14ème législature

Question N° 3777
de M. Pierre Lellouche (Les Républicains - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger
Ministère attributaire > Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > réfugiés

Analyse > accueil. politique européenne.

Question publiée au JO le : 24/03/2016
Réponse publiée au JO le : 24/03/2016 page : 2369

Texte de la question

Texte de la réponse

ACCORD ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LA TURQUIE SUR LES MIGRANTS


M. le président. La parole est à M. Pierre Lellouche, pour le groupe Les Républicains.

M. Pierre Lellouche. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais il n'est pas là.

En pleine guerre contre le terrorisme, et alors que le Premier ministre, justement, a rappelé ce matin même l'urgence qu'il y avait à protéger les frontières extérieures de l'Union, le Président de la République française a apposé vendredi dernier la signature de la France sur un accord avec la Turquie qui apparaît comme un véritable renoncement s'agissant de la sécurité de la France.

Mme Claude Greff. Honteux !

M. Pierre Lellouche. Renoncement d'abord, parce que depuis des mois, vous avez laissé l'Allemagne décider seule, d'abord en ouvrant toutes grandes les portes de l'Union…

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. Pierre Lellouche. …puis en négociant toute seule, avec le Premier ministre turc, un véritable marchandage de bazar…

M. Jacques Myard. C'est le cas de le dire !

M. Pierre Lellouche. …aussi indigne qu'inefficace.

D'un côté, l'Europe s'engage à payer 6 milliards d'euros et à lever les visas pour les 80 millions de citoyens turcs ; de l'autre, les Turcs s'engagent à reprendre, sur la base d'un pour un, les migrants arrivés en Grèce, tandis que d'autres réfugiés seraient envoyés en Europe.

C'est là qu'intervient le second renoncement, mes chers collègues, puisque cet accord revient effectivement à confier à la Turquie le soin de protéger les frontières…

M. Jacques Myard. C'est la fin de l'empire romain !

M. Pierre Lellouche. …ce qu'apparemment nous ne sommes pas capables de faire nous-mêmes. D'où ces quatre questions.

Pourquoi la Turquie accueillerait-elle aujourd'hui des migrants, alors que des accords de réadmission existent déjà, qu'elle refuse d'appliquer ?

Comment faire confiance à un pays dont le Président, M. Erdogan, a dit vendredi, le jour même de la signature : « L'Europe danse sur un champ de mines en soutenant » – de façon hypocrite – « directement ou indirectement, le terrorisme » ? Voilà ce qu'a dit le Président turc !

M. Jacques Myard. C'est un expert !

M. Pierre Lellouche. Troisième question : qui va intercepter les migrants ? La marine française, la marine allemande, l'OTAN ?

Quatrième question : que va dire le Gouvernement alors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, est contre cet accord ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Je sais que tout est dans tout et réciproquement, mais sur des sujets d'une telle gravité, il faut regarder les choses avec une grande lucidité et beaucoup de calme.

M. Pierre Lellouche. C'est ce que nous faisons. Arrêtez de vous payer de mots !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Tout le monde sait, sur les bancs de cette assemblée, que c'est l'un des traits qui vous caractérisent.

Sur cette question dramatique, alors que l'essentiel est en jeu pour l'Union européenne – je pense que nous pouvons être d'accord là-dessus –, est-ce que la situation est parfaite aujourd'hui ? Non.

Est-ce que l'Union européenne telle qu'elle est aujourd'hui parvient à parfaitement régler la situation ? Non : à l'évidence, non.

Pourquoi ? Parce que l'Europe n'a pas été créée pour cela. Elle est aujourd'hui à un tournant. Elle doit se réinventer, devant une crise majeure, devant un afflux de réfugiés importants…

M. Pierre Lellouche. Répondez à mes questions, qui sont précises !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Je vais vous répondre, monsieur Lellouche.

M. Pierre Lellouche. J'ai posé quatre questions !

M. Franck Gilard. Faites respecter les droits du Parlement, monsieur le président !

Mme Claude Greff. Nous n'avons aucune réponse !

M. le président. Ça va venir.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Il faut, sur ce sujet, avoir une approche globale. Il y a un pays qui est en première ligne. C'est vrai pour le nombre de réfugiés qui se trouvent en Turquie : 2 millions. C'est vrai pour la menace terroriste, qui frappe aussi le peuple turc, à Istanbul comme ailleurs. Et je veux ici, au nom du gouvernement de la France, redire notre solidarité avec le peuple turc qui, comme des peuples de l'Union européenne, est victime de la barbarie terroriste et a le droit d'être défendu. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Il faut travailler sur ce sujet, et le Premier ministre est d'ailleurs en ce moment même à Bruxelles, avec le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, pour ce faire.

M. Pierre Lellouche. Quatre questions, et il vous reste vingt secondes !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Nous travaillons pour avoir une approche globale avec la Turquie…

M. Marc Le Fur. C'est bidon !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. …pour respecter le droit d'asile, pour accueillir les réfugiés qui doivent l'être en Europe et aussi, mais c'est un travail de longue haleine…

M. Pierre Lellouche. Répondez, monsieur le secrétaire d'État !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. …pour sécuriser les frontières de l'Union européenne. C'est un défi majeur pour l'avenir de l'Europe. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. Pierre Lellouche. Lamentable !