14ème législature

Question N° 3862
de M. François Rochebloine (Union des démocrates et indépendants - Loire )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires étrangères
Ministère attributaire > Affaires étrangères

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > réfugiés

Analyse > accueil. politique européenne.

Question publiée au JO le : 28/04/2016
Réponse publiée au JO le : 28/04/2016 page : 2888

Texte de la question

Texte de la réponse

ACCORD ENTRE L’UNION EUROPÉENNE ET LA TURQUIE SUR LES MIGRANTS


M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe de l'Union des démocrates et indépendants.

M. François Rochebloine. Monsieur le ministre des affaires étrangères, Angela Merkel, Donald Tusk et Frans Timmermans étaient en Turquie samedi dernier pour y rencontrer Ahmet Davutoglu, le Premier ministre turc, afin d'évoquer la crise migratoire et l'accord signé entre la Turquie et l'Union européenne.

Disons-le clairement, cette visite avait surtout deux objectifs : d'une part, mettre en avant les mérites d'un accord équivoque et plus que contestable, et d'autre part, masquer ses véritables difficultés d'application. En effet, depuis le 20 mars dernier, 325 migrants seulement ont été renvoyés de Grèce vers la Turquie et 103 réfugiés syriens ont pu être réinstallés dans l’Union européenne.

Au-delà des limites de ce marchandage qui porte atteinte aux valeurs et aux principes mêmes de l’Union européenne et de la France, cette visite a donné le sentiment désagréable d'une Europe prise en otage par la Turquie. Celle-ci a en effet posé un ultimatum clair aux Européens : elle se désengagera de l'accord en juin prochain si elle n'obtient pas les contreparties promises, à savoir 6 milliards d'euros, l'exemption de visas pour ses ressortissants et la relance du processus d'adhésion à l’Union européenne.

Le groupe UDI considère que ces contreparties sont inacceptables. Nous nous opposons tout particulièrement à la relance du processus d'adhésion de la Turquie en Europe au moment où Ismail Kahraman, président du Parlement turc, plaide pour la mise en place d'une constitution religieuse.

Monsieur le ministre, ma question est double. Comment le Président François Hollande peut-il rester silencieux face à une telle situation ? Quelle est la position de la France sur l'ultimatum fixé par les Turcs aux Européens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants et sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international. Nous avons déjà eu l'occasion d'échanger en commission, monsieur le député, mais je réponds bien volontiers à votre question.

La Turquie est un partenaire stratégique de la France et de l’Union européenne : il faut partir de ce constat. Avec ce grand pays, nous devons avoir des relations à la fois claires, confiantes et exigeantes – notamment, comme vous venez de le rappeler, sur les principes qui sont ceux de l’Union européenne : l'État de droit, l'indépendance des pouvoirs, la liberté d'opinion et la liberté de la presse. Nous n'y renoncerons à aucun prix.

Nous avons accepté un accord entre l’Union européenne et la Turquie face à une situation particulièrement dramatique : l'arrivée massive, dans des conditions illégales, de migrants en Grèce. Il fallait trouver une solution ; celle-ci est en cours de mise en œuvre. Il s'agit en effet de faire en sorte que les personnes arrivées illégalement en Grèce après le 20 mars reviennent en Turquie, cela dans le respect du droit international ainsi que des possibilités de recours des personnes concernées, et dans le cadre d'un accord global.

M. Pierre Lellouche. Pas de marchandage !

M. Jean-Marc Ayrault, ministre. Cet accord global prévoit que les Syriens qui peuvent prétendre au bénéfice du droit d'asile pourront être accueillis dans les États membres voisins, notamment en France – et la France respecte ses engagements, monsieur le député.

Si nous n'étions pas intervenus dans le cadre de cet accord, la situation serait aujourd'hui inextricable en Grèce et inacceptable sur le plan humanitaire. Vous seriez le premier à le dénoncer, et vous auriez raison ! La France fournit aujourd'hui, avec l'Allemagne, des moyens en personnels pour venir en aide à la Grèce ; elle prend aussi sa part des responsabilités en acceptant la relocalisation d'un certain nombre de réfugiés syriens en France. Voilà le chemin que nous empruntons…

M. le président. Merci, monsieur le ministre.