14ème législature

Question N° 8732
de M. Laurent Grandguillaume (Socialiste, républicain et citoyen - Côte-d'Or )
Question écrite
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > santé

Tête d'analyse > cancer du sein

Analyse > dépistage.

Question publiée au JO le : 30/10/2012 page : 6015
Réponse publiée au JO le : 25/12/2012 page : 7792

Texte de la question

M. Laurent Grandguillaume attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la question de l'information entourant le dépistage du cancer du sein. En effet, il semblerait qu'une controverse scientifique autour de la balance bénéfices-risques du dépistage prenne de l'ampleur. Les bienfaits du dépistage seraient surévalués tandis que ses inconvénients seraient sous-estimés par la campagne de communication autour du dépistage. Le Royaume-uni a lancé un réexamen des données scientifiques, susceptibles d'aboutir à une remise en cause du dépistage organisé. Pourtant, la France continue de délivrer une information à sens unique, basée sur les données scientifiques initiales (« 30 % de vies sauvées ») ce qui est aujourd'hui contesté. L'information sur ces questions de santé est essentielle, les Françaises doivent connaître les bénéfices du dépistage mais aussi le risque de surtraitement qui peut en découler. Elles seront ainsi en mesure de choisir librement et de manière éclairée de se faire dépister ou non. Comme l'indiquait la Haute autorité de santé en février 2012, la question de l'intérêt du dépistage « devrait faire l'objet d'une revue approfondie de littérature. C'est un des besoins majeurs et axes de travail complémentaires que la HAS a identifié à l'issue de son évaluation et qui devra être mis en œuvre afin d'améliorer le dépistage du cancer du sein en France ». Il importe d'évaluer précisément et façon indépendante les données scientifiques liées au dépistage. Il lui demande quelles mesures elle envisage pour améliorer l'information des Françaises sur les conséquences que peuvent avoir les dépistages.

Texte de la réponse

En France, le programme de dépistage organisé du cancer du sein est conforme aux recommandations européennes et aux recommandations de bonnes pratiques établies par la haute autorité de santé (HAS). Il est basé sur le libre choix des femmes à consulter un radiologue et le respect du colloque singulier entre la personne et le médecin. Ce programme généralisé en 2004 invite les femmes entre 50 et 74 ans à bénéficier tous les deux ans d'un dépistage de qualité pris en charge à 100 % par l'assurance maladie, sans avance de frais. La balance bénéfice risque est un des éléments qui a été pris en compte au moment de la décision de la généralisation du programme. Cette balance qui a fait l'objet de controverses récemment, est réévaluée régulièrement. Ainsi, les publications scientifiques européennes très récentes (numéro spécial du « Journal of medical screening » de fin septembre 2012), présentent les analyses statistiques très précises des données des programmes européens de dépistage en population générale et une analyse critique des études publiées dans la littérature scientifique. Les essais randomisés montrent une baisse de 21 % de la mortalité par cancer du sein suite à l'invitation au dépistage et la plupart des études observationnelles des programmes européens de dépistage organisé obtiennent des résultats similaires ou légèrement plus favorables. Les estimations dues au sur-diagnostic induit par le dépistage sont extrêmement variables selon les études, principalement car certaines études ne prennent pas pleinement en compte les effets liés à l'avance au diagnostic résultant du dépistage et les évolutions de l'incidence sous-jacente du cancer du sein. Les études prenant en compte ces effets, estiment des taux de sur-diagnostic de l'ordre de 10 % ou moins et jugent que les bénéfices du dépistage par mammographie l'emportent sur les risques. Contrairement aux autres pays européens, en France le principe de la liberté du choix du médecin est conservé et le programme de dépistage organisé gratuit sur invitation, coexiste avec un dépistage individuel non organisé mais remboursé. Cette coexistence introduit un biais important pour l'évaluation de l'impact du programme de dépistage organisé. La direction générale de la santé a récemment réinterrogé la HAS sur la coexistence du programme de dépistage organisé avec un dépistage individuel non organisé. La HAS recommande aux pouvoirs publics de maintenir et de renforcer le dépistage organisé en s'assurant que les conditions sont réunies pour permettre un choix libre et éclairé des femmes concernant leur participation ou non au dépistage du cancer du sein, quelle qu'en soit la modalité.