14ème législature

Question N° 101149
de M. Philippe Folliot (Union des démocrates et indépendants - Tarn )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > propriété

Tête d'analyse > multipropriété

Analyse > temps partagé. réglementation.

Question publiée au JO le : 06/12/2016 page : 9916
Réponse publiée au JO le : 04/04/2017 page : 2756
Date de changement d'attribution: 20/12/2016

Texte de la question

M. Philippe Folliot attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la loi du 6 janvier 1986 qui a créé le statut d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. Ces sociétés d'accession en « multipropriété » ont pour objectif de permettre à de nombreuses familles à revenus modestes, de partir en vacances sur un lieu touristique ou un autre par échange. Or selon de nombreuses associations, ce droit acquis serait très aléatoire et ce statut serait à la fois générateur d'abus et d'injustices profitant aux propriétaires des immeubles de contentieux de plus en plus nombreux et lourds pour des familles modestes. Pour les acteurs du secteur, il serait donc urgent d'agir car les acquéreurs de parts en jouissance se retrouveraient dans des situations complexes : charges exorbitantes et incapacité de les payer, situation famille et sociale difficile ; décès des ayants droits ; baux invendables, etc. Ils souhaiteraient que la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 soit amendée en faisant en sorte que la société d'attribution immobilière en jouissance à temps partagée soit propriétaire d'un bien immobilier fini et assure la gérance de ce bien avec l'objectif de pérenniser son objet social ; l'objet social de la société d'attribution immobilière en jouissance à temps partagé ne puisse être altéré par un vote de majorité en assemblée générale des actionnaires ; les propriétaires fonciers de la société d'attribution immobilière soient garant de l'objet social ; la société d'attribution immobilière en jouissance à temps partagé doit constituer un fonds de roulement à hauteur de 25 % des parts de la société, afin de garantir la pérennité de l'ouvrage et de l'objet social. Ainsi, il lui demande quelle est sa position à ce sujet et ce que le Gouvernement entend faire afin de faire évoluer le droit pour protéger les familles modestes et répondre à leurs inquiétudes.

Texte de la réponse

La loi du 24 mars 2014, pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), a apporté de nombreuses modifications à la loi du 6 janvier 1986, relative aux sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. Ces modifications ont pour finalité d'équilibrer le fonctionnement des sociétés d'attribution et de prévenir la plupart des abus anciennement constatés. Ainsi, en vue d'équilibrer la gestion de ces sociétés,l'article 18 de la loi du 6 janvier 1986 a été modifié afin de renforcer les pouvoirs du conseil de surveillance et d'accroître le contrôle exercé par les associés. Le conseil de surveillance peut désormais prendre connaissance et copie de toute pièce se rapportant à la gestion de la société. Ses membres sont maintenant élus pour une durée maximale de trois ans renouvelables, nonobstant toute disposition contraire des statuts, et le conseil doit rendre compte annuellement de l'exécution de sa mission à l'assemblée générale. Par ailleurs, l'article 13 de la loi du 6 janvier 1986 a été modifié afin que soit reproduite, dans les convocations à l'assemblée générale, la mention selon laquelle tout associé peut obtenir la communication des comptes sociaux et de certaines informations nominatives sur les autres associés. Afin de renforcer les droits des associés lorsque l'immeuble objet du droit de jouissance est inclus dans une copropriété, l'article 17 de la même loi dispose à présent que les sociétés de temps partagé sont représentées à l'assemblée du syndicat par toute personne désignée par l'assemblée générale nonobstant toute disposition contraire des statuts. La personne désignée doit par ailleurs rendre compte des décisions prises par le syndicat des copropriétaires lors de l'assemblée générale postérieure. Enfin, les conditions de retrait des associés ont été assouplies par l'article 19-1 de la loi du 6 janvier 1986, qui prévoit le retrait de droit lorsque les parts sociales ont été transmises par succession depuis moins de deux ans à compter de la demande. En outre, la liste des justes motifs de retrait a été élargie. Le juge peut désormais autoriser le retrait notamment lorsque l'associé est bénéficiaire des minima sociaux ou perçoit une rémunération inférieure au salaire minimum interprofessionnel de croissance. Il est difficile d'évaluer la fréquence de situation de manœuvres frauduleuses engagées par le propriétaire de l'immeuble afin d'augmenter indûment le montant des charges n'avait pas été évoquée par les associations de consommateurs auditionnées. En toute hypothèse, prévoir un transfert de propriété de l'immeuble au profit de la société d'attribution une fois la construction achevée reviendrait à en exproprier le propriétaire. Afin de respecter le statut constitutionnel du droit de propriété, une telle mesure devrait être justifiée par un objectif d'intérêt général, et serait conditionnée par le versement d'une juste et préalable indemnité à la charge de la société. Par ailleurs, la création d'un fonds de roulement ne paraît pas constituer un moyen de protection efficace contre l'accroissement des charges, dès lors que ce fonds devrait être alimenté par les associés eux-mêmes. Il convient en outre de rappeler que la création d'un fonds de travaux est déjà obligatoire dans les conditions prévues par l'article 17-1 de la loi du 10 juillet 1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis lorsque les conditions d'application de ce texte sont réunies. Il apparaît à ce stade nécessaire d'évaluer les effets attendus des modifications du droit positif issues de la loi ALUR avant d'envisager de réformer à nouveau le statut des sociétés civiles d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. D'éventuels agissements frauduleux sont par ailleurs susceptibles d'être réprimés sur le fondement de l'article L. 313-1 du code pénal si les éléments constitutifs du délit d'escroquerie sont constitués.