14ème législature

Question N° 963
de M. Patrick Bloche (Socialiste, républicain et citoyen - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > culture

Tête d'analyse > politique culturelle

Analyse > diversité culturelle. sauvegarde. politiques communautaires.

Question publiée au JO le : 13/06/2013
Réponse publiée au JO le : 13/06/2013 page : 6304

Texte de la question

Texte de la réponse

DÉFENSE DE L'EXCEPTION CULTURELLE


M. le président. La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Patrick Bloche. Monsieur le Premier ministre, l'engagement de négociations entre l’Union européenne et les États-Unis visant à la conclusion d'un nouvel accord de libre-échange amène à déterminer préalablement le périmètre du mandat confié à la Commission européenne ; le respect de l'exception culturelle et de la diversité culturelle, telle qu'elle est définie dans la Convention de l'Unesco de 2005, devrait logiquement conduire à ce que la culture et l'audiovisuel en soient exclus. Or, à l'heure actuelle, les craintes les plus vives existent qu'il n'en soit pas ainsi, malgré le vote clair du Parlement européen. La rencontre, pas plus tard qu'hier, entre M. Barroso et une délégation de cinéastes européens, ne peut que confirmer nos inquiétudes.

Or, à l'heure actuelle, les craintes les plus vives existent qu'il n'en soit pas ainsi, malgré le vote clair du Parlement européen. La rencontre, pas plus tard qu'hier, entre M. Barroso et une délégation de cinéastes européens, ne peut que confirmer nos inquiétudes.

Votre gouvernement, monsieur le Premier ministre, a pris clairement position sur cette question et conduit avec détermination un travail de conviction auprès des autres gouvernements des États de l’Union européenne. Vous pouvez compter sur le large soutien de la représentation nationale qui s'exprimera, cet après-midi, dans cet hémicycle, par le vote d'une proposition de résolution européenne.

Que les choses soient claires : si notre pays, son gouvernement, son Parlement, sont si mobilisés pour le respect de l'exception culturelle, ce n'est pas en défense d'une position strictement hexagonale qui ne concernerait que notre langue, notre culture et les dispositifs vertueux de financement de la création que nous avons su mettre en place. Ce qui est en jeu dépasse la France : c'est la diversité culturelle à l'échelle de l'Europe comme du monde, puisque le futur accord entre l’Union européenne et les États-Unis donnera le « la » des règles du commerce international.

Aussi, à l'avant-veille de la réunion du Conseil européen, pouvez-vous nous dire, monsieur le Premier ministre, si le message universel de la diversité culturelle que la France porte depuis le siècle des Lumières a emporté la conviction au-delà de nos frontières ?

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Monsieur le président Patrick Bloche, vous avez dit l'essentiel.

M. Pierre Lellouche. Tu parles ! Quelle blague !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. En effet, vendredi prochain, l'ordre du jour du Conseil du commerce extérieur comprendra la question du mandat donné à la Commission européenne pour engager des négociations avec les États-Unis en vue d'un accord de libre-échange.

La France est évidemment favorable au commerce international et aux échanges économiques, à condition que des règles du jeu soient clairement affirmées.

M. Pierre Lellouche. Vous avez tronqué le débat, c'est scandaleux !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Il y a déjà eu d'autres accords de libre-échange avec d'autres pays, qui ont donné des résultats positifs pour la croissance et pour l'emploi, à condition que ces accords soient négociés sur la base d'un principe auquel la France est très attachée, celui du juste échange.

En ce début de discussion entre la France et les États-Unis, plusieurs points doivent êtres réglés. La France n'était pas la seule à affirmer, par exemple, que les échanges relatifs à la défense nationale devaient être exclus. Sur ce point, nous avons obtenu un premier résultat positif.

M. Pierre Lellouche. Le débat, c'est cet après-midi !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Pour ce qui est de l'agriculture, nous avons là encore réussi à faire évoluer les positions de la Commission européenne pour préparer le mandat de négociation. C'est vrai pour le refus des OGM, du clonage des animaux, du bœuf aux hormones et de bien d'autres points que je ne vais pas détailler ici.

M. Pierre Lellouche. Il devait justement y avoir un débat cet après-midi ! C'est scandaleux !

M. le président. Allons, monsieur Lellouche !

M. Jean-Marc Ayrault, premier ministre . Il reste une question essentielle, que vous avez rappelée, celle de la position constante de la France en faveur de l'exception culturelle, en faveur de la défense des industries culturelles. La France a toujours considéré que cette question essentielle devait être mise de côté, comme c'est déjà le cas dans nos relations avec le Canada et le Japon – et ce qui est possible avec d'autres pays doit l'être aussi pour les États-Unis.

Nous nous battons, et nous nous battrons toujours pour la défense de la diversité culturelle.

M. Pierre Lellouche. Où est le débat ?

M. Patrick Balkany. On n'en débat pas !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Dans ce combat, nous ne sommes pas seuls. Le Président de la République, la ministre de la culture, Aurélie Filippetti, la ministre du commerce extérieur, Nicole Bricq, le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, ainsi que le ministre délégué des affaires européennes, Thierry Repentin, n'ont cessé de multiplier les contacts pour obtenir cette exclusion de la négociation.

Quatorze ministres européens de la culture ont même signé un appel sur ce point. Comme vous l'avez rappelé, le Parlement européen s'est exprimé dans le même sens. La question est simple. Quel mandat Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, qui représentera la France vendredi au Conseil européen, tiendra-t-elle du Gouvernement ? Ce mandat est clair, et la France s'opposera à l'ouverture des négociations si les industries culturelles ne sont pas protégées, c'est-à-dire exclues des négociations. La France ira jusqu'à utiliser son droit de veto politique. C'est notre identité, c'est notre combat. Nous ne sommes pas seuls, mais en tête pour le mener avec l'appui de la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)