14ème législature

Question N° 3913
de Mme Catherine Coutelle (Socialiste, républicain et citoyen - Vienne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Familles, enfance et droits des femmes
Ministère attributaire > Familles, enfance et droits des femmes

Rubrique > femmes

Tête d'analyse > politique à l'égard des femmes

Analyse > femmes victimes de violence. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 11/05/2016
Réponse publiée au JO le : 11/05/2016 page : 3245

Texte de la question

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LE HARCÈLEMENT SEXUEL


M. le président. La parole est à Mme Catherine Coutelle, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Catherine Coutelle. Monsieur le Premier ministre, en politique comme ailleurs, le harcèlement sexuel est intolérable. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.) Les élus se doivent d'être exemplaires. Vous aussi. (Protestations sur les mêmes bancs.) Les députés, plus que tous les autres. Ils font la loi, en particulier sur le harcèlement et les agissements sexistes.

Une affaire secoue notre assemblée, la justice s'en est saisie, je ne la commenterai pas. Mais elle doit contribuer à lever l'omerta qui pèse encore sur les femmes victimes de harcèlement, à permettre que la parole se libère et que la honte change de camp. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe écologiste.)

En tant que présidente de la Délégation aux droits des femmes, je veux vous interroger sur l'application des lois que nous avons votées et renforcées.

La première loi du quinquennat est celle du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel. Le Conseil constitutionnel avait invalidé celle de 1992, car les définitions n'étaient pas assez claires.

Cette loi de 2012 nous a permis de mieux définir le harcèlement, qui est, j'insiste, un délit pour l'ensemble de la société.

Une proposition de loi qui sera examinée en juin au Sénat et que nous avons adoptée à l'unanimité vise à doubler les délais de prescription. Mais pour les victimes, la difficulté est surtout de parler et d'apporter la preuve des faits.

Nous avons travaillé sur l'inversion de la charge de la preuve. Les victimes ne doivent plus avoir à prouver : comme en matière de discrimination, elles doivent apporter des éléments de fait. C'est à l'agresseur de prouver qu'il n'a pas commis ces faits.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire quelles mesures vous entendez proposer pour renforcer la lutte contre ce fléau du sexisme ordinaire qu'est le harcèlement sexuel, dans tous les domaines de l'action publique ? Pouvez-vous nous dire si vous entendez prendre des mesures spécifiques pour les politiques et – pourquoi pas – aboutir à des peines d'inéligibilité ?

Il faut donner un coup d'arrêt au harcèlement dans la société et en particulier en politique. Les femmes veulent être entendues. Elles doivent pouvoir parler et obtenir justice. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe Les Républicains et du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes.

Mme Laurence Rossignol, ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes. Madame la députée, soyons claires : le harcèlement sexuel, dont chaque femme – je dis bien chaque femme – peut être victime sur son lieu de travail, dans son organisation politique, sur son lieu d'étude, dans l'espace public, dans la sphère familiale et amicale, le harcèlement sexuel pourrit la vie des femmes.

Esquiver les dragueurs, échapper aux lourdauds, aux harceleurs, aux prédateurs, être constamment sur le qui-vive colonise et gaspille trop de temps de cerveau disponible des femmes.

Le harcèlement est une violence faite aux femmes qui le subissent et, comme les autres violences, il instille dans l'esprit de la victime le doute sur sa propre culpabilité : « Qu'ai-je bien pu dire ? Qu'ai-je bien pu laisser entendre ? À quel endroit n'aurais-je pas dû me trouver ? Comment n'aurais-je pas dû m'habiller ? »

Pourtant, les rapports amoureux entre les sexes, entre les hommes et les femmes, obéissent à un principe très simple : quand une femme dit non, c'est non. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et du groupe écologiste.)

C'est pourquoi, depuis 2012, le Gouvernement a fait de la lutte contre le harcèlement sexiste et sexuel une priorité. Vous avez évoqué la réforme du code pénal, qui a redéfini la notion de harcèlement sexuel. Il y a eu ensuite le décret de 2015 sur le harcèlement sexiste et sexuel dans les universités, ce qui prouve bien que celui-ci n'est l'apanage d'aucun milieu, d'aucun lieu, et je souhaite vivement que la publicité des débats en cours dans les milieux politiques serve à toutes les femmes pour qu'elles s'expriment, et à tous les hommes, dans tous les milieux, pour qu'ils s'interrogent sur leur propre responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)