14ème législature

Question N° 3212
de M. Gérald Darmanin (Les Républicains - Nord )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > immigration

Analyse > politiques communautaires. perspectives.

Question publiée au JO le : 15/10/2015
Réponse publiée au JO le : 15/10/2015 page : 8081

Texte de la question

Texte de la réponse

CRISE MIGRATOIRE


Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin, pour le groupe Les Républicains.

M. Gérald Darmanin. Monsieur le Premier ministre, l'Europe tente de se mobiliser depuis des mois contre l'afflux massif de migrants. Si l'on peut regretter amèrement que la France, avec François Hollande, ait suivi aveuglément la position de Mme Merkel (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen),…

M. Jean Launay. Ce n'est pas bien !

M. Gérald Darmanin. …on ne peut qu'assumer les conséquences d'une telle politique. Aujourd'hui, nous avons ainsi appris avec stupéfaction dans La Voix du Nord que, devant le grand nombre de migrants présents dans les trains, la SNCF permettait à ses agents de ne pas les contrôler, voire de les laisser voyager pour zéro euro, de préférence en seconde classe. (Mêmes mouvements.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous en prie !

M. Gérald Darmanin. Non seulement la SNCF ne dément pas, mais elle semble même accepter cette décision ahurissante. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Monsieur le Premier ministre, comment accepter que des Français ou des étrangers en situation régulière paient normalement le train, alors que des migrants ou des clandestins puissent prendre le train sans payer leur ticket ? Comment accepter que le Gouvernement, qui contrôle l'entreprise publique qu'est la SNCF, ne soit pas informé ou, pire, cautionne une telle politique ? Cela revient ni plus ni moins à adresser ce message : « Prenez le train pour Calais, c'est gratuit ! »

Monsieur le Premier ministre, étiez-vous informé de cette politique de la SNCF ? L'avez-vous cautionnée ? Allez-vous aujourd'hui demander au président de la SNCF de revenir sur cette instruction ahurissante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains. – Huées sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Mme la présidente. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Darmanin, le ministre de l'intérieur aurait également pu vous répondre, mais je vous ferai une réponse plus large. Le ministère de l'intérieur a mis en place et renforcé un dispositif dans tous les trains et toutes les gares afin de lutter contre les flux migratoires utilisant la voie ferroviaire. Chaque jour, dans un contexte migratoire très difficile, plus de 200 interpellations ont lieu dans les trains et les gares, majoritairement dans le Sud et dans la région Nord-Pas-de-Calais, grâce à l'action de la brigade spécialisée de la police de l'air et des frontières.

Aucune instruction n'a été donnée à la SNCF pour relâcher ce contrôle, bien au contraire : tout voyageur doit être muni d'un titre de transport et tout le monde est soumis à la même procédure de contrôle à bord des trains, migrants inclus. L'information que vous relayez n'a donc pas de sens. Il ne faut pas croire, monsieur Darmanin, tout ce qui se dit dans la presse. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Alain Chrétien. On n'a rien inventé !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Deuxièmement, vous avez prononcé au début de votre intervention une phrase assez étrange à propos du supposé suivisme du gouvernement français à l'égard de l'Allemagne. Mettons les choses au clair. Comme le rappelait Harlem Désir, l'Europe, qu'il s'agisse de l'euro ou du dossier des migrants, doit avancer grâce à l'engagement du couple franco-allemand.

Ce sont les mêmes dans vos rangs, y compris vous, monsieur Darmanin, qui nous donnent des leçons économiques sur ce que fait l'Allemagne, en nous expliquant qu'il faudrait suivre ce pays, et qui nous accusent maintenant, sur les questions migratoires – en se trompant, qui plus est –, de je ne sais quel suivisme à l'égard de Mme Merkel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur certains du groupe écologiste.) Que je sache, monsieur Darmanin, Mme Merkel est comme vous membre du PPE. Mettez-vous d'accord avant d'accuser le Gouvernement ! (Mêmes mouvements.)

Sur la question des migrants et la crise des réfugiés, la force de la France a été sa cohérence et sa constance depuis un an, grâce notamment au travail mené par le ministre de l'intérieur. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Sur ce sujet, vous remarquez que, même si nous comprenons ce qui se passe en Allemagne, nous avons adopté d'autres choix, une autre politique et un autre message. Nous l'avons déjà dit très clairement, et je vous l'ai dit moi-même dans cet hémicycle : nous pensons que l'Europe – et donc la France – ne peut pas accueillir tous les réfugiés qui fuient la guerre en Syrie, pour des raisons évidentes.

M. Jacques Myard. Très bien !

M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est pour cela que nous avons un plan européen, suivi par l'ensemble des pays, à l'exception de deux ou trois : mise en place des centres d'accueil, renforcement des frontières avec des gardes-frontières, aide aux pays les plus concernés, comme la Jordanie, la Turquie et le Liban, ainsi que la Grèce et l'Italie. Certes, monsieur Darmanin, vous courez derrière l'extrême droite, derrière le Front national et Mme Le Pen (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), mais il n'est pas possible d'accuser celle-ci – à juste titre – de ne pas avoir été à la hauteur, et le mot est faible, d'avoir interpellé, de la manière que vous savez, le Président de la République, tout en embrassant, à l'Assemblée nationale ou sur le terrain, par exemple dans le Nord-Pas-de-Calais, les mêmes thèmes que ceux de l'extrême droite, qui consistent à mettre en permanence au cœur du débat politique le réfugié et l'immigré, en les confondant. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Le débat des régionales – car il s'agit bien de cela dans votre question –…

M. Gérald Darmanin. Ça, c'est vrai !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …révèle plus que jamais une certaine conception de la République, des valeurs et de la manière de faire de la politique ! (Applaudissements sur les mêmes bancs. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)