14ème législature

Question N° 77
de M. Jean-Jacques Urvoas (Socialiste, républicain et citoyen - Finistère )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > aménagement du territoire

Tête d'analyse > politique de la ville

Analyse > mise en oeuvre. Marseille.

Question publiée au JO le : 12/09/2012
Réponse publiée au JO le : 12/09/2012 page : 2581

Texte de la question

Texte de la réponse

MARSEILLE

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Jean-Jacques Urvoas. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, je voudrais vous interroger sur Marseille, sur la place de cette ville, sur le rôle de son agglomération, qui est devenu un enjeu national. (" Guérini ! " sur les bancs du groupe UMP.)
Marseille est régulièrement soumise aux projecteurs de l'actualité en raison des violences qui s'y produisent et qui plongent ses habitants dans un profond désarroi.
Beaucoup d'entre eux, au fil du temps, sont devenus sceptiques sur l'efficacité de l'État. Certains finissent même par douter de la fiabilité de la parole gouvernementale.
M. Daniel Fasquelle. Ils ont raison !
M. Jean-Jacques Urvoas. Après avoir réuni, la semaine passée, un comité interministériel, vous venez d'y travailler pendant deux jours.
Cette démarche traduit, à l'évidence, une nouvelle façon de trouver des solutions aux maux qui rongent cette ville.
Marseille ne se résume en effet pas aux événements qui attirent les caméras. Elle connaît plus qu'ailleurs les ravages de la pauvreté que charrie l'aggravation de la crise.
M. Claude Goasguen. Elle connaît aussi la corruption !
M. Jean-Jacques Urvoas. Ses habitants rencontrent des difficultés de transport. La scolarisation de ses élèves est plus difficile en raison d'une pénurie de structures et de moyens de fonctionnement. La rénovation urbaine se fait à un rythme toujours trop lent.
Pour répondre à ces défis, vous avez présenté une stratégie d'ensemble. Elle comporte évidemment des outils de renforcement en matière de sécurité, ce qui était un préalable. Chacun ici se félicite que la police retrouve les effectifs qui étaient ceux de la ville en 2006. De même, les efforts annoncés en faveur de l'éducation nationale sont reconnus et seront appréciés.
Mais surtout, vous proposez que l'agglomération marseillaise, aujourd'hui morcelée en six structures intercommunales, s'organise dans une seule métropole. Cette perspective institutionnelle nouvelle se veut porteuse de réelles améliorations. Elle fait pourtant débat. Vous avez engagé le dialogue, pour démontrer que des solutions existent.
Monsieur le Premier ministre, avez-vous trouvé à Marseille des interlocuteurs prêts à relever, avec vous, ce défi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Je reviens en effet, monsieur le député, de Marseille. J'y ai vu une attente formidable, extraordinaire. J'y ai vu des problèmes, j'y ai vu des reculs, j'y ai vu parfois des renoncements, des faiblesses, des fautes. (" Guérini ! " sur les bancs du groupe UMP.) Mais j'y ai vu aussi de l'énergie, de l'intelligence, des capacités.
C'est le rendez-vous que le Gouvernement, après la réunion du comité interministériel, propose aux Marseillaises et aux Marseillais, à tous les acteurs - politiques, économiques, sociaux, universitaires, culturels - de ce grand pays de Marseille-Provence. C'est le rendez-vous que l'État donne à toute cette région. Nous voulons ensemble relever le défi du développement.
Cela passe par le retour de l'État, par l'affirmation, oui, de l'autorité de l'État. C'est pour cela qu'en matière de sécurité, nous ne pouvons pas nous contenter d'ajouter des chiffres à des chiffres. Nous prenons le problème à bras-le-corps, par la création, après celle de Paris, d'une préfecture de police de plein exercice, et cela sur l'ensemble du territoire des Bouches-du-Rhône.
Cela témoigne de notre volonté très forte d'apporter les moyens humains, professionnels, mais aussi avec un objectif - qui est celui de la police, de la gendarmerie et de la justice : s'attaquer non seulement à la petite délinquance, mais à la racine du mal, c'est-à-dire à la criminalité organisée, par l'investigation, par la recherche des coupables, par des jugements qui mettront fin à la politique des bandes, pour que l'État et la République reconquièrent le territoire. (" Guérini ! " sur les bancs du groupe UMP.) Voilà la volonté du Gouvernement : le retour de l'État, à Marseille comme sur l'ensemble du territoire national.
Bien sûr que le Gouvernement continuera de lutter avec la plus grande fermeté, beaucoup plus qu'auparavant, contre toutes les formes de criminalité, et notamment la criminalité économique, financière, et la corruption. (" Guérini ! " sur les bancs du groupe UMP.) Il n'y aura aucune faiblesse, pour qui que ce soit, dans le public comme dans le privé. Voilà l'engagement du Gouvernement.
Mais par contre, et vous l'avez également dit, monsieur Urvoas, j'y ai vu beaucoup de pauvreté, beaucoup de découragement, beaucoup de lassitude. Il n'est pas acceptable que la France laisse à l'abandon une partie importante de la population. Dans les quartiers nord de Marseille, j'ai rencontré en fin de matinée des jeunes, qui veulent s'en sortir, qui font l'effort de la formation, qui veulent trouver un métier. Mais pour eux, il faut aussi un projet, un projet global de développement d'une grande métropole, qui doit sortir de ses divisions. C'est la proposition du Gouvernement.
Est-il normal qu'il y ait encore à Marseille dix autorités organisatrices de transport, sans plan de déplacements urbains ? Quand un ouvrier de Marseille trouve un emploi à Fos, il est obligé de prendre sa voiture, de dépenser 400 euros par mois pour pouvoir aller au travail. Ce qu'il faut, c'est une grande ambition de transports publics. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.) Pour cela, il faut que tout le monde se mette d'accord, et, si nécessaire, par la loi, le Gouvernement prendra ses responsabilités. (Mêmes mouvements.)
Voilà ce que j'ai dit aux responsables politiques, économiques, associatifs, universitaires que j'ai rencontrés. Le mouvement est engagé. Demain, le Conseil des ministres nommera le préfet de police. Il nommera aussi le préfet à l'égalité des chances, pour relancer la politique de la ville. Et j'ai dit aussi à tous mes interlocuteurs ce que l'Assemblée nationale et le Sénat vont voter : les emplois d'avenir, les contrats de génération, la politique du logement. Je compte sur vous, monsieur le président du conseil régional, Michel Vauzelle, et sur l'ensemble des élus, l'ensemble des responsables territoriaux, pour que vous soyez le relais de cette ambition.
Marseille a un avenir. La France ne l'oubliera pas. Le Gouvernement est à ses côtés, parce que la France a besoin de Marseille. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP, et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)