas les meilleures chances thérapeutiques aux malades qui justifient d'une greffe de moelle osseuse.
En tant que député, mais aussi en tant que médecin, je vous demande donc, madame la ministre, quelles sont vos intentions pour améliorer cette situation, quels seront les crédits alloués à l'Agence de biomédecine et quelles seront ses actions en termes d'accueil et de stratégie d'analyses biologiques pour accueillir de nouveaux donneurs potentiels.
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le président, madame et messieurs les députés, monsieur le député Jean-Jacques Gaultier, je profite de cette intervention pour prier M. Jacques Le Guen de m'excuser de ne pas pouvoir répondre personnellement à la question qu'il posera tout à l'heure, car je suis attendue pour présider le jubilé des CHU - où je suis d'ailleurs déjà très en retard. J'ai, monsieur Le Guen, confié à M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, le soin de répondre à votre question sur mes indications très précises.
Monsieur Gaultier, le registre français de donneurs de moelle compte actuellement plus de 150 000 donneurs, avec un objectif de 240 000 donneurs, afin de greffer un patient sur deux à partir d'un donneur français, pour des raisons évidentes de proximité. Cette obligation relativise aussi les projets de directive européenne sur ce sujet. Pour aider au recrutement de plus de 10 000 nouveaux donneurs à inscrire chaque année sur le fichier français, l'Agence de biomédecine mène une campagne de recrutement de volontaires au don de moelle osseuse sur trois ans.
Cet objectif quantitatif s'accompagne d'un objectif qualitatif, puisque la priorité est aussi de rééquilibrer le fichier national, dans lequel certaines populations sont sous-représentées. Dans le cadre de cette campagne, il s'agit également pour l'Agence de biomédecine de rectifier les idées fausses qui peuvent circuler dans le grand public en faisant progresser les connaissances, notamment sur le don et la greffe de moelle osseuse, afin d'installer durablement ce sujet de santé publique dans les médias. Dans cette perspective, l'Agence de biomédecine a déjà diffusé plusieurs millions d'exemplaires d'un document d'information destiné au grand public, qui peut être commandé sur le site Internet de l'Agence ou en appelant gratuitement son numéro vert.
Au 28 décembre 2007 - le bilan vient d'être fait -, le nombre de nouveaux donneurs inscrits sur le registre " France Greffe de moelle " s'élève à 17 082, chiffre qui témoigne de l'effort soutenu de l'ensemble des partenaires impliqués, et notamment de l'Établissement français du sang - l'EFS. Ces objectifs sont reconduits pour 2008. Dans cette optique, l'Agence a retenu en décembre 2007, à l'instar de ce qui se pratique pour d'autres registres internationaux, le principe d'alléger certains examens biologiques demandés lors de l'inscription des donneurs et de procéder à un typage d'histocompatibilité HLA de plus grande précision, qui permettra de gagner du temps dans l'identification du donneur compatible.
Pour ce qui concerne les fichiers allemand et français de volontaires au don de moelle osseuse, il est exact que des stratégies différentes sont à l'oeuvre. Si, en Allemagne, le recrutement mené est massif, il ne relève pas d'une stratégie nationale, mais est le fait isolé d'un centre donneur privé. Avec 2,5 millions de donneurs, ce fichier comprend de nombreux profils génétiques identiques, dont la fréquence n'apporte aucun gain thérapeutique. La diversité de la population y est ainsi moins bien représentée que dans le fichier français. Comme vous le savez, monsieur le député, puisque vous êtes médecin, quantité ne signifie pas toujours qualité. Qui plus est, 20 % des donneurs inscrits dans le fichier allemand ne sont pas joignables lorsqu'ils sont sollicités. En France - c'est important -, le nombre de défections lors de l'identification d'un donneur potentiel sur le fichier français est inférieur à 5 %. Il y a donc peu de " perdus de vue ". En outre, les donneurs se révèlent aptes au don lorsqu'ils sont appelés.
À ce propos, je tiens à souligner que la proportion de patients français greffés à partir d'un donneur non apparenté provenant du registre de son pays est de 25 %. Cette proportion est certes de 75 % pour un receveur allemand, mais il faut nuancer cette comparaison en rappelant que les greffeurs allemands sont les seuls à ne pas exiger une compatibilité plus sélective, contrairement aux pratiques en vigueur en France, en Autriche, aux États-Unis, en Italie ou en Suisse.
Enfin, il convient de préciser que l'évolution des greffes allogéniques en France est en hausse. L'activité d'allogreffes de cellules souches hématopoïétiques, sur laquelle je reviendrai dans un instant, est en augmentation, et particulièrement celle qui recourt à des donneurs non apparentés. En 2007, plus de 1 300 allogreffes auront été réalisées, dont un peu plus de la moitié à partir d'un donneur non apparenté, incluant les donneurs de moelle et de cellules souches périphériques et les greffons de sang placentaire.
Je tiens à souligner la part croissante des greffes de sang de cordon ombilical, qui ont représenté en 2007 environ 20 % des greffes allogéniques. Cette voie, dans laquelle la France est pionnière, puisque la première greffe de sang placentaire a été réalisée à Paris et que la France reste le premier pays européen à y recourir, avec plus de 800 greffes réalisées au total dans notre pays depuis 1988, ne remplace pas à ce jour la greffe à partir d'un donneur non apparenté, mais constitue une alternative qui permet de greffer davantage de patients.
Pour ce qui est des aspects financiers, sur lesquels vous m'avez interpellée, je rappelle que le budget de l'Agence de biomédecine a été abondé au 1er janvier 2005 de 2,5 millions d'euros de crédits destinés à étendre le fichier des donneurs de moelle et à développer les banques d'unités de sang placentaire. En 2007, l'Agence y consacre 3,5 millions d'euros, ce qui met en évidence la détermination du Gouvernement à accroître au plus vite le nombre de donneurs inscrits.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Gaultier.
M. Jean-Jacques Gaultier. Je me félicite, madame la ministre, de cette réponse et de la volonté du Gouvernement de permettre que la générosité des Français soit la même que celle de tous les citoyens européens. En une seule soirée de sensibilisation, en effet, plus de cinquante personnes se sont inscrites volontairement sur le fichier, et je vous remercie de cette action.
Je dédierai cette question à un ami actuellement sur son lit d'hôpital, qui vient de recevoir une greffe à partir d'un greffon venu d'Israël...

UMP 13 REP_PUB Lorraine O