14ème législature

Question N° 1425
de M. Camille de Rocca Serra (Les Républicains - Corse-du-Sud )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > agriculture

Tête d'analyse > revendications

Analyse > Corse. spécificités. prise en compte.

Question publiée au JO le : 26/04/2016
Réponse publiée au JO le : 04/05/2016 page : 3037

Texte de la question

M. Camille de Rocca Serra attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la poursuite de la procédure de désendettement des agricultures corses. Il rappelle que l'article 100 de la loi de finances rectificative pour 2015 introduit par voie d'amendement par le Gouvernement en décembre 2015 prévoyait que les prises en charge soient étendues aux dettes sociales dans leur ensemble jusqu'au 1er janvier 2014. L'article 100 modifiait l'article 122 de la loi de finances rectificative pour 2005 et l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 pour étendre les possibilités de prise en charge des cotisations sociales par la MSA au-delà des dispositions votées antérieurement et qui s'étaient révélées inadaptées pour pouvoir consommer l'enveloppe de 5 millions d'euros. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2015-726 DC du 29 décembre 2015, a censuré l'article pour une question de procédure, considérant qu'il s'agissait d'un cavalier budgétaire. Cette décision a de lourdes conséquences sur l'objectif de résorption de la dette sociale agricole puisque la poursuite de la politique de désendettement se trouve privée de socle juridique. Il demande au Gouvernement de réintroduire le dispositif au moyen d'un nouveau véhicule législatif.

Texte de la réponse

DETTE SOCIALE AGRICOLE EN CORSE


Mme la présidente. La parole est à M. Camille de Rocca Serra, pour exposer sa question, n°  1425, relative à la dette sociale agricole en Corse.

M. Camille de Rocca Serra. Monsieur le ministre, en 2005, je m'étais fortement impliqué auprès de Dominique Bussereau, qui occupait alors les fonctions qui sont les vôtres aujourd'hui, sur le sujet de la résorption des dettes sociale et bancaire des agriculteurs corses. Bien que cet engagement fructueux ait constitué une étape importante et décisive, il s'agissait d'un point de départ. Le dispositif de désendettement social, préalable à la relance de l'agriculture corse, prévoyait initialement l'effacement des créances de la Mutualité sociale agricole – MSA – antérieures à 1996 et la prise en charge par l'État de 50 % de la dette sociale des exploitants agricoles en activité et des retraités pour la période 1996-2004. Au 31 décembre 2004, le montant maximal de la dette sociale qui pouvait être assumé par l'État était évalué à 5,7 millions d'euros.

Afin de poursuivre la procédure de désendettement engagée, l'article 100 de la loi de finances rectificative pour 2015, introduit par un amendement du Gouvernement en décembre dernier, prévoyait que les prises en charge soient étendues aux dettes sociales dans leur ensemble jusqu'au 1er janvier 2014, à condition que la prise en charge de la dette ne soit pas supérieure à 10 000 euros et, pour les entreprises qui existaient déjà à cette date, que la dette constatée au 1er janvier 2005 fût inférieure à 10 000 euros. L'article 100 modifiait l'article 122 de la loi de finances rectificative pour 2005 et l'article 25 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015 pour étendre les possibilités de prise en charge des cotisations sociales par la MSA au-delà des dispositions votées antérieurement et qui s'étaient révélées inadaptées pour pouvoir consommer l'enveloppe de 5 millions d'euros.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n°  2015-726 DC du 29 décembre 2015, a censuré l'article pour une question de procédure, considérant qu'il s'agissait d'un cavalier budgétaire. Cette décision a de lourdes conséquences sur l'objectif de résorption de la dette sociale agricole, puisque la poursuite de la politique de désendettement se trouve privée de socle juridique. L'avenir de l'agriculture insulaire, qui regorge de potentialités, implique une volonté politique forte pour assainir la situation sociale et permettre aux professionnels de se concentrer sur le développement d'exploitations viables et de productions de qualité.

