14ème législature

Question N° 1356
de M. François Rochebloine (Union des démocrates et indépendants - Loire )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > professions de santé

Tête d'analyse > médecins

Analyse > effectifs de la profession. répartition géographique.

Question publiée au JO le : 22/03/2016
Réponse publiée au JO le : 30/03/2016 page : 2458

Texte de la question

M. François Rochebloine attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la répartition très inégale des professionnels de santé en France métropolitaine. Il en découle en effet que dans certaines régions, les délais imposés aux patients peuvent être anormalement longs, ce qui pose de réels problèmes en particulier pour les personnes qui ont du mal à se déplacer et réduit à néant les efforts de prévention. Il lui cite le cas du département de la Loire, qui connaît une situation très contrastée selon les bassins de vie, l'agence régionale de santé ayant pour sa part classé en zones médicales sensibles presque la moitié du territoire départemental. Pour certaines spécialités médicales comme l'ophtalmologie ou la dermatologie, il observe que les professionnels partant en retraite ne sont pas remplacés comme c'est le cas par exemple sur le secteur de la vallée du Gier (80 000 habitants). Ainsi, même certaines zones urbaines non enclavées sont touchées aujourd'hui par un phénomène récurrent, et pourtant signalé de longue date. Il tient en conséquence à lui faire part de ses vives préoccupations quant au développement du processus de désertification médicale, les mesures prises à ce jour n'ayant manifestement pas permis d'inciter de jeunes praticiens à prendre la relève. Aussi, face à l'urgence de ce problème, il lui demande de bien vouloir lui préciser les dispositions que le Gouvernement entend prendre.

Texte de la réponse

DÉSERTIFICATION MÉDICALE DANS LA LOIRE


Mme la présidente. La parole est à M. François Rochebloine, pour exposer sa question, n°  1356, relative à la désertification médicale dans la Loire.

M. François Rochebloine. Avec cette question qui s'adresse à Mme la ministre de la santé, je souhaite dénoncer une situation connue et pourtant inadmissible. Je veux parler des difficultés qu'éprouvent de très nombreux patients du département de la Loire face au manque de professionnels dans certaines spécialités médicales. Ce problème est, hélas ! récurrent depuis de nombreuses années. J'ai déjà eu l'occasion d'en parler ici même dès 2010, mais je constate malheureusement que rien ne semble avoir changé. Or, les besoins de santé n'ont fait que croître, notamment sous l'effet du vieillissement de la population.

Quand il ne reste dans un territoire que, dans le meilleur des cas, l'offre hospitalière, on peut aisément imaginer la gêne éprouvée par les assurés qui n'ont pas la chance de pouvoir se déplacer facilement et d'accéder à des spécialistes installés dans des zones plus favorisées. On parle souvent, et avec raison, de la désertification médicale en milieu rural, mais il convient de souligner que ce phénomène touche désormais certaines zones urbaines dites fragiles. En France, il existe une réelle fracture entre les territoires, du fait d'une répartition très inégale de la démographie médicale, ce qui montre que l'État n'a pas joué son rôle.

Pour illustrer mon propos, je voudrais citer le cas de la vallée du Gier, un bassin de vie d'un peu moins de 80 000 habitants, et de la ville de Saint-Chamond, qui compte 36 000 habitants. Le dernier praticien en ophtalmologie va cesser son activité très prochainement, sans être remplacé. Ce sera la même chose en dermatologie puisque, après un départ en retraite également non remplacé, il ne reste plus qu'un seul praticien dans la ville voisine de Rive-de-Gier.

Dans ces conditions, les délais de consultation s'allongent et les efforts de prévention sont réduits à néant, puisque seules les situations d'urgence peuvent être prises en considération. Le désert médical est devenu une réalité pour un trop grand nombre de territoires. Nos concitoyens ne l'acceptent plus, et ils ont raison. Quelle réponse concrète pouvez-vous leur adresser ? Quelles dispositions entendez-vous prendre ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le député, améliorer l'accès aux soins et réduire les inégalités entre les territoires sont bien des objectifs prioritaires du Gouvernement. Le pacte territoire-santé que Marisol Touraine a lancé fin 2012 est là pour l'attester. Ce programme mobilise un ensemble de leviers, de la formation aux conditions d'exercice, pour attirer les jeunes médecins notamment dans les territoires manquant de professionnels.

Avec trois ans de recul, nous constatons que les résultats sont là. Le pacte a impulsé une nouvelle dynamique. C'est la raison pour laquelle Marisol Touraine a annoncé fin 2015 un « pacte territoire-santé 2 », enrichi de mesures innovantes.

Je vais vous donner quelques exemples éclairants de cette politique. La réalisation de stages au cours de la formation est essentielle pour faire connaître et apprécier l'exercice en cabinet, entre autres, dans les territoires manquant de médecins. La ministre a pris des engagements pour généraliser leur pratique en médecine générale pour tous les étudiants de deuxième cycle. Cet effort portera également sur les stages ambulatoires dans d'autres spécialités, dont celles que vous évoquez : la dermatologie ou l'ophtalmologie.

Le contrat d'engagement de service public propose une bourse aux jeunes en formation – futurs médecins ou dentistes – en contrepartie d'une installation dans un territoire manquant de professionnels. Plus de 1 700 étudiants ou internes se sont déjà engagés.

Le contrat de praticien territorial de médecine générale – PTMG – vient quant à lui sécuriser les deux premières années d'installation des jeunes médecins, en leur offrant une garantie de ressources et une protection sociale améliorée. Il a permis l'installation de 570 professionnels dans des territoires manquant de médecins.

Enfin, les projets d'exercice coordonné sont une réponse concrète aux attentes des professionnels, notamment des jeunes, de travailler autrement. Près de 800 maisons de santé pluriprofessionnelles – les MSP – fonctionnent actuellement, contre 174 en 2012.

Dans votre département, monsieur le député, la mobilisation est aussi au rendez-vous. En collaboration étroite avec ses partenaires, l'agence régionale de santé – l'ARS – a soutenu l'ouverture de cinq MSP auxquelles s'ajoutent sept projets en cours. Grâce au contrat PTMG, douze médecins se sont installés dans la Loire. Votre impatience est légitime, mais c'est bien dans la durée que nous mesurerons la portée de nos efforts.

Mme la présidente. La parole est à M. François Rochebloine.

M. François Rochebloine. Madame la secrétaire d'État, je suis vraiment désolé de vous le dire, mais je crois que vous n'avez pas du tout répondu à ma question. Vous avez évoqué la dermatologie et l'ophtalmologie une seule fois, et brièvement, sans traiter véritablement de ces problèmes qui étaient le sujet de ma question.

Concernant l'ARS, je vais me permettre de vous lire très rapidement la conclusion de l'un de ses rapports daté du mois de juin 2014 : « En Rhône-Alpes, la situation démographique des ophtalmologistes paraît critique et soulève la problématique du remplacement des professionnels : 59 % des ophtalmologistes de la région sont susceptibles de partir en retraite d’ici 10 ans et la moyenne d’âge de ces médecins est de 54 ans. De plus, la densité des ophtalmologistes en Rhône-Alpes est plus faible que la densité nationale : seuls le Rhône et l'Isère ont une densité supérieure. » Ce n'est pas moi qui le dis, mais un rapport de l'ARS.

Je ne conteste pas que des efforts ont été faits d'une manière générale, mais la situation des spécialistes est absolument catastrophique. Il y a vraiment urgence !