14ème législature

Question N° 3379
de M. Jérôme Chartier (Les Républicains - Val-d'Oise )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > terrorisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 26/11/2015
Réponse publiée au JO le : 26/11/2015 page : 9823

Texte de la question

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LE TERRORISME ET LA RADICALISATION


M. le président. La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe Les Républicains.

M. Jérôme Chartier. Monsieur le Premier ministre, hier, la ville de Domont a enterré Nicolas Catinat. Il avait trente-sept ans. J'étais présent, avec le préfet. Cette petite ville d'Île-de-France, qui compte 15 000 habitants, paie un lourd tribut suite aux attentats : un mort et deux blessés, dont l'un est toujours en réanimation. En sortant de l'église, deux sentiments m'ont saisi : la tristesse, en réalisant que cette vie avait été brisée, que ce destin s'était arrêté, et la rage, monsieur le Premier ministre, contre celles et ceux que j'entends chercher des excuses aux terroristes.

Les terroristes sont des minables, des assassins, des sanguinaires,…

M. Jean-Paul Bacquet. Des lâches !

M. Jérôme Chartier. …qui n'ont qu'un seul objectif, celui de tuer, sans la moindre idéologie. (Applaudissements sur tous les bancs.) Aucune idéologie, seulement des assassins !

Monsieur le Premier ministre, j'ai trois questions très simples. Pouvez-vous nous dire si tout a été fait depuis le mois de janvier dernier pour prévenir la menace terroriste ? Par ailleurs, vous l'avez dit hier, 10 500 personnes sont suivies par vos services pour radicalisation. Pouvez-vous nous dire combien de ces personnes travaillent aujourd'hui dans des entreprises de service public ? Enfin, la semaine dernière, Valérie Pécresse a proposé que l'on puisse accorder à ces entreprises de service public la possibilité de licencier les personnes radicalisées. Êtes-vous d'accord avec cette proposition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Chartier, vous avez raison de rappeler que cette semaine, mais également dans les jours à venir, le pays tout entier – et d'abord, bien sûr, les familles et les proches des victimes, des tués comme des blessés – vivra en communion républicaine, une communion républicaine mais chacun, dans son intimité, avec ses croyances, cette douleur.

Vendredi prochain, dans quarante-huit heures, c'est la nation tout entière qui rendra hommage à l'ensemble des victimes. Chacun d'entre nous, par le biais d'une connaissance directe ou indirecte, aura aussi l'occasion d'accompagner à des obsèques des amis, des proches de ces victimes. Vendredi, le Président de la République le souhaite, la nation, en accrochant, en brandissant aux fenêtres, d'une manière ou d'une autre, le drapeau tricolore devra se retrouver unie.

Toutes les questions posées par la représentation nationale, par la presse, par les proches des victimes et par les Français sont légitimes. Nous avons connu une telle attaque, une telle violence de la part d'une organisation terroriste – d'une armée terroriste, puisque nous sommes en guerre, comme nous le rappellerons tout à l'heure à l'occasion du débat sur la Syrie – qui veut tuer, qui tue des hommes et des femmes, des jeunes, parce que nous sommes la France, à cause de notre art de vivre, de notre mode de vie, de notre culture.

Cette organisation puise ses fondements dans le salafisme, soit dans la négation de toute culture. Cela va donc au-delà même de la destruction d'hommes et de femmes, c'est une civilisation qu'elle attaque en France, qu'elle attaque en Tunisie, qu'elle attaque aussi dans ces lieux de culture centenaires, millénaires, en Irak ou en Syrie.

M. Nicolas Dhuicq. Et la Russie ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est une mobilisation. Monsieur le député, entre toutes ces victimes, que ce soit en Tunisie, en France, hier en Belgique ou cet avion russe qui a été abattu,…

M. Nicolas Dhuicq. Ah !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …il ne peut y avoir aucune concurrence. Ce sont toutes ces civilisations qui sont concernées. La réponse doit être à la hauteur.

Vous avez souligné quelque chose qui me paraît très juste : aucune excuse ne doit être recherchée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe Les Républicains, du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. Jérôme Chartier. Très bien !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Aucune excuse sociale, sociologique ni culturelle ! Dans notre pays, rien ne justifie que l'on prenne les armes pour s'en prendre à ses propres compatriotes.

M. Pierre Lellouche. Très bien !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Bien entendu, nous savons que nous devons non seulement être impitoyables dans la lutte contre le terrorisme, mais aussi intransigeants quant à l'application des lois et des règles de la République. (Mêmes mouvements.) En cette journée, et alors que cette organisation terroriste s'attaque aussi à un fondement de ce que nous sommes – l'égalité, notamment entre les hommes et les femmes –, je veux dire combien il faut respecter les lois relatives à l'égalité entre les hommes et les femmes ainsi que la loi, qui a été votée par le Parlement, que j'ai votée, qui interdit la burqa dans l'espace public. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Monsieur le député, vous avez posé trois questions. Vous avez d'abord demandé si tout avait été fait… C'est en conscience une question évidemment difficile, car je considère, et nous considérons, que tout a été fait par mon gouvernement et que tout continuera à être fait face à la menace. Je ne veux pas rappeler ici ce que j'avais eu l'occasion d'annoncer le 13 janvier en termes de moyens pour les services de police et de gendarmerie, pour nos militaires, pour la justice et pour les services de renseignement.

Je ne veux pas rappeler la loi sur le renseignement, votée à une très large majorité et critiquée à l'extérieur de cet hémicycle comme une loi liberticide. Aujourd'hui, ce sont les mêmes commentateurs qui nous expliquent que nous n'avons pas assez fait contre le terrorisme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe Les Républicains, du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Mme Valérie Fourneyron. Tout à fait !

M. Manuel Valls, Premier ministre. La loi sur le renseignement s'applique depuis le mois d'octobre et une proposition de loi a été votée par le Parlement pour donner plus de moyens aux services de renseignement, pour suivre un certain nombre d'individus à l'extérieur de nos frontières.

Mais, en conscience, nous devons faire plus et encore davantage. C'est ce que nous disent non seulement les parlementaires, mais c'est aussi ce que les Français réclament, parce qu'ils ont peur et qu'ils ont compris, après que beaucoup d'entre nous les avons mis en garde, qu'il n'y a pas de risque zéro et que nous pouvons encore être concernés par les attentats. Alors oui, monsieur le député, nous devons continuer à tout faire et sur tous les fronts.

Pour ce qui concerne les fiches S et ces 10 500 personnes fichées par nos services de renseignement, nous savons que cet outil recense des situations très différentes. Nous devons, dans le cadre du dialogue républicain qui s'est engagé, travailler avec le ministre de l'intérieur, avec les responsables des différents groupes. Je recevrai d'ailleurs la semaine prochaine, comme nous le ferons régulièrement, les présidents des assemblées, les présidents des commissions concernées et l'ensemble des présidents des groupes.

S'agissant du problème que représentent ces individus dans les services publics, au-delà même de la question de la laïcité, il faut aller plus loin.

M. Claude Goasguen. Même dans les entreprises privées !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je pense que, sur toutes ces questions, nous devons aller plus loin et faire en sorte que ceux qui représentent aujourd'hui un danger pour la République soient poursuivis pour que nous protégions les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)