Monsieur le ministre, je vous ai sollicité par courrier le 21 janvier dernier pour vous demander de réintroduire le dispositif au moyen d'un nouveau véhicule législatif. Aujourd'hui encore, je vous demande de prendre un engagement en ce sens afin de concrétiser cette dernière étape du processus de désendettement agricole.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le député, c'est un sujet que je connais bien car il ne date pas d'aujourd'hui. Il faut le régler avec méthode : constance dans les objectifs et mobilisation des moyens de l’État.

Suite à un rapport inter-inspection – Inspection générale des affaires sociales, Inspection générale des finances et Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux – rendu début 2014 constatant l'échec relatif du précédent plan de désendettement décidé en 2005, une feuille de route interministérielle a été définie, adossée à la mobilisation d'une enveloppe de 5 millions d'euros de prise en charge de cotisations sociales, pour enclencher le processus de désendettement. Cette feuille de route s'est traduite par une disposition votée fin 2014 en loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, afin d'apporter une réponse à l'ensemble des anciens débiteurs, c'est-à-dire affiliés à la MSA avant le 1er janvier 2005.

Dans le cadre de cette feuille de route, l'année 2015 a été marquée par plusieurs avancées. Premièrement, une information régulière de la profession agricole sur l'avancée des travaux et l'organisation d'un Comité de suivi et de coordination sous la présidence du préfet. Je tiens à souligner que ce préfet a réalisé un travail tout à fait conforme aux engagements que j'avais pris à ce sujet. Deuxièmement, un travail important de fiabilisation des données sur le montant et la nature des dettes constituées, étape essentielle et préalable au traitement des dossiers au cas par cas. Troisièmement, une action importante portée par la caisse locale de la MSA pour améliorer ses procédures de recouvrement sur l'encours, notamment en renforçant les étapes amiables en amont du recouvrement forcé. Enfin, un premier bilan des dossiers traités a été établi : admissions en non-valeur et remises de majoration et de pénalités de retard pour 9,9 millions d'euros au bénéfice de 4 834 débiteurs et prise en charge de 786 000 euros de dette pour 280 débiteurs. Nous avons donc avancé sur le sujet.

Comme vous le soulignez, afin de poursuivre le processus de désendettement et de mobiliser l'enveloppe de 5 millions d'euros allouée, le Gouvernement a souhaité également porter des améliorations au cadre législatif par un article voté fin 2015 en loi de finances rectificative, qui a été censuré par le Conseil constitutionnel au motif que ce serait un cavalier budgétaire.

Ma réponse est très claire : pour poursuivre ce travail et mobiliser cette enveloppe de 5 millions d'euros, il faudra introduire un article spécifique dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. Toutefois, sans attendre le vote de ce dernier en fin d'année, et afin de ne pas bloquer tout le processus en 2016, la MSA recevra prochainement des instructions lui permettant de commencer à traiter les dossiers. Sur ces bases, l'ensemble des 550 dossiers d'anciens débiteurs, représentant un total de 11 millions d'euros de dettes de cotisations légales non prescrites, devra être régularisé d'ici la fin d'année. Voilà l'engagement que je prends et qui permettra de répondre à la décision du Conseil constitutionnel tout en continuant de traiter ces dossiers. Les instructions seront données à la MSA car il faut traiter de manière claire et définitive ce sujet important.

Mme la présidente. La parole est à M. Camille de Rocca Serra.

M. Camille de Rocca Serra. J'espère que nos agriculteurs seront rassurés et que la MSA pourra dès maintenant engager la procédure, en anticipant l'adoption du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. J'espère également que, grâce à cette confiance retrouvée, nos agriculteurs pourront se consacrer totalement à leur production, car leur métier est de produire, sans avoir à se préoccuper constamment de répondre à des contraintes administratives, que nous avons décidé ensemble de lever.